Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Judith derrière la chaîne Youtube ‘Demoiselles D’Horreur’.
J’ai découvert la chaîne de Judith via Sam Cockeye (Videodrome) et Clara (Clararunaway) deux créatives dont j’ai eu le plaisir de vous présenter dans nos numéros précédents. La chaîne Demoiselles d’Horreur est active depuis trois petits mois seulement et rencontre d’ores et déjà son petit succès. Avec ses vidéos, Judith propose de mettre un coup de projecteur sur les femmes dans les films d’horreur. Rencontre avec une jeune demoiselle fan de cinéma d’horreur.
Bonjour Judith, merci de participer à notre chronique ‘Adopte un Créatif’. Dans le cas où il y aurait des internautes ignorant ton actualité peux-tu te présenter et nous rappeler ton parcours?
Judith : Merci de me permettre de participer ! Pour ce qui est des études, j’ai commencé par hypokhâgne/khâgne bien malgré moi, puis j’ai fait un rapide détour par la fac pour avoir ma licence d’anglais et enfin commencer à étudier le cinéma, et j’ai fini par atterrir en section Réalisation à l’École de la Cité. J’en suis sortie en 2016. Mon but a toujours été de faire du cinéma devant et derrière la caméra, et j’ai déjà réalisé des petits court-métrages. C’est lorsque je me suis retrouvée bloquée financièrement pour réaliser le suivant (un court d’épouvante librement inspiré de ‘La Chute de la Maison Usher‘ d’Edgar Poe), que j’ai songé à rester active en faisant une chaîne YouTube.
Quelle est ta toute première expérience avec internet ?
Judith : J’ai très peu de souvenir des débuts d’internet… La première chose que j’ai dû faire sur le web, quand j’avais environ 12 ans, c’était chercher les paroles des chansons de Mylène Farmer. Je ne me rappelle pas internet avant ça. En revanche, je me souviens beaucoup mieux de mes premières expériences devant un ordinateur sans internet, à faire des gribouillis sur Paint et à regarder mon grand frère jouer à ‘Doom‘ et à ‘Lost Eden‘. Çà c’était le bon temps !
Présente-nous ton univers :
Judith : Quand j’ai dû songer à un concept de chaîne YouTube, j’ai très rapidement réalisé que je voulais parler d’épouvante en attendant de pouvoir en réaliser moi-même. Je savais aussi que, pour continuer un combat qui est quotidien pour beaucoup et qui est crucial dans le monde du cinéma, je voulais mettre les femmes dans la lumière et sur le devant de ma scène, si petite soit-elle. Si on ajoute à ça mon amour de la mise en scène et de l’analyse, on obtient de manière assez évidente le concept de ‘Demoiselles d’Horreur‘.
Pour le pseudo, j’ai pensé à des tas de choses de plus ou moins bon goût, mais je ne trouvais rien qui me satisfasse vraiment. Alors j’ai fini par demander à mon cousin Théo qui a toujours été très doué en jeux de mots et en saillies humoristiques. Il a trouvé ce nom qui m’a semblé parfait. C’est un jeu de mots qui détourne le concept vieillot et traditionaliste de la ‘demoiselle d’honneur’ pour le faire basculer vers une idée amusante et inquiétante. En le mettant au pluriel, il englobe tous les personnages dont je parle et donne l’idée d’une armée de femmes badass qui se font leur place dans le genre. Tout pour me plaire, quoi.
Pour aller avec, je voulais un logo animé qui en jette. Comme j’aime dessiner, j’ai d’abord essayé de le faire moi-même, mais je suis trop manche en création numérique. J’ai alors demandé à une graphiste, Valentine Dubois (pixelvisible.com), de le réaliser. J’aimais son style qui est radicalement opposé au mien. Comme je voulais quelque chose qui reprenne plein de clichés gothiques, il fallait vraiment quelqu’un dont ce ne soit pas l’univers pour que la rencontre des deux donne quelque chose de frais et d’original tout en jouant sur les codes qu’on connaît par cœur. Elle a complètement respecté ce que je lui avais demandé tout en y apposant sa patte, et j’ai tout de suite adoré.
Pour mon image de profil, j’ai demandé à Charlotte Daux, une autre graphiste de mon entourage dont j’aime beaucoup les portraits. Je voulais quelque chose qui me ressemble mais avec un côté ludique et fictionnel. Idem, je suis très contente du résultat. On pourrait croire que ce ne sont que des détails, mais je pense que ces éléments visuels contribuent beaucoup à l’identité d’une chaîne toute nouvelle dont les gens ont besoin de pouvoir identifier l’univers.
Qu’est ce qui t’a donné ta vocation ?
Judith : Avant de commencer, je dois avouer que je ne connaissais presque aucune chaîne YouTube de cinéma. J’avais déjà regardé quelques vidéos par-ci par-là, mais je n’avais jamais vraiment suivi le travail de quelqu’un, et je me servais essentiellement de YouTube pour écouter de la musique ou pour regarder des matchs de roller derby. Autant dire que je me suis sentie un peu usurpatrice en mettant ma première vidéo en ligne, en sachant si peu où je mettais les pieds et ce que d’autres avaient fait avant moi… Mais depuis, je me délecte de découvrir toute cette communauté et l’incroyable travail accompli par tant de vidéastes et de critiques !
Donc ce qui m’a inspirée, au départ, c’était beaucoup plus les analyses de textes que j’avais pu faire en prépa il y a longtemps. En khâgne, j’étais là contre mon gré et j’aurais tant voulu m’échapper, mais j’avais des profs très cinéphiles, dont un prof d’anglais qui nous faisait des séances de ciné-club accompagnées de ses analyses brillantes, et un prof de philo qui utilisait très souvent des exemples de films pour illustrer ses cours. Ça a éclairé mes deux années de prépa où je me languissais de cinéma, et mes profs en parlaient toujours volontiers avec moi. Je dois au moins à cette période mon amour pour l’analyse de films.
Quelle a été la réaction de tes proches ?
Judith : Depuis le début, mes parents sont dithyrambiques et le reste de ma famille est très enthousiaste aussi, ce qui est vraiment sympa. Mon premier public a également été les membres du club de roller derby dont je fais partie. Pour celles et ceux qui ne connaîtraient pas, le roller derby est un sport de contact et de vitesse sur patins à roulettes, un mélange entre le patinage artistique et le rugby. Ma deuxième grande passion ! Bref, je leur ai un peu lâché ma première vidéo en mode ‘hey les meufs, au fait, j’ai fait ça’, et elles l’ont tout de suite regardée et partagée en masse, en me faisant des retours extrêmement encourageants. C’était vraiment une chance de pouvoir démarrer dans un climat aussi bienveillant !
Quelle sont tes sources d’inspiration ?
Judith : Comme je n’ai commencé à me pencher sérieusement sur les contenus Youtube cinéma qu’au moment de lancer ma chaîne (je sais, c’est pas très sérieux), mon idée de ce à quoi ‘devait’ ressembler une chaîne YouTube m’a plutôt été transmise par mon ami Vlad, qui m’aide sur mes vidéos, et qui est, lui, un grand consommateur de vidéos sur le web. Sauf qu’il ne suit pas tellement des chaînes consacrées au cinéma, donc il m’a plutôt montré des vidéos de Dirty Biology, Syllabus, Defakator… Et de mon côté, j’avais simplement vu une ou deux vidéos du Fossoyeur de Films. Donc tout ça s’est mélangé et m’a plus ou moins aiguillée sur ce que je fais pour le moment. Depuis, je me dis que j’aimerais arriver à faire des vidéos à la hauteur de celles de Monsieur Bobine ou de la Manie du Cinéma (et de tant d’autres..).
Quelle est ta première expérience de tournage ? Comment cela s’est passé ?
Judith : J’avais déjà réalisé des court-métrages à grand renfort de système D, et j’avais aussi déjà travaillé sur des tournages professionnels, donc je ne me sentais pas perdue. Surtout que Vincent est toujours là pour m’aider, et il m’apporte aussi du recul sur ce que je dis et la manière dont je le dis, donc j’ai vraiment de la chance de l’avoir avec moi sur ce projet. Le tournage de la première vidéo a quand même été éprouvant à cause du nombre de prises dont j’ai eu besoin ! On avait chaud, on finissait par être fatigués, et j’avais le cerveau en compote à force de me demander tout le temps si ce que je racontais intéresserait quelqu’un d’autre que moi. Mais en définitive on s’est bien marrés.
Quel a été ton meilleur moment de réalisation ? Le pire ?
Judith : Le pire : Pour la vidéo sur ‘Scream‘, le micro qu’on utilisait était mauvais et on n’a jamais réussi à se débarrasser du frottement anormal qu’il faisait, du coup on a tout tourné en sachant pertinemment que le son serait très moyen sur le rendu final, ce qui n’est pas très agréable.
Le meilleur : La chaîne est peut-être encore un peu jeune pour qu’un exemple se détache parmi tous les bons moments, mais disons… La pause déjeuner, à base de pizzas !
Quelles sont, dans tes vidéos, celles qui te semblent les plus intéressantes, qui te tiennent le plus à cœur, et pourquoi ?
Judith : Je dirais la dernière en date, celle sur ‘Mister Babadook‘, parce que même si c’est ma cinquième vidéo, c’est le premier film que j’avais commencé à analyser en prévision de cette chaîne. Donc ça faisait un moment que j’avais envie de partager ma vision du film !
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux jeunes créatifs qui souhaitent partager leurs univers sur la toile ?
Judith : On le dit souvent, mais la question qu’il faut se poser, c’est ‘est-ce que moi, j’aurais voulu voir ce type de contenu ?’ Si la réponse est oui, alors vous n’êtes pas le ou la seul(e) et ça intéressera d’autres personnes. Alors lancez-vous !
Si tu pouvais adresser un message à toi-même à l’âge de 10ans, lequel serait-ce ?
Judith : Commence à faire du roller derby dès maintenant !!! Bon, dans ton bled paumé c’est pas facile, mais fais au moins du roller tout court ! Et apprends aussi à chanter ou à jouer d’un instrument de musique, tant que tu y es, feignasse.
Que ferais-tu avec un budget digne d’un blockbuster ?
Judith : Je tournerais la version long-métrage de mon court de fin d’études appelé ‘Beautiful Injuries‘. J’ai déjà écrit le synopsis de la version longue, et c’est un peu l’objectif de ma vie de réussir à réaliser ce film un jour. Et aussi d’adapter les nouvelles d’Edgar Poe dans tous les sens.
Nous faisons appel à ton esprit créatif. A toi de nous proposer quelque chose et de commenter.
Judith : Ma figurine Catwoman était mon jouet préférée, quand j’étais petite. Alors voici un petit croquis de Catwoman version ‘Batman le Défi‘, parce que c’est un personnage féminin complètement pop et très important.
Elle incarne la femme victime de la violence des hommes et du cadre de la société, mais qui va faire de cette douleur un pouvoir étrange et menaçant. C’est une forme de rébellion torturée, qui véhicule aussi l’appropriation de sa séduction et de sa sexualité mais toujours prisonnière du carcan du regard des hommes et de leurs canons de beauté. Je pense que le côté très SM de son costume représente beaucoup de choses à ce niveau, entre la domination et la torture d’être figée dans cet archétype séducteur pour avoir du pouvoir en tant que femme.
Tu le sais, notre thématique est la Pop Culture. Que signifie pour toi la culture populaire ?
Judith : Je pense que c’est la culture qui ne méprise aucun support, aucune époque et aucun genre, et qui se construit par les choix du public le plus large, et non pas par ceux d’une élite. Je pense que c’est celle qui nous accompagne le plus au quotidien, de la manière la plus immédiate, et que son pouvoir est donc très grand.
On a un peu l’impression que je parle d’une religion… C’est flippant ou c’est révélateur ? Ou les deux ?
Quelles sont tes œuvres de référence dans la Pop Culture ?
Judith : Comme énormément de gens de mon âge, j’ai commencé par être une grande fan de Tim Burton, et ce depuis l’enfance, avant même de saisir le concept de réalisateur et de comprendre que derrière ‘Edward aux Mains d’Argent‘ et ‘Beetlejuice‘ il y avait la même personne. J’aurais donné n’importe quoi – et encore maintenant- pour vivre dans le monde de ‘L’Etrange Noël de Monsieur Jack‘ (réalisé par Henry Selick, dont j’aime beaucoup le travail aussi). Mais comme beaucoup des fans de Burton, je rejette tout ce qu’il a fait après ‘Big Fish‘.
Très haut dans ma liste, il y a aussi le ‘Dracula‘ de Coppola. Pas étonnant que je sois très vite devenue fan de Winona Ryder ! Mais je n’aime pas que le gothique et le baroque… Je suis aussi une inconditionnelle des ‘Demoiselles de Rochefort‘ et de ‘Peau d’Âne‘ de Jacques Demy, de ‘La Belle et la Bête‘ de Cocteau, de ‘La Beauté du Diable‘ de René Clément… Oups, on retombe dans le baroque. Oh et impossible de ne pas mentionner ‘Deep End‘ de Jerzy Skolimowski. Un film résolument pop et une immense révélation pour moi !
Et puisqu’on arrive dans les années 60 : ma sœur et moi sommes des beatlemaniaques invétérées. Et j’aime tout autant le Paul McCartney post-Beatles. Cela dit, ma chanson préférée au monde reste ‘Wuthering Heights‘ de l’inénarrable Kate Bush. Et ça tombe bien, parce que ‘Les Hauts de Hurlevent‘ est le roman qui a changé ma vie.
En matière de jeux vidéo, je n’ai quasiment joué que sur Playstation. Tout a basculé le jour où ma mère est revenue à la maison avec le premier Crash Bandicoot. Aussi bien elle que mon frère, ma sœur et moi sommes devenus complètement accro en une seconde. Pas mon père… Ensuite il y a eu Rayman et Spyro, les grands classiques de l’époque. Et une place très spéciale dans le cœur de mon frère et le mien pour Heart of Darkness, L’Odyssée d’Abe et Medievil !
D’ailleurs, je voudrais aussi vivre dans l’univers de Medievil pour dégommer du zombie vert fluo sur de la musique gothique dans les cimetières de l’Angleterre victorienne. J’ai également beaucoup joué à Street Fighter ou Soulcalibur, et je suis un peu restée coincée à cette époque : je joue toujours à tous ces jeux-là ! En jeux plus récents, j’ai tout de même pu découvrir ‘Alice Madness Returns‘ grâce à une amie, que j’ai adoré. Et Vlad m’a fait découvrir les sublimes ‘Layers of Fear‘ et ‘What Remains of Edith Finch‘, qui n’ont de défaut que leur brièveté.
Côté séries, je citerais en priorité ‘Twin Peaks‘, même s’il y en a beaucoup d’autres, et je pense que ‘Les Simpson‘ sont responsables de certains des plus grands fous rires de ma vie.
Et quelles sont tes attentes ?
Judith : J’attends avec impatience la suite de ‘The Handmaid’s Tale‘ ! En matière de films d’horreur, je trépigne en attendant le ‘Conjuring 3‘, et je suis très curieuse de voir la suite du ‘Dernier train pour Busan‘. Le premier est exceptionnel ! J’espère vraiment que la suite ne déméritera pas, parce que c’est compliqué de faire une suite à un si bon film en gardant la même qualité, surtout quand l’oeuvre de départ se suffit à elle-même et n’appelle aucun prolongement. Et à part les suites, tous les films d’horreur annoncés de 2020 peuvent compter sur moi.
Un mot sur ton actualité ? Tes projets en cours ?
Judith : J’ai plusieurs vidéos en cours d’écriture pour ma chaîne, et Gorkab m’a également proposé de faire une collaboration sur le film ‘Entretien avec un Vampire‘. Malheureusement, l’avancée de tout ça est un peu soumise à la situation sanitaire actuelle ! En plus, je ne dispose pas encore de mon propre matériel vidéo, et je ne peux donc pas tourner pendant le confinement, ce qui va occasionner un petit retard dans mes publications…
A quel autre créatif souhaiterais-tu voir poser ces questions ?
Judith : A ma collègue youtubeuse de cinéma Laura fait genre ! Mais il y a aussi les blogueuses de WelcomeToPrimeTimeBitch, Bon Chic Bon Genre, Leo Iurillo…
J’avais pu le constater en présentant mes court-métrages dans des festivals indépendants de films de genre réalisés par des femmes, en Angleterre, en Allemagne et aux Etats-Unis : les meufs ont énormément de choses à dire et à montrer en matière d’horreur ! Faites gaffe, on va révolutionner le genre !
As-tu beaucoup de retour des personnes qui te suivent ?
Judith : Oui, et c’est super ! Dès la première vidéo, j’ai été surprise d’avoir autant de commentaires de gens que je ne connaissais pas, et qui reviennent maintenant à chaque épisode ! La plupart sont très bienveillants, chaleureux et enthousiastes. C’est très sympa de leur part de prendre le temps de me faire leurs retours.
Tes abonnés te soufflent des idées parfois ?
Judith : Oui, c’est touchant parce qu’on voit que les passionnés du genre ont très envie que quelqu’un parle de leurs personnages préférés de manière approfondie. J’aime beaucoup savoir quels personnages féminins mes abonnés aiment et pourquoi. Bon, il arrive que ça s’accompagne un peu de mansplaining de la part d’hommes bien intentionnés mais maladroits qui ont tendance à me dire sans un bonjour ‘tu devrais parler de tel personnage’ ou ‘voici ma liste de personnages pour toi’… Mais sinon c’est toujours très agréable d’échanger sur ce sujet avec des gens qui s’y intéressent, et qui s’y connaissent souvent très bien !
Que voudrais-tu dire à tous tes abonnés et aux prochains ?
Judith : N’écrasez pas les araignées ! Et aussi un immense merci pour leur soutien (celui des abonnés, pas des araignées), qui est déjà bien plus grand que ce que j’aurais imaginé avant de me lancer, et qui donne un sens à mon travail !
Pour terminer, quelle question aurais-tu souhaité que l’on te pose et qu’aurais-tu répondu ?
Judith : -Veux-tu ces 50 millions d’euros ?
-Oh oui, merci, c’est cool !
Encore une fois merci Judith d’avoir participé à Adopte un Créatif.
Judith : Surtout merci de m’avoir proposé d’y participer ! Quand je vois les gens qui sont passés avant moi dans cette chronique et que j’admire, ça me fait rudement plaisir, vous savez !
Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Thomas dit Gorkab, l’auteur de l’émission CGM.
Si vous êtes un(e) habitué(e) de Youtube et que vous vous intéressez aux effets spéciaux numériques, vous connaissez obligatoirement l’émission phare CGM. Depuis sa tendre enfance, Thomas a toujours cultivé une passion pour l’image de synthèse, et ce qui était à la base un simple projet d’étudiant en 2005 est finalement devenu une émission, diffusée sur Internet. Avec CGM, Thomas revient sur les prémices, les origines, les échecs ainsi que les succès des effets spéciaux numériques. Rencontre avec un véritable passionné qui doit absolument figurer dans liste de vos abonnements.
Bonjour Thomas, merci de participer à notre chronique ‘Adopte un Créatif’. Dans le cas où il y aurait des internautes ignorant ton actualité peux-tu te présenter et nous rappeler ton parcours ?
Thomas : Salut ! Je m’appelle Thomas MARTIN, j’ai bientôt 34 ans, et je suis journaliste, présentateur et monteur de l’émission CGM (Computer Graphics in Movies) sur YouTube depuis 2013. Je suis également monteur professionnel à la fois dans le domaine journalistique et freelance à côté, et je suis principalement sur le logiciel Adobe Première depuis 2005. Niveau études, j’ai fait un BAC STT ACC – qui doit aujourd’hui exister sous l’appellation STG – avant de m’essayer à la fac avec une licence d’anglais inachevée, ainsi qu’un BTS communication.
Quelle est ta toute première expérience avec internet ?
Thomas : Ça devait être pendant les grandes vacances d’été, en 1996. On était partis avec ma famille à la montagne, Valmorel si je me souviens bien, et la station était équipée en ordinateurs déjà reliés à Internet. Mes parents m’avaient alors montré qu’il était possible de visiter virtuellement le musée du Caire depuis son écran d’ordinateur, ce qui était complètement fou pour moi, très fan d’Égypte antique à l’époque ! Quelques années plus tard, mon père a fait rentrer à peu près tous les modems disponibles chez nous, du 33.6 au 56K V90, en passant par le câble et enfin l’ADSL.
J’ai commencé à avoir une activité virtuelle courante avec l’obtention de mon premier PC, fin 2000 – je vendais même sur iBazar ! – et je ne me suis jamais arrêté depuis. Si j’avais su que toute mon activité professionnelle serait liée à Internet, je crois que ça ne m’aurait même pas surpris, avec le recul !
Présente-nous ton univers :
Thomas : L’histoire de mon pseudo est assez atypique, dans le sens où c’était à la base un nom que j’avais donné à une arme dans un récit de science-fiction que j’avais écrit entre 11 et 15 ans. Dans cette histoire, ‘La Poursuite de l’Espace‘, j’avais inventé une arme compacte mais surpuissante, sûrement basée sur le fameux ZF-1 du Cinquième Élément, et j’avais besoin de lui trouver un nom qui claque. Le logiciel Word ayant à cette époque une fonctionnalité permettant de trouver des correspondances aux mots écrit n’importe comment, j’avais laissé courir mes doigts sur le clavier pour voir ce qu’il me proposait. Le résultat ? Gora, Gorkab, Chakhib, Bakli, en réalité une petite montagne située dans le Caucase, mais je ne le saurais que bien des années plus tard. J’ai pris Gorkab, et c’est resté depuis, au point que j’ai des amis qui m’appelaient comme ça bien avant que je n’arrive sur YouTube !
Qu’est ce qui t’a donné ta vocation ?
Thomas : Comme beaucoup de lycéens qui s’ennuient en cours, je m’occupais comme je le pouvais. On était en 2004/2005, mon année de terminale, et je m’étais amusé à faire une petite liste de films contenant de l’image de synthèse. À ce moment-là, j’avais mis de côté mon ambition de devenir journaliste, n’ayant pu intégrer la filière littéraire, et je commençais à me passionner pour le métier d’infographiste, avec l’intention d’intégrer une école privée suite à mon Bac. Ce qui n’était qu’une simple liste dans un agenda L’Étudiant se transformera, avec l’arrivée à la fac, en exposé pour mes cours de cinéma. The CGM Project est parti de là, et a finalement émergé sur YouTube, avec le succès d’amis qui se lançaient avec succès à ce moment-là, comme Durendal, qui m’a aidé à me lancer sur la plateforme fin 2013.
Quelle a été la réaction de tes proches ?
Thomas : Avant que le premier épisode ne sorte fin août 2013, je sortais d’un stage post BTS en agence de communication, sans emploi et sans réelle perspective d’avenir. Le journalisme, avec le site Total Manga, m’avait ouvert de nombreuses portes, mais rien de très payant niveau salaire. Ma mère était inquiète, et voyant que mon petit frère s’était déjà installé hors de la maison avec sa copine, je ressentais une certaine pression ! J’ai relancé CGM à ce moment-là, en me disant que si des amis y arrivaient sur YouTube, il y aurait certainement une place pour moi. Ma mère m’a soutenu, tout en insistant quand même pour que je travaille à côté, et ça s’est construit petit à petit jusqu’à ce que je décroche des tafs de monteur en auto-entrepreneur, et enfin des contrats plus longs, me faisant enfin sortir d’une certaine précarité à laquelle j’avoue m’être résolu au fil des ans. Si je pouvais dire que tout irait bien à mon moi de 2013, je pense qu’il aurait infiniment moins de stress, mais en même temps, c’est ce qui m’a poussé à constamment m’améliorer, donc bon…
Quelle sont tes sources d’inspiration ?
Thomas : J’étais un gros consommateur de l’émission L’œil du Cyclone et leurs rétrospectives Imagina sur Canal+ – j’ai d’ailleurs quelques LaserDiscs d’époque – mais mes parents étaient de base de grands consommateurs de films de SF, blindés d’effets spéciaux, donc ça a pas mal forgé ma curiosité cinématographique dès mon plus jeune âge. Mais je pense que c’est ma découverte de TRON, à l’été 2002 avec une VHS à 1€ , puis en DVD collector avec plein de bonus pour la vingtième anniversaire, qui a définitivement fini de m’orienter vers l’image de synthèse comme passion, analogue aux nombreux jeux vidéo dont je suis toujours aussi friand aujourd’hui.
Avant que je ne lance CGM, les émissions d’Allociné du type ‘Merci qui ?‘ ont certainement eu une petite influence également !
Quelle est ta première expérience de tournage ? Comment cela s’est passé ?
Thomas : Je faisais déjà de l’audio en parodie audio depuis 2005, donc je m’étais déjà bien habitué à ma voix quand j’ai commencé CGM sur YouTube. Le problème, c’était bien sûr de me filmer ! Le tout premier CGM était tellement mauvais que, pendant le montage, j’ai tout mis à la poubelle et je me suis refilmé. Personne n’a donc jamais vu à quel point mes toutes premières prises ont été faites dans la douleur, seul face à ma vieille Sanyo Xacti HD1000 ! C’est pour ça, je pense, que j’ai toujours aimé revoir mon premier épisode, jusqu’à ce que je le réécrive et le refasse entièrement pour les 5 ans de l’émission, en 2018.
Quel a été ton meilleur moment de réalisation ? Le pire ?
Thomas : Le pire moment, je crois, c’est quand je tente de parler d’un sujet sur lequel je n’ai absolument aucune information. Ça m’est arrivé la première fois sur l’épisode 4, consacré à LOOKER, que je dois absolument refaire tant je déteste ce que j’ai sorti à l’époque, en 2013. Je n’avais pas de bonus vidéo, pas d’informations de la part du réalisateur Michael Crichton dans le commentaire audio, et personne pour m’aider. J’étais donc parti dans l’analyse du film, plutôt que de ses effets spéciaux, ce qui n’est pas du tout le but d’une émission créée pour raconter l’histoire des effets spéciaux !
Ça m’est encore arrivé, quand j’ai dû écrire l’épisode 17 sur les films animés japonais. Si j’arrive à trouver les techniciens d’époque, c’est parce qu’ils sont très présents sur Internet, mais côté Japonais, c’est totalement l’inverse, en plus de la barrière de la langue ! Je suis alors obligé de faire des recherches très poussées pour essayer d’écrire, mais même là je ne trouve pas ce que je veux, pour être au niveau que je me fixe, donc grosse grosse frustration !
Après, il arrive que je ce soit totalement l’inverse, et que la personne que je rêvais d’avoir pour parler de tel ou tel film réponde à mes messages, ou soit carrément physiquement disponible en interview, comme au Paris Image Digital Summit ou au VIEW à Turin notamment. Là, c’est à moi de me renseigner assez sur leurs carrières, souvent en revoyant les bonus des films sur lesquels ils ont travaillé, ou en lisant de vieux magazines type Cinefex, pour arriver à poser la question qui n’a jamais été posée, et avoir la réponse que j’attends depuis facilement plus de 15 ans ! Voir le visage de mon interlocuteur s’illuminer lorsque je lui pose des questions que d’autres ne posent pas, c’est la plus belle chose qui me soit arrivée, et qui continue de m’arriver avec toutes les rencontres que je fais au fil des ans !
Quelles sont, dans tes vidéos, celles qui te semblent les plus intéressantes, qui te tiennent le plus à cœur, et pourquoi ?
Thomas : Je crois que mon épisode 10, sur les dessins animés Rock & Rule et StarChaser, m’a longtemps tenu à cœur parce que c’était la toute première où j’avais un invité qui s’était filmé à distance pour parler de son travail. Malheureusement, c’est aussi l’épisode qui, pendant très longtemps, a été le moins regardé de tous, donc il garde une place toute particulière dans mon esprit.
Pour celle qui est la plus intéressante, je dirais aisément la dernière que j’ai produite, qui est un remake de mon épisode 3. L’original faisait 9 minutes, le remake en fait 27, donc c’est dire la quantité d’informations que j’avais à dire en plus par rapport à 2013 ! Là encore, j’ai eu la chance que l’un des graphistes du film Alien original de 1979, le Dr Brian Wyvill, se filme pour les besoins de l’émission et révèle des secrets jamais évoqués dans aucun bonus LaserDisc, DVD ou Blu-ray.
J’adore avoir les techniciens révéler ce genre de chose en vidéo, c’est vraiment le gros plus de CGM par rapport à toutes les autres émissions ciné disponibles aujourd’hui sur YouTube, sans me vanter (rires).
Lors de notre premier échange, je te disais que de mon point de vue tes vidéos ont du succès. Tu m’as répondu que le succès est relatif. Je profite de cette interview pour te demander si selon toi ta chaine a du succès ?
Thomas : J’ai eu un immense boost de 14 à presque 33 000 abonnés début 2019, grâce à la mise en avant du vidéaste CyrilMP4, et je m’étais clairement senti pousser des ailes à ce moment-là, annonçant que ça y est, je visais les 50, les 100 000 abonnés ! Sauf qu’en vérité, depuis ce week-end de boost, je n’ai cessé de perdre des abonnés ! Je suis ainsi très récemment repassé sous la barre des 31 000 abonnés, et chaque sortie de vidéo je vois entre 30 et 70 personnes se désabonner, inexorablement.
Côté vues, c’est pire, si je fais 10% de mon nombre d’abonnés, je suis content, mais en vérité, je tourne autour de 1000-2000 à chaque fois. C’est vraiment ridicule comme audience, et je suis loin d’être le seul vidéaste qui subi ça sur YouTube. La plateforme ne s’intéresse plus aux vulgarisateurs on dirait ! Il suffit de s’aventurer dans les tendances pour voir la réalité du média, qui est du consommable débile à base de miniatures de personnes constamment choquées du moindre truc stupide leur arrivant.
Tu passes des semaines à rechercher des choses pour finir avec une audience de misère, tandis que le premier débile qui mange des aliments de la même couleur pendant 24h se tape des millions de vues… C’est vraiment désolant en vérité, et heureusement que je ne fais pas mes vidéos sur YouTube dans l’optique de gagner de l’argent, j’ai même été démonétisé sans qu’on me dise pourquoi, voilà un an !
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux jeunes créatifs qui souhaitent partager leurs univers sur la toile ?
Thomas : S’ils veulent se servir de YouTube comme d’un book, d’un endroit où ils peuvent montrer leur taf, je dirais qu’ils doivent mettre la barre très haut dès le début. L’image est secondaire, c’est le son qui doit être irréprochable directement. Peu de monde traite la partie sonore avec respect, et pourtant c’est le premier poste selon moi. Prenez un bon micro dès le début, un filtre anti-pop sur AliExpress ou bricolez-en un avec un vieux collant et un cintre (littéralement), et vous verrez directement un boost en qualité.
Ça c’est pour l’aspect technique, mais sinon je dirais à tous ceux qui veulent se lancer sur YouTube d’arriver avec un concept béton, et surtout du contenu. Qu’importe le temps que ça vous prendra, des années que sais-je, réfléchissez bien à ce que vous voulez faire, et prévoyez quelque chose qui résonne soit avec les gens, soit l’actualité. Si votre contenu est bon, et surtout régulier, il n’y aucune raison que d’autres vidéastes avec des communautés établies ne vous repèrent pas et vous mettent en avant ! Venez me voir si vous voulez que je jette un œil à vos créations, j’essaye de toujours donner de bons conseils, quand j’ai le temps !
Si tu pouvais adresser un message à toi-même à l’âge de 10ans, lequel serait-ce ?
Thomas : Ne change rien, continue à faire ce que tu aimes, ça t’aidera à un point que tu n’imagines pas ! Ah et continue les LEGOs, c’est super !
Que ferais-tu avec un budget digne d’un blockbuster ?
Thomas : TRON 3 !
Pour le plaisir des oreilles
Nous faisons appel à ton esprit créatif. A toi de nous proposer quelque chose et de commenter.
Thomas : Je suis un gros fan de formats vidéos obscurs, et notamment l’UMD Vidéo, la tentative de Sony de faire un format vidéo propriétaire en refourguant littéralement – je dis un peu trop ce mot dans cette interview en fait – des DVDs sur des disques plus petits ! Alors, en exclusivité pour Eklecty-City, je vous ai fait le logo CGM avec ma modeste collection :
Tu le sais, notre thématique est la Pop Culture. Que signifie pour toi la culture populaire ?
Thomas : C’est vaste ! La pop culture, c’est bien sûr tout ce qui est populaire, mais c’est surtout une opposition entre la culture classique, et la culture plus actuelle, moderne, qui voit de l’art partout. La culture de masse, pourrait-on dire, je la vois dans le jeu vidéo, dans les comics, dans les animés japonais, dans la réalité virtuelle, là où ces arts seraient mis au ban par certains qui n’y verraient que vil consumérisme. Par extension, je m’intéresse bien plus à la pop culture, dont je me sens plus proche, que la culture que l’on nous a souvent forcé à étudier / détester au collège et au lycée.
Se taper des pages et des pages de descriptions de tableaux dans 20000 Lieux sous les Mers, par exemple, c’est insoutenable à mes yeux, et pourtant j’ai essayé. Peut-être parce que je suis quelqu’un de très visuel, qui a besoin de montrer les choses, que je la pop culture me fascine bien plus que la culture ! Elles sont pourtant les deux faces d’une même pièce !
Quelles sont tes œuvres de référence dans la Pop Culture ?
Thomas : En films, mes deux préférés restent et resteront Gattaca d’Andrew Niccol et Starship Troopers de Paul Verhoeven, en jeu vidéo je mets Final Fantasy VI très très haut, suivi de Chrono Trigger. Comics, je ne m’y intéresse pas vraiment, mais je pourrais citer les quelques Aliens sortis chez Dark Horse, basés sur le film de James Cameron.
En série, The OuterLimits / Au-delà du réel des années 90 reste une référence pour moi, même toutes ces années après, aux côtés de Fringe, par exemple ou, plus récemment, Devs d’Alex Garland.
En animés, je cherche encore ce qui dépassera Code Geass, mais plus les années passent, plus je me dis que ce sera impossible ! Puis, en musique, je suis un très gros consommateur de bandes originales, qui m’aident à me concentrer lorsque j’écris – cette interview étant à l’écrit, je la rédige d’ailleurs en ce moment sur celle de Mad Max : Fury Road – ou de techno style Orbital et leurs premiers albums début/milieu des années 90 (la première musique utilisée pour CGM était notamment d’eux : Out There Somewhere Part 2, issue de l’album In Sides, sorti en 1996).
Et quelles sont tes attentes ?
Thomas : J’ai très hâte de voir ce que donne le nouveau Nolan, Tenet, mais aussi ce que Villeneuve fera de Dune, à la fin de l’année ! Ma plus grosse attente, cependant, c’est Avatar 2, et comment Cameron va encore une fois nous en mettre plein les yeux, malgré les sceptiques et autres qui minimisent Avatar ces derniers temps.
J’ai envie de dire que personne n’est prêt pour ce qu’il va nous montrer, une fois encore, mais bon, l’histoire ne fait que se répéter, donc je ne serai qu’un écho du passé.
Un mot sur ton actualité ? Tes projets en cours ?
Thomas : Je suis sur plein de projets en même temps ! Là, avec l’obtention de l’aide CNC Talent, je dois réaliser un documentaire sur la compagnie Digital Productions, la boite derrière les effets spéciaux des films The Last Starfighter, 2010 (la suite de 2001) et Labyrinthe (avec David Bowie et Jennifer Connelly), mais ça nécessite de partir faire des interviews aux USA.
Pour le moment, c’est pas possible à cause du COVID-19, donc je me concentre sur d’autres projets faisables en France, comme un épisode spécial Entretien avec un Vampire en collaboration avec Judith de Demoiselles d’Horreur – que tu as interviewée ici même d’ailleurs – ou encore mon autre projet de longue date sur les Placements Produits au cinéma, qui prend petit à petit de l’ampleur, 241 films analysés au moment de cette interview.
A quel autre créatif souhaiterais-tu voir poser ces questions ?
Thomas : Je ne sais pas si tu as déjà eu Romain Houlès de la chaîne Derrière le Masque, mais je pense que tu devrais lui poser ces mêmes questions ! Pareil pour Hugo de la chaîne Misterfox !
As-tu beaucoup de retour des personnes qui te suivent ?
Thomas : J’ai peu de vues, mais j’ai au moins des commentaires très intéressants de la part des abonnés ! Alors, oui, c’est un vrai plaisir de voir chaque commentaire et d’y répondre dès que ça fait sens. C’est une des raisons qui font que je continue à produire sur YouTube !
Tes abonné(e)s te soufflent des idées parfois ?
Thomas : Yep, c’est déjà arrivé et ça continue encore ! J’ai rencontré plein de monde comme ça, et je crois que je n’aurais tout simplement pas fait d’épisode sur Matrix si l’un de mes abonnés n’avait pas eu le contact de Kim Libreri, le responsable du bullet time ! C’est vraiment un tout petit monde, tout peut aller très vite du jour au lendemain !
Que voudrais-tu dire à tous tes abonné(e)s et aux prochains ?
Thomas : Les épisodes Matrix Reloaded et Revolutions sortiront un jour ! Je suis en contrat à plein temps, même pendant le confinement, donc je n’ai plus autant de temps qu’avant, mais ça ne m’empêche pas de poser des pierres chaque jour sur ce projet ! Je pense que vous ne serez pas déçus, lorsque ça sortira enfin !
Pour terminer, quelle question aurais-tu souhaité que l’on te pose et qu’aurais-tu répondu ?
Thomas : C’est quoi ma bière préférée ? Oh bah mon cœur oscille entre la Volcelest Triple ou la BarbarBok ! Merci pour cette… quoi c’était pas une question ?
Encore une fois merci Thomas d’avoir participé à Adopte un Créatif.
Thomas : Merci beaucoup de m’avoir posé toutes ces questions ! Y a plein de choses que l’on ne m’avait jamais demandé dans aucune autre interview, donc c’était très cool ! Merci donc à toi, cher homonyme, et longue vie à Eklecty-City !
Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Laura derrière la chaîne Youtube ‘Laura fait Genre’.
J’ai découvert l’univers de Laura par l’intermédiaire de Judith (Demoiselles d’Horreur). Passionnée par le cinéma de genre, Laura partage sa passion sur Internet depuis plusieurs années en publiant des articles, des critiques et en participant à des débats sur les forums spécialisés. Récemment, Laura a décidé d’utiliser un autre média, la vidéo, pour parler de cinéma. Rencontre avec une fan du cinéma de genre.
la pop culture c’est ce qui fait battre le cœur de bon nombre d’entre nous
Bonjour Laura, merci de participer à notre chronique ‘Adopte un Créatif’. Dans le cas où il y aurait des internautes ignorant ton actualité peux-tu te présenter et nous rappeler ton parcours ?
Laura : Bonjour, je suis une passionnée de cinéma et plus particulièrement de cinéma d’horreur depuis des années et j’ai toujours aimé partager cette passion avec les autres. J’ai commencé par écrire des articles sur des blogs, des sites privés, des forums etc. Mais le manque de retours et de communication me manquaient vraiment, alors après un long passage sans écrire, j’ai eu envie de changer de format et de toucher un plus grand nombre de personnes. Je me suis dit que la meilleure façon, actuellement de toucher du monde, c’était de me lancer sur YouTube. J’ai ma chaîne depuis moins de deux ans (juillet 2018).
Par contre je n’ai aucune formation dans ce domaine, j’ai forgé ma culture cinéma au vidéoclub et dans les salles de ciné, je n’ai jamais voulu m’orienter dans une école de cinéma par exemple. J’étais en faculté de droit, donc rien à voir !
Quelle est ta toute première expérience avec internet ?
Laura : Je suis arrivée sur Internet à l’époque où c’était la mode des forums, tout naturellement je me suis dirigée vers un forum dédié à l’horreur. Je me suis vite retrouvée à faire partie de l’équipe et à écrire des chroniques sur les films que je regardais. Après la continuité ça a été les blogs WordPress, les Tumblr etc.
Présente-nous ton univers :
Laura : Mon pseudo a été assez long à trouver, je voulais vraiment intégrer mon prénom dedans parce que je voulais garder mon identité, je n’ai jamais eu envie de créer un personnage, et je voulais montrer au premier coup d’œil de quoi aller parler ma chaine. Et le nom de ‘Laura fait genre’ m’est venu comme ça, un soir d’inspiration !
Sur ma chaine je partage ma passion, que ce soit par le biais de critiques des derniers films vus, que ce soit à la maison ou au cinéma pour coller à l’actualité, je parle aussi de séries TV et en particulier de la série ‘American Horror Story‘. J’aime aussi proposer à mes spectateurs des tops ou des sélections de films pour leur donner plus de choix. Et de temps en temps je me lance dans des interrogations plus approfondies autour de l’horreur, comme essayer de répondre à la fameuse question ‘pourquoi tu aimes les films d’horreur’ et donc en analysant les aspects psychologiques ou sociologiques qui nous poussent à consommer ce type de cinéma !
Pour l’identité visuelle de la chaîne (logo, intro et outro) je dois tout à mon ami Maxence alias Cycomaniacs, qui a créé tout ça en ayant carte blanche complète et je pense que je n’aurais jamais imaginé un aussi beau générique. On aime tous les deux le cinéma d’horreur, on a beaucoup de références communes, donc quand il m’a envoyé la version test du générique, il n’y avait rien à modifier. Et d’ailleurs je reçois très souvent des commentaires à propos de ce générique, les abonnés l’adorent !
Qu’est ce qui t’a donné ta vocation ?
Laura : Toujours cette envie de partager ma passion avec les autres, quand je vois un film j’ai envie d’en parler, d’essayer de soulever des points ou des thématiques qui me semblent pertinents. Je pense que mon moteur c’est vraiment le partage, quand je découvre un petit film dont personne n’a parlé, j’ai envie de le faire découvrir aux autres.
J’ai toujours aimé écrire parce que j’ai toujours aimé lire et je pense que logiquement, l’écriture combinée au cinéma c’était forcément les critiques écrites et la chaîne YouTube n’est que l’évolution de tout ça.
Quelle a été la réaction de tes proches ?
Laura : En vérité ça faisait très longtemps que certains amis et mon conjoint m’encourageaient à me lancer sur YouTube, j’en avais envie depuis longtemps mais je n’osais pas sauter le cap malgré les encouragements. Donc quand j’ai enfin eu le courage de poster ma première vidéo, autant dire que ceux qui m’avaient encouragée jusque là étaient vraiment contents. Et depuis je reçois beaucoup de soutien et de motivation de la part de mon entourage et aussi beaucoup de critiques constructives, comme par exemple sur la durée des vidéos, les sujets abordés etc . Mais tout ça vient plutôt de mon entourage très proche, parce que les copains et connaissances un peu plus ‘éloignés’ je pense qu’ils se sont intéressés au début parce qu’ils trouvaient ça cool que je me lance mais ce ne sont pas d’eux que je reçois le plus grand soutien.
Quelle sont tes sources d’inspiration ?
Laura : Alors je ne suis pas beaucoup de chaînes YouTube en général, pour mon plaisir personnel je dois même avouer que j’aime bien certaines chaînes de maquillage par exemple, comme celle de Marion Caméléon qui est extrêmement créative et inspirée, ou des chaînes de true crime, comme Sonya Lwu qui est passionnante. Mais s’il y a bien une chaine ciné que j’ai suivi pendant assez longtemps, je pense qu’il en a inspiré pas mal, c’est la chaine du Fossoyeur de films. Et dans les chaînes ciné également Drawertv qui parle d’horreur et qui est vraiment drôle et inspirant. Je pense que ce sont les deux chaines cinéma que je suis depuis le plus longtemps.
Quelle est ta première expérience de tournage ? Comment cela s’est passé ?
Laura : C’était vraiment avec les moyens du bord, au début je tournais avec l’appareil photo de mon conjoint mais le son était mauvais. Après j’ai filmé avec un iPad (oui oui) mais l’image était mauvaise. Ce qui a eu pour conséquence de me démotiver un peu, je n’ai pas publié de vidéos pendant deux trois mois à ce moment. Mais les premiers tournages c’était surtout beaucoup de stress, j’étais super angoissée de ne pas avoir une bonne diction, d’oublier un élément crucial du film abordé… et c’était aussi beaucoup de galère sur les logiciels de montage ! Et d’ailleurs la toute première vidéo tournée et montée n’a jamais été publiée sur la chaîne, je l’avais gardée en privé et ça avait été une vidéo test que j’avais envoyé à mes amis proches pour avoir leur avis.
Quel a été ton meilleur moment de réalisation ? Le pire ?
Laura : Le meilleur c’est assez dur à dire, je pense peut être à ma vidéo sur le film ‘Midsommar‘ où j’ai fait une réaction à chaud le lendemain matin de la projection et pendant laquelle j’improvise totalement pendant une trentaine de minutes. C’est le genre de vidéo où tout coulait de source, où je suis très inspirée et je sais que cet aspect naturel plait assez.
Le pire, c’est peut être quand j’ai tellement de choses à dire que j’ai l’impression d’être un robot tellement je suis concentrée pour ne rien oublier ! Ou les jours où je suis motivée pour tourner mais que rien ne va : j’ai oublié de charger ma batterie, la luminosité est mauvaise, les voisins font du bruit, etc.
Quelles sont, dans tes vidéos, celles qui te semblent les plus intéressantes, qui te tiennent le plus à cœur, et pourquoi ?
Laura : Ma vidéo thématique ‘Pourquoi aime-t-on les films d’horreur‘ pour laquelle j’ai fait énormément de recherches, qui a été assez difficile à écrire, mais qui au final me plaît beaucoup parce qu’elle répond à beaucoup d’interrogations et elle a soulevé beaucoup de débats dans les commentaires, c’était vraiment intéressant.
Récemment j’ai fait une vidéo sur ‘American Horror Story‘ et leur façon de glamouriser les tueurs en série, qui apporte une réflexion intéressante qui interroge aussi sur la frontière entre réalité et fiction.
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux jeunes créatifs qui souhaitent partager leurs univers sur la toile ?
Laura : Déjà je pense qu’il faut s’écouter et se faire confiance, si on a envie de partager sa passion et qu’on a des choses à dire et bien il faut avoir confiance et se lancer. Par contre je dirais juste de ne pas se lancer avec l’idée de vouloir ressembler à quelqu’un, à faire la même chose qu’une autre personne. Puis de se poser les questions « qu’est-ce que je voudrais voir comme vidéo ? Quel contenu ? Quelle forme ? » et s’en servir comme orientation.
Si tu pouvais adresser un message à toi-même à l’âge de 10ans, lequel serait-ce ?
Laura : (Rires) alors être moins timide parce que ça a toujours été un problème récurrent et avoir un peu plus confiance !
Que ferais-tu avec un budget digne d’un blockbuster ?
Laura : Je rêve d’avoir un ‘studio’ YouTube, dans lequel je pourrais avoir un beau décor (en plus j’ai une décoratrice dans mes amis proches qui adorerait me faire un super décor), dans lequel je pourrais avoir mon matériel installé : lumières, son, caméra. Et comme ça je n’aurais pas à tout sortir, tout installer à chaque fois dans mon salon, ça serait vraiment le rêve !
Nous faisons appel à ton esprit créatif. A toi de nous proposer quelque chose et de commenter.
Laura : (Rires) alors je ne suis pas du tout créative en matière de dessin, de photo ni rien je n’ai jamais été douée dans ces domaines mais j’ai dû améliorer mes compétences avec le confinement parce que je dois occuper ma fille et elle adore ‘Dora l’exploratrice’ donc j’ai appris à dessiner Chipeur le renard parce que je n’ai pas d’imprimante pour imprimer des coloriages !
Tu le sais, notre thématique est la Pop Culture. Que signifie pour toi la culture populaire ?
Laura : Moi qui suis née dans les années 80, qui aie grandi dans les années 90 je pense que je fais vraiment partie de cette génération imprégnée de pop culture, je suis la génération qui a grandi avec les films de Spielberg, les films comme ‘Les Goonies‘, ‘E.T. l’extraterrestre‘ ou encore la saga ‘Indiana Jones‘ ce sont mes films doudous, qui aime les produits dérivés des films, qui balance des répliques de films cultes au moins une fois par jour. La pop culture c’est ce qui nous touche tous les jours que ce soit la musique, les films, les personnages. C’est quelque chose qui va unir les gens, leur donner des points communs, les lier.
Pour beaucoup je pense que ce terme de pop culture c’est un peu péjoratif dans le sens où ça ne serait pas assez élitiste, mais au final la pop culture c’est ce qui fait battre le cœur de bon nombre d’entre nous !
Quelles sont tes œuvres de référence dans la Pop Culture ?
Laura : Tous les films de gamins des années 80/90 ‘Gremlins‘, ‘Les Goonies‘, ‘Hocus Pocus‘, les séries du soir qu’on regardait sur M6 comme ‘X-Files‘ (qu’on appelait ‘Aux frontières du réel‘), ‘Buffy contre les vampires‘, ‘Les contes de la crypte‘, les bouquins ‘Chair de Poule‘ qui ont dû largement inspirer mon amour de l’épouvante.
Après je pense que c’est passé par les œuvres de Tim Burton, les grandes sagas comme ‘Le Seigneur des anneaux‘, ‘Harry Potter‘. Les licences de films d’horreur des années 80 aussi font largement partie de la pop culture comme Freddy Krueger de ‘Nightmare on Elm street‘ ou encore Michael Myers de la saga ‘Halloween‘, tous ces personnages sont devenues des icônes de la pop culture, tout le monde les connait et personnellement c’est ce qui m’a en partie amenée à ce que j’aime aujourd’hui.
Et quelles sont tes attentes ?
Laura : Dans mes grosses attentes, il y a le nouveau ‘Candyman‘ réalisé par Nia DaCosta que j’attends avec la plus grande impatience, j’attends aussi le film ‘The Lodge‘ qui traite de secte, et c’est un sujet qui m’intrigue beaucoup. Et également le film ‘Saint Maud‘ qui est réalisé par Rose Glass, qui a raflé pas mal de prix dans les festivals, et qui a l’air vraiment brillant. Pour les séries j’attends que Ryan Murphy dévoile enfin le thème de la saison 10 d’American Horror Story, j’ai fait une vidéo théorie là dessus et je suis sûre que ça ne sera aucune des pistes que j’ai explorées comme toujours !
Un mot sur ton actualité ? Tes projets en cours ?
Laura : J’ai au moins une vingtaine de vidéos en cours d’écriture, j’ai la fâcheuse manie de commencer mille choses en même temps. J’ai commencé à bosser sur des lives autour de l’horreur au féminin, avec un équipe de femmes aussi passionnées que moi, je vais surement lancer un concept de ‘video club’ sur ma chaine où je proposerais à mes abonnés un film dont nous débattrons ensuite en live ensemble.
Dans les projets hors vidéo j’aimerais participer à des festivals comme celui de Gérardmer par exemple, bon pas mal ont été reportés cette année donc j’imagine que ça sera pour l’année prochaine. Mais en tout cas j’essaye de planifier ce genre d’événements.
A quel autre créatif souhaiterais-tu voir poser ces questions ?
Laura : Les blogueuses cinéma avec qui j’organise les lives à savoir WelcomeToPrimeTimeBitch, Bon Chic Bon Genre, Leo Iurillo, qui sont des femmes passionnantes et passionnées ! Et mon collègue de l’horreur Drawertv.
As-tu beaucoup de retour des personnes qui te suivent ?
Laura : Oui et c’est ce que j’aime le plus, j’ai toujours beaucoup de commentaires sous mes vidéos où les abonnés interagissent avec moi, sur ma page Facebook aussi. C’est vraiment intéressant et c’est ce que j’attendais en créant une chaine YouTube. Quand j’écrivais des articles sur des sites ou des blogs je n’avais pas beaucoup de retours même si mes articles étaient beaucoup lu (meilleur exemple une critique lue presque 30.000 fois et avec seulement deux avis).
Tes abonné(e)s te soufflent des idées parfois ?
Laura : Oui parfois ils me donnent des idées ou me suggèrent des films à regarder, alors ma liste de films à voir s’allonge continuellement. Ou ils vont me dire qu’ils aimeraient que tel format soit un peu plus long par exemple. C’est intéressant d’être au plus prèss d’eux pour savoir ce qu’ils aiment, ce qu’ils aiment moins, ce qu’ils attendent etc mais après tout dépend de la façon dont c’est amené, parfois on me dit ‘tu devrais faire ça ou ça’ et là j’ai juste envie de dire ‘lance ta chaine et fais le’ !
Que voudrais-tu dire à tous tes abonné(e)s et aux prochains ?
Laura : A ceux qui sont abonnés et me suivent MERCI c’est une source de motivation énorme, mais de continuer à partager mon travail parce que c’est majoritairement ce qui aide le plus les créateurs de contenu comme moi, le partage sur les réseaux sociaux notamment. Et aux prochains, venez c’est cool, y’a une bonne ambiance et je vais très probablement vous faire découvrir un film dont personne n’a entendu parler !
Pour terminer, quelle question aurais-tu souhaité que l’on te pose et qu’aurais-tu répondu ?
Laura : ‘On t’a installé un super studio pour tourner tes vidéos, tu veux les clés ?‘
Encore une fois merci Laura d’avoir participé à Adopte un Créatif.
Laura : Merci à toi pour l’interview, c’est toujours super de pouvoir parler de son travail, de sa passion. Je vois que tu as déjà interviewé plein de super créateurs et c’est un plaisir de me retrouver à leurs cotés dans la rubrique !
Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Corentin derrière la chaîne ‘Nébuleuses et Cacao’.
Pour ce nouveau numéro, nous quittons la thématique du cinéma et des jeux vidéo pour nous recentrer sur le monde en compagnie de l’astrophotographe Corentin et de sa chaine documentaire naturaliste et poétique ‘Nébuleuses et Cacao’. Une rencontre pleine de poésie et d’émerveillement.
Ça sert à quoi de partager les choses si on ne le fait pas pour transmettre ?
Bonjour, Corentin, merci de participer à notre chronique « Adopte un créatif ». Dans le cas où il y aurait des internautes ignorant ton actualité peux-tu te présenter et nous rappeler ton parcours ?
Corentin : Je m’appelle Corentin Kimenau et je suis un réalisateur et photographe passionné qui essaie tant bien que mal d’insuffler dans chacune de mes réalisations, une poésie visuelle et narrative pour inviter mon spectateur au mouvement et à l’émerveillement. Je filme la nature, le ciel, les hommes et essaie de poser des mots sur les émotions rencontrées en essayant au maximum de payer la dette que j’ai envers le monde, cette dette qui fait que je suis vivant.
Mon parcours scolaire n’est pas vraiment brillant, après le lycée, j’ai fait une école de montage vidéo sur 2 ans qui m’a permis d’intégrer une boite de production en tant que monteur/cadreur pour payer mon école et mon loyer, puis m’expérimenter au travail de l’image évidemment. J’y ai trouvé une équipe incroyable avec qui j’ai appris à grandir et qui m’a toujours soutenu moralement dans mes projets personnels.
J’aime la technique, c’est essentiel pour moi de comprendre mes outils pour décupler ma créativité et connaître mes limites. Mais cette technique n’est rien si elle n’est pas au service de quelque chose, d’une histoire, d’une cause ou de la beauté par exemple.
J’ai créé ma chaîne YouTube en décembre 2008, elle totalise depuis 260 vidéos. Ça fait vieux (rires). J’ai commencé à m’intéresser à la vidéo et la photo à l’âge de 13 ans. J’y postais à l’époque mes tout premiers courts-métrages, mes premiers tests d’effets spéciaux ridicules et mes premiers essais de motion design. Un beau foutoir (rires), mais un grenier magnifique de vieux objets qui m’ont permis de pouvoir faire des vidéos dont je suis fier aujourd’hui.
J’ai remis cette chaîne à 0 en 2018, mes vieilles vidéos ne sont plus publics (rires). J’ai eu 10 ans pour apprendre à raconter des choses et à filmer le monde. Cette chaine (NebuleusesetCacao) est désormais dédiée à des vidéos plus travaillées, dans lesquelles j’essaie de trouver le juste milieu entre poésie, informations et divertissements.
Une de mes vidéos ‘L’endroit exact de la Solitude‘ a été primée au Festival Frames d’Avignon favorisant l’émergence créative sur YouTube en gagnant le prix du Jury. C’est une belle récompense je trouve ! En plus le soir là Fred de C’est pas Sorcier m’a payé une bière, dans le genre badass.
Quelle est ta toute première expérience avec internet ?
Corentin : Les wizz de MSN ! C’était incroyable de pouvoir rester en contact avec ses copains sans avoir à payer 10cts par sms, de pouvoirs faire des conversations webcam pixel alors qu’on s’était vu toute la journée (rires), c’était beaucoup plus drôle que de faire ses devoirs.
Les jeux vidéo aussi, Counter-Strike Source notamment, a été un grand axe de découverte du potentiel d’internet pour moi, j’y ai découvert l’E-sport et son sérieux, ça peut paraître paradoxal pour un type qui adore les grands espaces et l’extérieur, mais ça a été vraiment formateur pour l’adolescent attardé que j’étais. J’y faisais beaucoup de ‘frag-movie’ des montages où je mettais en scène les meilleures performances des joueurs d’une équipe par exemple, c’était la première fois que je gagnais un peu d’argent en faisant ça sur internet et j’ai compris à cette époque que la vidéo pouvait être quelque chose de sérieux, même si elle prenait place sur internet et traitait de jeux vidéo. Tu apprends aussi à gérer des communautés de gamer, à gérer des sites internet pour rassembler le monde, vraiment ça m’a donné envie de faire tellement de choses en voyant le potentiel d’internet que je suis déçu à chaque fois qu’on rabaisse les jeux vidéo à leur seul soi-disant pouvoir de créer des tueurs en série.
Présente-nous ton univers :
Corentin : Nébuleuses et Cacao, c’est le nom de ma chaine YouTube et du projet qui en découle, et vraisemblablement, pas celui d’un salon de thé. J’ai eu l’idée en mélangeant un chocolat chaud un jour, et en voyant la mousse de lait tourner au fond de ma tasse. La nébuleuse du Cacao. J’ai gardé l’idée parce qu’elle est jolie, se rapporte à l’enfance et à l’innocence puis parce que j’aime beaucoup les nébuleuses et le cacao. J’en parlais en introduction, mais c’est un projet que je partage sous forme de vidéos ou photographie et qui a pour but de ‘démocratiser l’émerveillement’. C’est une cause à laquelle je tiens énormément, car elle a le mérite d’inviter à l’éveil. Regarder le monde, l’écouter et le ressentir, c’est des choses trop oublié aujourd’hui. Et je ne pars pas d’un constat avec la vocation de vouloir changer le monde et de le façonner en fonction de mon point de vue. C’est juste que moi-même, j’ai oublié de regarder pendant un moment de ma vie, d’écouter ou de ressentir ce monde qui m’entoure. Heureusement j’y suis revenu, j’ai grandi avec des ‘montreurs’ mes parents, mes grands-parents, qui passaient leurs temps à me montrer les choses du doigt et à me sensibiliser aux choses qui m’entouraient. J’ai juste envie de montrer les choses du doigt moi aussi, la photo, la vidéo ça vient juste appuyer mon envie de partage, parce que ce sont des supports formidables pour sensibiliser.
Qu’est-ce qui t’a donné ta vocation ?
Corentin : Les contes et les légendes. C’est merveilleux d’entendre ces histoires qui sortent quelqu’un d’un quotidien en lui parlant d’autre chose que de lui-même. La nature, c’est merveilleux aussi d’observer et ressentir un truc qui soit capable de sortir quelqu’un d’un quotidien qui ne tourne qu’autour de lui-même. Le cinéma, c’est merveilleux d’avoir l’occasion de vivre une vie qui n’est pas la nôtre quelques instants et là encore de nous défaire de nous même.
La beauté d’un premier voyage en train, j’étais parti avec mon tout premier appareil photo jetable, j’avais 12 ans. Mes premières photos, mon premier rapport à la plastique des choses. J’étais tout pourri en dessin fallait bien que je trouve d’autres alternatives. C’était incroyable de pouvoir créer du souvenir, d’immortaliser des instants et de les figer en les matérialisant grâce à de la lumière et une pellicule. Je photographiais mes copains et j’immortalisai nos amitiés.
Quelle a été la réaction de tes proches ?
Corentin : Ce n’est jamais facile d’être mauvais à l’école et de persuader tes proches que tu crois en ton avenir, que celui-ci ne passera pas par les compétences que tu dois acquérir pour obtenir le bac et que tu sauras t’épanouir dans la vie en faisant quelque chose qui te plait, quelque chose de sain alors que tes profs disent le contraire. Mes proches ont fini par me faire confiance en voyant que j’étais 1er de ma classe de montage vidéo après le bac alors que j’ai toujours été très mauvais en classe au collège et au lycée. À partir de là, c’est un cercle vertueux, tu prouves qu’on peut te faire confiance et te laisser gérer ta vie, on t’encourage, ça te motive, etc. Mais c’est vraiment important de ne jamais baisser les bras et d’oser tester et travailler pour prouver que tu peux faire ce que tu veux.
On dit souvent que les proches s’inquiètent pour ton bien. Mais si tu leur prouves que tu as réussi à être bien malgré ce qu’il pensait de ton parcours, ils vont finir par accepter l’idée que c’était peut-être une bonne chose pour toi et t’encourager à continuer. Mais tu es le 1er à devoir faire l’effort.
‘Je suis coach de vie aussi, je fais des conférences et des PDF pour apprendre à vivre du bonheur en 10 étapes si ça t’intéresse.’ (c’est totalement faux)
Quelles sont tes sources d’inspiration ?
Corentin : Jean Michel Bertrand, réalisateur du film la Vallée des Loups que j’ai trouvé d’une puissance incroyable. Ce type veut juste faire des films pour montrer les choses. Je trouve ça sain et d’un altruisme incroyable. Vouloir offrir au monde un film pour faire rêver et éveiller à autre chose qu’à soi. Travailler en petite équipe, dans le respect de la nature et sans prendre le spectateur pour un idiot en lui donnant l’occasion de respirer et de laisser son esprit vagabonder dans les grands espaces qu’il filme avec ses camarades, c’est quelque chose qui me touche sincèrement.
Marie Amiguet, réalisatrice tout aussi passionnante que Jean Michel Bertrand avec qui elle travaille régulièrement. La qualité visuelle de ses documentaires animaliers et le storytelling qu’elle arrive à mettre en place au montage m’inspirent énormément et j’ai tellement de choses à apprendre de ce genre de personne, qui m’impressionne par ses compétences technique et naturaliste d’une part, mais qui est aussi capable de prendre parti en dénonçant sans donner de leçon. Je trouve ça formidable.
Sylvain Tesson pour sa qualité d’écriture, sa lucidité sur les choses et le monde qui l’entoure. Sa capacité à poser des mots sur des émotions et à sortir de sa zone de confort pour documenter le travail de Vincent Munier en Himalaya à la recherche de la panthère des
neiges par exemple.
Fred Pellerin pour ses contes et sa poésie. Gael Faye pour ses textes et sa poésie.
Et évidemment Antoine de St-Exupery pour son humanisme et son Petit Prince qui est clairement devenu mon livre de chevet et dont je pourrais parler des heures.
Jordan Mortz aussi.
Quelle est ta première expérience de tournage ? Comment cela s’est passé ?
Corentin : J’avais 14 ans peut être, on se filmait avec mes cousins et mes amis à l’aide de mon tout premier Caméscope, à carte SD déjà, oui je ne suis pas si vieux, puis je rajoutais des effets spéciaux sur nos vidéos à l’aide d’un logiciel éclaté que j’avais trouvé sur internet, c’était mes premières expériences de créations visuelles, à côté de ça on s’enregistrait avec un mp3 et on inventait des histoires, des interviews ou d’autres conneries, on essayait de s’amuser avec le potentiel des outils qu’on avait et je dois dire que c’était fabuleux. Mais j’ai ce regret de ne jamais avoir documenté ma vie d’enfant, des sorties vélo et de mes copains. Je ne tournais que dans le but de créer et inventer, pas pour capter une réalité et en faire un souvenir.
Quel a été ton meilleur moment de réalisation ? Le pire ?
Corentin : Ma première vraie réalisation, dans le sens où j’ai eu ce déclic de me dire ‘ça y est, tu l’as fait’ c’est le film ‘Où sont passées les Lucioles‘ qui est disponible sur ma chaîne YouTube avec le titre ‘Pollution lumineuse/Une lumière allumée, clin d’œil à l’obscurité‘.
C’est quelque chose d’arriver au bout de 3 ans de travail puis d’être content d’avoir tenu bon pour arriver jusqu’à lâcher la bête. Mais c’est tellement agréable de construire petit à petit une idée puis de lui donner la vie sous forme de film. C’est vraiment un média fantastique, on fait de l’image, on fait du son, on peut montrer et transmettre tellement de choses, ça a été une école pour moi, je me suis promis de ne jamais me filmer dans ma chambre à réciter des articles que j’aurais lu à droite et à gauche dans le but de les recracher comme un prof, j’adore apprendre, mais je déteste qu’on me fasse la leçon.
Je n’ai pas assez de charisme pour faire rire ou pleurer en étant face Cam, alors j’accompagne tout ça de musique, de belles images que j’ai réussi à capter puis d’un peu de poésie. Parce que c’est ma pédagogie, démocratiser l’émerveillement, je pense qu’on arrive à faire passer plus de choses en faisant rêver.
Mais c’est aussi ma pire expérience de réalisation, quand tu as un gros projet personnel comme ça, tu as le temps de douter du sens de tout ça. Ma journée type c’était de travailler la journée à mon job, puis d’enchainer sur une nuit de dérush, de montage d’écriture ou de réécriture. Les weekends je partais faire mes images, parfois j’écrivais, parfois je recommençais à 0. Pour réaliser ça j’avais besoin d’argent, ce que je gagnais la journée je l’investissais dans mon projet, puis j’ai essayé d’obtenir des subventions, mais là encore j’ai dû passer des étapes, créer et faire mes preuves avant d’accéder à ça, échouer dans des festivals et douter encore et encore. Mais j’en tire d’énormes bénéfices donc au final je suis vraiment vraiment content d’avoir eu à faire face à tout ça.
Quelles sont, dans tes vidéos, celles qui te semblent les plus intéressantes, qui te tiennent le plus à cœur, et pourquoi ?
Corentin : La plus intéressante est : ’ISS : L’endroit exact de la Solitude‘. Car elle est facile à regarder et qu’elle permet au spectateur de comprendre en quelques minutes à quel point on est ridicule dans cet Univers. Dans cette vidéo je photographie la Station Spatiale Internationale qui passe devant la Lune et le Soleil. Je l’ai d’abord fait pour le challenge technique, mais aussi pour le potentiel incroyable qu’à cette image de l’objet le plus évolué de notre civilisation devant l’immensité de notre soleil. Je trouve ça incroyable de voir la taille ridicule de ce truc devant notre étoile, et dire qu’il y a des gens là-haut.
Celle qui me tient le plus à cœur est la dernière ‘Pollution lumineuse/Une lumière allumée, clin d’œil à l’obscurité‘ ou son vrai nom ‘Où sont passées les Lucioles‘. Pour les souvenirs d’enfance qu’elle me rappelle et pour le temps que j’ai passé à la réaliser.
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux jeunes créatifs qui souhaitent partager leurs univers sur la toile ?
Corentin : De le faire. De ne pas hésiter, que ce soit sous forme de dessins, de musique, de blog, de texte, de photographie ou de vidéo par exemple. Tu peux tout apprendre sur internet. Moi ma passion c’est la vidéo, la photographie, mais si ta passion c’est la boulangerie parles-en. Parles-en pour le petit gars qui tombera sur ton blog, sur tes photos ou tes vidéos puis qui se dira, putain, c’est ça que je veux faire. Ça sert à quoi de partager les choses si on ne le fait pas pour transmettre ? PARTAGER. C’est important de bien comprendre ce mot. On partage pour montrer aux autres qu’on fait ça et se mettre en avant ? Ou on partage pour inviter les autres à se découvrir une passion au travers de la nôtre ? Mais de ne pas hésiter dans un premier temps à vérifier que ça leur plait.
Moi je crée des vidéos comme des prières à moi-même. Pour me persuader que c’est ça que je veux faire, qu’il ne faut pas que je lâche et que je dois continuer parce que c’est quelque chose qui me fait du bien. Je les partage ensuite via YouTube comme des bouteilles à la mer, des ‘lettres ouvertes à l’infini’ (nom de ma série documentaire sur YouTube), dans le seul but qu’elles atteignent au moins une personne et qu’il ou elle se dise, j’ai envie de faire ça.
J’ai envie de filmer le monde, de le raconter en le montrant du doigt, de le filmer, le photographier, le dessiner ou l’enregistrer. C’est là que mon projet prend son sens. Premièrement parce que ça me plait de faire ça et que j’en ai besoin, deuxièmement pour le glandu qui ira comme moi en foret la nuit photographier telle ou telle chose dans le froid et découvrir qu’il adore ça.
Si tu pouvais adresser un message à toi-même à l’âge de 10 ans, lequel serait-ce ?
Corentin : Enlève cet appareil dentaire il te sert à rien. Tu vas te péter la mâchoire dans 10 ans. Mais tu l’auras mérité.
Que ferais-tu avec un budget digne d’un blockbuster ?
Corentin : Les mêmes films, mais avec une équipe. Des gens talentueux avec qui j’ai envie de travailler et que je pourrais payer correctement. Si je bosse seul pour l’instant c’est parce que j’investis tout l’argent que j’ai dans mes vidéos et leur production. Je ne me paie pas, et je refuse de payer des gens à un prix ridicule c’est pourquoi je travaille seul. Puis j’ai moins de pression aussi. Mais ça irait tellement plus vite si je n’avais pas besoin de travailler à côté pour financer un truc qui ne rapporte rien.
J’ai des gens de mon entourage qui m’ont proposé de l’aide gratuitement pour mes projets, une illustration par ci, un effet spécial ici, un mixage son par là ou ‘vient on t’aide à porter ton matos pour ton plan de coucher de soleil’, tout ça, c’est du temps que des gens offre à mon projet, je trouve ça incroyable et je suis clairement gêné de ne pas pouvoir les payer convenablement. Mais on fait des vidéos sur YouTube, peut être qu’on arrivera à nous prendre au sérieux un jour. (Mais faut dire que le CNC fait déjà beaucoup pour légitimer le sérieux des créateurs comme moi.) En attendant, je leur offre un tirage d’une de mes photos. Donc c’est ça, avec un gros budget, je me paie une équipe talentueuse, et même un stand de crêpes au catering des tournages (rires).
Nous faisons appel à ton esprit créatif. À toi de nous proposer quelque chose et de commenter.
Corentin : C’était mon premier voyage en train.
Mon premier autoportrait.
Un travelling long et lent, au milieu des chemins.
Le mouvement comme baiser.
C’était il y a 12 ans. Ma première série photographique.
J’avais 12 ans et tout semblait magnifique.
Sublimer le lait, s’enivrer du beau,
Pas facile à 12 ans d’y poser des mots.
Découverte d’un langage,
Quand la pellicule parle à ma place,
J’avais besoin de l’image,
Pour me trouver une place.
Tu le sais, notre thématique est la Pop Culture. Que signifie pour toi la culture populaire ?
Corentin : C’est un fondement de société, c’est important de partager des références, et de pouvoir en discuter. Ça créer des groupes sociaux aussi. Rien qu’à voir la Japan Expo par exemple, les gens se rencontrent autour de valeurs et références communes et je trouve ça formidable. D’autant plus qu’internet a permis de faire connaître les pops cultures étrangères et c’est encore plus passionnant.
Quelles sont tes œuvres de référence dans la Pop Culture ?
Corentin : Toy Story et le travail du studio Pixar en général, le Géant de Fer ou le Roi et l’Oiseau. Toute l’œuvre de Buster Keaton et celle de Louis de Funès.
Niveau Série : Rick et Morty, Kaamelott et les Looney Tunes.
Niveau Artiste : Banksy, Space Invader et le secret de leurs identités.
Niveau musique : Supertramp, Boston, America, toute cette veine de rock des années 70-80 je jure que par ça sans déconner.
Niveau Jeu : Les Legos, Pokémon, Zelda, God of War ou Bro Force ce jeu est tellement drôle.
Et quelles sont tes attentes ?
Corentin : La suite de Rick et Morty, celle de Stranger Things. Le retour de Stromae. Le retour de Benh Zeitlin et son film Wendy.
Un mot sur ton actualité ? Tes projets en cours ?
Corentin : j’ai 3 autres grosses vidéos en cours de montage. Ça sort encore cette année. 4 vidéos en une année, ça n’arrivera pas tous les jours aha. J’en ferais d’autres petites entre temps surement, pas de panique. J’ai quelques diffusion de mon film documentaire en cours de négociations mais j’ai aucune certitude sur les dates vu le climat actuelle…
À quel autre créatif souhaiterais-tu voir poser ces questions ?
Corentin : Val So Classic, Valentine Jongen, elle parle de musique, d’opéra et le fait avec talent, sa série ‘Prélude’ que j’ai pu découvrir au festival Frames d’Avignon où elle a remporté le prix de la vulgarisation est un subtil mélange de divertissement et d’informations, c’est propre, drôle et mega intéressant! Elle vulgarise l’opéra au travers de la Pop Culture, ça t’intéressera assurément ! J’aime l’ambition de ses projets et son talent pour les réaliser ! Puis c’est une manière beaucoup plus actuelle de traiter de la musique classique, j’ai beaucoup de rancoeur en repensant à mes années collège et lycée où les cours de musique avait des odeurs épouvantable de poussières.
Quand on te parle avec passion, qu’on le fait de manière ludique, les choses passent tout de suite mieux et développent ta curiosité. Et ça c’est le principe même d’une belle vulgarisation d’après moi, ce que maîtrise parfaitement Valentine.
Creativa, Guillaume Corre, il est prof, et quand il a le temps il fait des vidéos essais où il traite de musique, de sociologie, mais c’est souvent beaucoup plus diversifié que ces 2 seuls mots. Sa série ‘Cogito’ est incroyable, je suis particulièrement sensible à la qualité de narration et de montage de ses épisodes, ce mec n’a pas suivi d’étude de montage ou de cinéma, pourtant il arrive à raconter et faire des vidéos où il prend le temps sans qu’on s’ennuie. J’ai rencontré bon nombre de types qui n’ont jamais réussi à faire ça, même après des années d’études. Quand tu as le truc, et que tu sais t’imprégner de la culture d’internet et l’utiliser pour apprendre et transmettre, bah tu as tout pour faire de belles vidéos.
As-tu beaucoup de retours des personnes qui te suivent ?
Corentin : Vraiment. Je suis toujours surpris du temps que mettent certaines personnes pour regarder mes vidéos puis prendre le temps de formuler ensuite un commentaire pour me l’envoyer, ils me disent ce qui leur a plu, en quoi ça leurs faits du bien ce que je peux créer et c’est un levier formidable de motivation. J’ai toujours espoir que mes vidéos déclenchent un mouvement chez mon spectateur, qu’à la fin du visionnage il se sentira animé par une profonde envie de réaliser quelque chose. De filmer le monde, de le raconter, d’agir en faveur d’une idée que j’ai pu avancer dans mes vidéos et le fait de lire ces commentaires longs et rédigés avec soin vraiment ça donne du sens à mon projet et j’en suis énormément reconnaissant. J’essaie vraiment de répondre à tout le monde, mais c’est long de traiter chaque message avec le respect qu’il mérite.
Tes abonné(e)s te soufflent des idées parfois ?
Corentin : Mes films et vidéos naissent en générale d’une envie que j’ai de parler d’un sujet. Mes abonné(e)s n’hésitent pas à me demander de parler de tel ou tel sujet et je trouve ça chouette, mais à l’heure actuelle je préfère créer pour traiter un sujet que j’ai envie d’aborder. Ça ne m’empêche pas de considérer chaque message et j’essaie parfois de les intégrer dans mes créations si c’est possible, c’est important de montrer qu’on s’intéresse à sa communauté, j’ai la chance d’avoir su trouver des personnes qui aiment mon travail et qui s’en nourrissent.
Que voudrais-tu dire à tous tes abonné(e)s et aux prochains ?
Corentin : Remercier ceux qui sont présents et qui suivent attentivement ce que je peux partager au travers de mes films ou de mes photos, remercier ceux qui viennent me rencontrer quand je suis en diffusion ou déplacement quelque part. Je suis loin d’être une star et ça me va très bien, j’ai un rapport très humain avec ma communauté et c’est ce qui fait la force de leur engagement, j’ai déjà rencontré un jeune garçon qui était assez déboussolé de me rencontrer parce qu’il avait vu mes vidéos et voulait juste prendre une photo avec moi, c’était déstabilisant, j’ai préféré discuter avec lui, de lui, de vidéo, d’astronomie et le motiver à oser raconter ce qu’il avait en tête, pour lui montrer que c’était une erreur de me starifier sans vraiment me connaitre. Je pense qu’une belle discussion vaut mieux qu’un simple selfie. Parfois ça suffit à faire naître des vocations.
Aux prochains je souhaite la bienvenue. Je les remercie de passer par ici et d’apprécier mon travail au point de s’abonner pour ne rien rater. Je suis lent. J’ai espoir que mes créations se consomment différemment que le zapping YouTube constant. Je suis loin des tendances et j’aime prendre mon temps.
Si vous n’osez pas regarder une de mes vidéos à cause de sa longueur, pas d’inquiétude. Elle restera là, elle n’a pas de date limite de consommation, elles ont pour vocation d’éviter le quart d’heure de gloire pour être sûres de ne pas tomber dans l’oubli d’ici 2 jours. Si vous y revenez dans 3 ans tant mieux, mes vidéos seront là pour vous au moment où vous en ressentirez le besoin.
Pour terminer, quelle question aurais-tu souhaité que l’on te pose et qu’aurais-tu répondu ?
Corentin : Comment fais-tu pour voler dans ton intro ?
Avec un cric de voiture. Et ce n’est même pas des conneries.
Encore une fois merci Corentin d’avoir participé à Adopte un Créatif.
Corentin : Merci à toi et covfefe. C’était intéressant de répondre à tes questions, à bientôt !
Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Valentin la chaîne ‘V pour Valentin’.
Pour ce nouveau numéro, je vous propose de partir dans l’imaginaire de Valentin, un passionné de science-fiction et de montage épileptique. Récemment, Valentin a publié l’épisode pilote de Hocus, un projet ambitieux qui prend la forme d’une série basée sur le détournement le tout avec Keanu Reeves s’il vous plaît. Rencontre avec un créatif sans limite.
Youtube ne devrait pas être considéré comme une chaîne de TV !
Bonjour Valentin, merci de participer à notre chronique ‘Adopte un Créatif’. Dans le cas où il y aurait des internautes ignorant ton actualité peux-tu te présenter et nous rappeler ton parcours ?
Valentin : Bonjour bonjour ! C’est donc parti pour la présentation !
Je suis V pour Valentin, vidéaste sur la toile depuis 2006. J’ai tout d’abord commencé par reprendre des sketchs des ‘Deux Minutes du Peuple‘. Pour expliquer aux plus jeunes et rafraîchir la mémoire des plus vieux, ‘Les Deux Minutes du Peuple‘ sont des sketchs audio écrits, réalisés et interprétés par François Pérusse, diffusés à la radio dans les années 1990 et 2000, tout d’abord sur Europe 2 puis sur Rire et Chanson.
Mes premiers pas sur Youtube ont donc commencé ainsi : en rejouant ces capsules audio en lips-sync tout seul chez moi, avec un appareil photo numérique à faible définition…
J’ai par la suite commencé à réaliser mes propres court-métrages, puis des webséries avec des amis via notre association ‘Les films de nous‘ aujourd’hui disparue, avant de faire une refonte de ma chaîne Youtube en 2014 pour y produire du contenu plus qualitatif et exigeant qui n’a vraiment abouti qu’en 2017 avec l’émission dont je suis le plus satisfait : le ‘Cinemashup‘, un format long mêlant critique ciné humoristique et exercice de montage épileptique sous forme de clip musical. Depuis, cette émission a laissé la place à un format court dans la même veine, le ‘Cinemini‘ que je produis en parallèle d’autres projets comme HOCUS, une série de détournements du style ‘La Classe Américaine‘.
Quelle est ta toute première expérience avec internet ?
Valentin : Ma toute TOUTE première expérience avec le web ? Elle n’avait rien à voir avec youtube, les vidéos ou les blogs… Je devais avoir 8 ou 9 ans, mon cousin m’a emmené dans une médiathèque. Là il m’a montré Jeux-video.com et son encyclopédie numérique de codes et astuces pour ‘tricher’ dans ses jeux-vidéo préférés… Sur Nintendo 64, pour ma part. Voilà. Ça vous donne une idée de l’âge que j’ai et de cette époque lointaine où on utilisait encore des silex pour allumer le feu sous la casserole.
Internet est arrivé chez moi 2 ou 3 ans plus tard et j’ai commencé à l’utiliser pour poster mes propres contenus en 2006, sur Youtube et via un Skyblog (oui, moi aussi j’en ai eu un).
Présente-nous ton univers :
Valentin : Je ne vais pas étonner grand monde en révélant que mon pseudo, V pour Valentin, fait explicitement référence à la culture-pop via ‘V pour Vendetta‘ d’Alan Moore et David Lloyd pour ce qui est du comicbook et de James McTeigue et des Wachowski pour ce qui est du film.
Mon univers, c’est l’imaginaire. Je suis particulièrement friand de science-fiction mais pas que. Dès qu’on me présente un monde nouveau ou des concepts originaux, il est fort probable que j’adhère et que je m’y intéresse, qu’importe le support (films, séries, bouquins, jeux-vidéo, jeux de plateau…).
Et ayant grandi avec les ‘Deux Minutes du Peuple‘ tout d’abord puis des séries comme Caméra Café, Kaamelott ou encore Nerdz, par la suite, rire et faire rire est une autre composante importante de mon état d’esprit.
Bref, j’ai des influences tellement variées que j’ai du mal moi-même à ne pas toujours essayer de me réinventer et essayer de nouvelles choses. C’est pour ça qu’il est difficile de décrire ma chaîne Youtube car il n’y pas d’émissions ou de chroniques phares mais plutôt des périodes avec leurs concepts et ce que je veux y mettre de moi dedans.
Oui, cette chaîne est en fin de compte très personnelle et égocentrée. (Rires) !
Qu’est ce qui t’a donné ta vocation ?
Valentin : Il faut rendre à Bill ce qui appartient à Gates… Malgré une efficacité extrêmement relative, c’est bien Windows Movie Maker qui a fait de moi ce que je suis aujourd’hui. Sacré twist, hein ?
J’ai appris le montage en autodidacte en commençant avec ce logiciel. Et je n’exagère rien en vous disant que la première fois que je l’ai ouvert et que j’ai compris son potentiel, j’ai eu une révélation : j’avais enfin trouvé ma guitare, mon pinceau, mon burin… Bref, l’outil qui me permettrait de m’épanouir artistiquement.
Le montage, c’est ma façon de m’exprimer. J’en ai même fait mon gagne-pain pendant quelques temps.
Aujourd’hui encore, je ne peux pas passer de longues périodes sans pouvoir assembler des bouts de vidéos les uns avec les autres pour en ressortir quelque chose de nouveau, même si c’est complètement débile.
Quelle a été la réaction de tes proches ?
Valentin : Ma famille m’a toujours encouragé et/ou regardé ce que je faisais d’un œil amusé, parfois sans trop comprendre l’intérêt ou l’importance que ce travail a à mes yeux.
Pour ce qui est de mes amis, j’ai monté plusieurs projets avec eux et je les fais régulièrement participer à mes projets. Ils sont donc tout à fait au courant et même motivés à me filer un coup de main quand j’en ai besoin (ce qui est une sacrée chance et une super reconnaissance, avouons-le).
C’est d’ailleurs un de mes amis qui, à l’époque du lycée, m’a incité à publier mon premier lips-sync des ‘Deux Minutes du Peuple‘ sur Youtube.
Quelle sont tes sources d’inspiration ?
Valentin : C’est une question que je ne pensais pas si difficile… Et pourtant, je n’ai pas la réponse !
Je me laisse influencer par ce que je regarde (films, séries, comics, youtube…), par les discussions et les délires avec mes potes…
Par contre, si on parle de mes derniers formats que sont les Cinemashup et les Cinemini, je me suis très clairement inspiré de ce que fait la chaîne Botch en terme de qualité et de rythme de montage. Ces gens sont des génies du web. Allez voir ce qu’ils font. Vraiment.
Quelle est ta première expérience de tournage ? Comment cela s’est passé ?
Valentin : Ça remonte à tellement loin que je m’en souviens peu…
Ma toute toute première expérience de tournage est certainement mon premier lips-sync des ‘Deux Minutes du Peuple‘, un sketch de la série des ‘radios associatives’. Que dire… J’ai empilé des bouquins sur une chaise, j’y ai posé l’appareil photo numérique familial, je me suis assis en face, j’ai lancé le sketch sur un poste… Et c’est parti !
Ensuite, en terme de ‘vraie’ production, ça a sans doute été Chuck Novice, un court-métrage à l’humour douteux qu’on a tourné avec les copains… En mode amateur mais en s’investissant un minimum. Mais mis à part la bonne humeur et l’insouciance de cette époque, mes souvenirs sont trop flous, malheureusement.
Quel a été ton meilleur moment de réalisation ? Le pire ?
Valentin : Il n’y a pas de moment précis qui me vient en mémoire. Mais globalement, ‘Contre la Montre‘, la parodie de la série 24 qu’on a tourné début 2010, reste un chouette souvenir.
Nous étions toujours amateurs mais en faisant en sorte d’être consciencieux et sérieux dans la façon de travailler… Alors que pas mal de plans étaient faits complètement à l’arrache et dans la bonne humeur. C’était vraiment un entre-deux agréable. Une époque où tout était possible dans nos têtes.
L’exemple inverse date d’il y a quelques mois seulement et est vraiment l’antithèse de ces tournages amateurs : l’adaptation de Fox-Boy (un super-héros rennais de bande-dessinée) qui n’a jamais vue le jour pour de multiples raisons mais toutes liées à une ambition de tournage professionnelle qu’on ne pouvait pas assumer à notre niveau malgré nos compétences. Nous avions beaucoup travaillé sur la pré-production mais pour l’instant, on en reste là.
Quelles sont, dans tes vidéos, celles qui te semblent les plus intéressantes, qui te tiennent le plus à cœur, et pourquoi ?
Valentin : Les ‘Deux Minutes du Peuple‘ n’ont pas été mes seuls exercices de montage quand j’ai commencé. Je m’entraînais aussi à monter des amv (Anime Music Video) et des mmv (Movie Music Video), les ancêtres du mashup, cet exercice qui consiste à créer des sortes de clip avec des images de films, de séries, de jeux-vidéo…
J’ai toujours aimé en faire et je n’ai pas arrêté de m’améliorer dans ce domaine depuis que j’ai commencé.
Et mon mashup préféré parmi tous ceux que j’ai fait est sans hésitation ‘Double You‘ qui mixe toute la filmographie des sœurs Wachowski sur un medley du groupe d’électro ThaTrickaz.
J’ai vraiment mis toutes mes compétences dans ce montage et même s’il n’est pas niquel à 100%, je reste très fier du résultat. A l’époque, j’avais pour ambition d’en faire une version longue… C’est toujours dans un coin de ma tête. On verra. Peut-être un jour.
Le mashup est d’ailleurs une composante d’un de mes autres projets dont je suis le plus satisfait : les Cinemashup.
Au-delà du montage, j’ai énormément bossé sur l’écriture pour inclure ces critiques de films dans un tout cohérent avec un propos global pour chacun des quatre numéros, tout en essayant de rester drôle et intéressant…
Alors il reste encore pas mal de taf à faire en terme de critique et d’analyse de films en elles-mêmes… Mais la narration et le rythme ont été un gros travail dont je suis plutôt satisfait, en particulier pour le quatrième et dernier Cinemashup.
Et pour terminer, bien sûr, il y a ce projet sur lequel je bosse en ce moment, dans lequel je mets toute la sueur de mon front : HOCUS.
Récemment tu as publié l’épisode pilote de HOCUS. Peux-tu nous en dire davantage sur le projet ?
Valentin : Oui, je peux !
Ce projet remonte à Mafia Red.
Est-ce que je peux vous en dire davantage sur le projet ? Oui, je peux !
Mafia Red est un court-métrage réalisé à partir de différents films redoublés, comme ‘La Classe Américaine‘ de Michel Hazanavicius et Dominique Mézerette. Je l’ai réalisé en 2018 à l’occasion de la 8ème édition du ‘Court-Roulette’, un concours de court-métrages à réaliser en une semaine.
Cet exercice m’a tellement plu que je me suis promis d’en faire quelque chose de plus gros et mieux fichu un jour… Et ce jour est venu avec HOCUS !
L’idée, cette fois, est de créer une série d’une dizaine d’épisodes d’environ dix minutes chacun pour y raconter une vraie histoire avec du vrai développement de personnages. Je n’en oublie pas l’humour et les gags potaches mais je tiens vraiment à créer un univers assez solide pour rendre les personnages aussi attachants et crédibles que dans un ‘vrai’ film ou une ‘vraie’ série. Je veux que l’on oublie qu’on regarde simplement ‘Keanu Reeves dans Point Break qui se fait redoubler‘.
Encore une fois, tout le défi consistera à doser cette ambition avec les vannes souvent bas du front et l’humour absurde de certaines scènes.
Je suis vraiment satisfait de l’épisode pilote que j’ai sorti en avril sur Dailymotion, qui marque un vrai level up par rapport à Mafia Red en terme d’écriture, de rythme et de technique. Et j’espère que les suivants seront dans cette lignée.
Et ils sortiront… Quand ils seront prêts !
D’ailleurs, tu as rencontré des difficultés avec Youtube.
Valentin : Absolument.
Rien de vraiment étonnant : l’algorithme de cette plateforme renommée a bien évidemment reconnu les longs extraits de Point Break que j’ai utilisés pour l’épisode pilote de HOCUS.
Je ne pouvais pas me résoudre à jouer avec lui en remontant les extraits qui posaient problème. L’épisode me plaît très bien comme il est et je veux le diffuser ainsi. Du coup, j’ai décidé de diffuser la série sur Dailymotion. A l’heure où j’écris ces lignes, elle y est toujours.
Youtube, de par sa politique de diffusion, formate de plus en plus ses contenus, ne laissant que peu de place et de visibilité aux petits vidéastes et à ceux qui ‘jouent moins le jeu’ que la plateforme leur impose. Pour mon cas, ce n’est pas un problème car Youtube ne me rapporte pas d’argent, que j’ai ‘peu’ d’abonnés (en comparaison aux standards) et que ma communauté sait où me retrouver pour suivre mon travail.
Mais je connais quelques vidéastes qui n’ont pas le choix de se plier à ce formatage et à ce que l’algorithme leur impose.. Tout simplement parce que c’est leur travail ; c’est vraiment ce qui leur rapporte de l’argent pour vivre. Et se voir imposer tant de règles parfois absurdes par une plateforme qui n’en a pas grand-chose à faire de leur situation est réellement problématique.
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux jeunes créatifs qui souhaitent partager leurs univers sur la toile ?
Valentin : Si vous voulez vraiment faire des vidéos qui vous ressemblent, que vous aimez et que vous avez envie de partager, pour moi, l’erreur est de tout de suite penser à Youtube et son fonctionnement car le risque est que la plateforme vous oriente dans vos démarches.
‘Ah tiens ? J’ai plus de visibilité si je fais une vidéo de dix minutes ? Et ça marche mieux si j’en sors une par semaine ? Zut, je comptais pas travailler dans cette optique mais si c’est ce qu’il faut faire, je vais m’y mettre.‘
Pour moi, ce raisonnement est le premier pas vers une création de contenu aseptisé.
Prenez vraiment Youtube comme une plateforme de diffusion plutôt qu’un media (Youtube ne devrait pas être considéré comme une chaîne de TV) ou alors publier votre contenu ailleurs. De toutes façons, partagez votre contenu autour de vous, à vos amis et votre famille… Ça commence par là ! Qu’ils soient positifs ou négatifs, il vaut mieux dix commentaires de qualité par des gens qui vous soutiennent que dix mille pouces bleus anonymes.
Si tu pouvais adresser un message à toi-même à l’âge de 10ans, lequel serait-ce ?
Valentin : Aie confiance en toi. Les autres n’en savent pas forcément beaucoup plus que toi.
(Et sois patient : un jour tu pourras jouer avec Banjo-Kazooie dans Smash Bros. Si j’te jure !)
Que ferais-tu avec un budget digne d’un blockbuster ?
Valentin : Eh bien, je pense que cette fois je pourrais m’atteler à la réalisation de Fox-Boy ! J’ai vraiment plein d’idées pour adapter ce personnage à l’écran. Et si en plus je peux rémunérer les personnes qui travaillent sur ce projet tout en ayant de chouettes effets spéciaux… Alors allons-y !
Et sinon, j’ai toujours ce vieux projet d’adapter le mythe d’Orphée aux Enfers… Je n’en dirai pas plus. On sait jamais. (Rires).
Nous faisons appel à ton esprit créatif. A toi de nous proposer quelque chose et de commenter.
Valentin : Bon eh bien, je vais faire ce que je sais faire de mieux. C’est loin d’être abouti mais j’ai eu cette idée hier avant de m’endormir : faire un mashup d’héroïnes de ciné bien badass sur ‘BehindmyEyes‘ de Apashe, son album ‘Renaissance‘ est sorti il y a peu, c’est une grosse tuerie.
J’observe pas mal ce qui se passe du côté des féministes depuis quelques années, même avant MeToo. Ce milieu m’a fait élargir ma conscience sur pas mal de choses vis-à-vis du monde qui nous entoure et même de moi-même. MeToo a un peu bousculé tout ça mais il reste encore beaucoup à accomplir pour la visibilité des femmes, leurs droits et leurs considérations dans notre société patriarcale.
Et comme la pop-culture s’imprègne toujours de ce qui est dans l’air du temps… C’est bien de voir d’y voir de plus en plus d’héroïnes badass, certes, mais aussi et surtout de vrais personnages féminins qui ne sont pas de simples fantasmes masculins et qu’importe les qualités et défauts du film, ‘Birds of Prey‘ a bien réussi son coup de ce côté-là, selon moi.
Bref, je ne suis pas le mieux placé ni le mieux préparé pour en parler, sans doute maladroit dans mes propos, mais le sujet m’intéresse beaucoup, en tout cas.
Donc voilà, de tout ça est née l’idée de ce mashup… Si j’avais du temps j’en ferais une version longue et mieux fichue. J’ai quand même fait celui-là à la va-vite, comme une esquisse sur un bout de nappe jetable, mais bon… Quand Youtube me payera pour ça, j’y réfléchirai. (Rires).
Tu le sais, notre thématique est la Pop Culture. Que signifie pour toi la culture populaire ?
Valentin : Vaste et épineuse question à laquelle je ne pourrai répondre que partiellement… ‘Populaire’ renvoie à une culture accessible, adoptée et compréhensible par le plus grand nombre. On peut y déceler un petit côté péjoratif, une ‘culture’ qui serait plus bas du front que les autres, celles que détiendrait ‘l’élite’… Certains le pensent vraiment mais ce n’est pas mon cas.
La culture populaire est étendue, plurielle et peut justement très bien se servir de son impact sur le grand public pour véhiculer des idées et des concepts pointus.
Pour donner des exemples à succès temporellement proches de nous, même s’ils ne creusent pas forcément leurs sujets à fond, ‘Avengers : Infinity War‘ et ‘Joker‘ sont deux films ancrés dans la culture populaire qui amorcent des questions importantes et intéressantes sur la surpopulation et la gestion de nos ressources pour l’un et sur notre responsabilité et notre bienveillance vis-à-vis des inadaptés, pour l’autre. Si des pistes de réflexion peuvent être amorcées, même inconsciemment, avec ces œuvres, je dis banco !
Bien sûr, la culture populaire ne se limite pas aux films de super-héros ni même aux films tout court, d’ailleurs. Et c’est ce qui en fait sa richesse et son importance.
Quelles sont tes œuvres de référence dans la Pop Culture ?
Valentin : Matrix. Clairement. Je n’ai plus besoin de réfléchir à la question. Bien sûr, je ne peux être si catégorique que parce que cette saga – oui, les trois films ensemble – a eu et a encore aujourd’hui une importance fondamentale pour moi, dans ma façon de voir le cinéma, la musique, le montage, la relation image/son et même le monde qui nous entoure.
Mais en plus de cela, le premier opus – cette fois j’écarte les deux films suivants – a eu une importance considérable dans l’Histoire du cinéma. Il y a vraiment un avant et un après Matrix dans les blockbusters américains. Que ce soit le traitement du son, les scènes de bastons, les effets spéciaux… Matrix a influencé la pop-culture pendant des années et on peut encore trouver des traces de son héritage aujourd’hui.
Au niveau des séries, je suis ultra-fan du Giliganverse : Breaking Bad, Better Call Saul, El Camino… Cette vraie saga aux personnages profonds, aux situations stressantes, drôles ou criantes de vérité me met régulièrement des claques dans la figure.
Et pour terminer – je laisse de côté les jeux-vidéo car à part Smash Bros et Breath of the Wild, je ne joue plus à grand-chose – en ce qui concerne les comics, l’univers DC d’une manière générale me plaît énormément. Je m’y sens bien, je connais les personnages, je les adore et dès que je tombe sur un récit prenant avec l’un d’entre eux, je suis aux anges.
Et quelles sont tes attentes ?
Valentin : J’attends ce qui va me faire vibrer, qu’importe que ce soit un remake, une suite ou un projet nouveau. J’attends d’être agréablement surpris et touché… Je ne sais donc pas ce que j’attends !
…
Ah si tiens, pour en revenir vite fait aux jeux-vidéo… J’espère pouvoir un jour enfin jouer à la suite d’une de mes sagas préférées : Metroid Prime 4 !
Un mot sur ton actualité ? Tes projets en cours ?
Valentin : Je me consacre entièrement à HOCUS. Mais le Cinemini est toujours dans un coin de ma tête… J’anime aussi un podcast avec Matt, Hyanda et Chris de ComiXrayS, les fondateurs du collectif LesComics.fr duquel j’ai fait partie pendant quelques années.
Ça s’appelle l’Estaminerd, on y parle de pop-culture, de nos vies, de nos anecdotes… Et vous pouvez nous retrouver facilement en googlant !
A quel autre créatif souhaiterais-tu voir poser ces questions ?
Valentin : Je parlais de Botch qui m’ont inspiré… Alors forcément, je pense à eux !
Sinon il y a les copains Punky, Tyllou et Jstylesman qui produisent tous les trois du contenu de qualité et qui ont tous les trois des choses intéressantes à raconter, chacun dans leurs domaines.
Et pour finir, je dirais, KronoMuzik qui produit aussi de l’excellent contenu et qui explose le game de l’humour incompréhensible sur Twitter.
As-tu beaucoup de retour des personnes qui te suivent ?
Valentin : Le noyau dur de mes abonnés est réceptif à ce que je publie et n’hésite pas à réagir lorsque je poste des vidéos. Leurs messages sont toujours positifs et encourageant. Les retours ne sont pas si nombreux que ça compte tenu de mon nombre d’abonnés mais ils font toujours très plaisir à lire !
Tes abonné(e)s te soufflent des idées parfois ?
Valentin : En 2014, j’ai lancé pendant un an ‘A SUIVRE‘, une websérie qui consistait à demander aux internautes ce qui allait se passer dans l’épisode suivant. Je prenais les idées les plus intéressantes ou drôles et je les incluais dans la suite le mois suivant. Mis-à-part ce concept, non, mes abonnés me soufflent peu d’idées. Mais j’en ai suffisamment moi-même pour ne pas en manquer !
Que voudrais-tu dire à tous tes abonné(e)s et aux prochains ?
Valentin : Rien de plus vrai et sincère qu’un énorme merci (oui oui) !
Pour terminer, quelle question aurais-tu souhaité que l’on te pose et qu’aurais-tu répondu ?
Valentin :
– J’ai cent millions d’euros dont je sais pas quoi faire. Je te les donne ?
– Oui.
Encore une fois merci Valentin d’avoir participé à Adopte un Créatif.
Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Valentine derrière la chaîne ‘Val so Classic’.
Avec sa chaîne ‘Val so Classic’, Valentine nous invite à la découverte du monde merveilleux de l’opéra, des instruments et de la musique classique comme nous ne l’avons jamais vue. Une invitation à voyager en musique à travers le monde. Rencontre avec une créative mélomane.
Bonjour Valentine, merci de participer à notre chronique ‘Adopte un Créatif’. Dans le cas où il y aurait des internautes ignorant ton actualité peux-tu te présenter et nous rappeler ton parcours ?
Valentine : Je m’appelle donc Valentine (‘Val’ pour beaucoup) et je suis née en Belgique il y a une bonne vingtaine d’années. A l’âge de 2 ans, mon père m’a emmenée voir mon premier opéra : c’était Aïda de Verdi et il y avait des éléphants dans la mise en scène (élément déterminant qui m’a sans doute entraînée dans ce monde étrange). Depuis, je vais régulièrement à l’opéra mais, aussi, écouter des concerts de musique classique (mais aussi rock, pop, jazz…). La musique – et la scène de façon générale – fait partie intégrante de ma vie.
Quand j’étais petite (dans le sens ‘jeune’ parce que, niveau taille, je mesure 1m54 donc je serai toujours et à jamais ‘petite’), j’ai appris le piano, le chant et j’étais passionnée de théâtre. J’ai d’ailleurs commencé ma carrière de comédienne à 16 ans en jouant dans une pièce de Jean Anouilh puis une de Molière, une adaptation du Nom de la Rose, Les Misérables… et aussi fait du cinéma !
Parallèlement à cette carrière artistique, j’entame des études universitaires : d’abord un bachelier (licence) en histoire de l’art et archéologie puis un master en musicologie. Ensuite, j’ai voulu aller me former en cinéma (acting, réalisation, mise en scène et écriture) et je suis allée étudier deux ans à Paris. Il ne me restait plus qu’à faire quelque chose avec tout ce bagage !
On dit souvent que ‘Choisir c’est renoncer’. Mais, heureusement, je pense que c’est un peu plus complexe que ça. Dans mon cas, je n’ai pas eu envie de choisir entre mes passions pour la musique, la scène, le cinéma… Et j’ai eu l’idée de tout fusionner dans un projet : Val so Classic.
Quelle est ta toute première expérience avec internet ?
Valentine : La ‘toute’ première… Je ne sais pas si c’était la première mais, comme toutes les personnes nées dans les années 1990’, je pense que MSN a marqué mes débuts dans l’Internet mondial !
Je pense que j’ai eu un ‘skyblog’ aussi (rires). Je serais curieuse de le revoir aujourd’hui ! Et je me souviens aussi quand je me suis inscrite sur Facebook en 2008… Très vite, je me suis rendue compte que je n’aimais pas Internet : ce côté où tout le monde expose sa vie, la facilité de trouver tout et n’importe quoi, un nouveau business qui fait le bonheur des uns et le malheur des autres… Un dilemme s’est alors présenté à moi : ne pas suivre la norme et ignorer Internet (et me marginaliser) ou profiter d’Internet comme d’un outil de communication et en faire mon boulot ! J’ai choisi la seconde option.
Présente-nous ton univers :
Valentine : Mon univers …. Il est vaste et en constante expansion ! Donc, impossible de tout explorer mais commençons par le nom de ma chaine, qui est aussi devenue mon pseudo : Val so Classic. Je voulais clairement distinguer Valentine Jongen (comédienne, musicienne, réalisatrice) et la créatrice de contenu sur Internet : Val so Classic. Ce nom je l’ai imaginé en me disant qu’il fallait que ce soit à la fois une partie de moi-même (donc mon surnom ‘Val’) et une partie de mon sujet (la musique classique donc ‘classic’). Comme je trouvais ça plus cool de relier les deux avec une petite particule, j’ai choisi le ‘so’ qui est ‘so années 2000’’.
Ce qui est marrant, c’est que beaucoup de gens ne connaissent pas mon vrai nom. Je reçois donc régulièrement des messages très professionnels du genre ‘Bonjour Val, j’aime beaucoup ce que vous faites’. Et ce décalage entre mon surnom et le vouvoiement me fait toujours rire ! Ce qui est aussi pas mal, c’est les gens qui m’appellent ‘Val so’ ! Ça me fait un peu penser au rappeur Damso mais en version classique, j’aime assez bien l’idée.
Qu’est ce qui t’a donné ta vocation ?
Valentine : J’adore ce mot ‘vocation’ ! Pour moi, ça sonne toujours un peu religieux : la vocation c’est l’appel pour s’engager dans les ordres, pour intégrer une communauté ou un groupe, suivre des règles… Or, j’ai l’impression d’être un peu la seule à faire ce que je fais et je peux écrire mes propres règles. Ce qui m’a poussé à me lancer c’est surtout un manque : je trouvais qu’il n’y avait pas de chaine cool et moderne sur la musique classique. Alors, plutôt que de parler de ‘vocation’ j’utiliserais même le mot ‘révélation’.
J’ai toujours eu l’impression d’être la plus jeune à aller à l’opéra ou au concert, mes camarades de classe se moquaient de moi mais plus par ignorance que par méchanceté et, un jour, je me suis rendue compte qu’il existait plein de supers jeunes musiciens qui pourraient devenir mes alliés pour dépoussiérer tout ça !
Quelle a été la réaction de tes proches ?
Valentine : C’est mon père qui m’a initiée à l’opéra donc, lui ça ne l’a pas surpris ! Je pense juste qu’il s’est pas mal demandé comment j’allais vivre de ça… Quant à ma mère, je pense que c’est ma plus grande fan (comme toutes les mamans) : elle connaît mieux que moi mon nombre d’abonnés et de vues. Mes parents me soutiennent vraiment, ils corrigent mes scripts, voient et corrigent mes vidéos avant publication. J’ai vraiment de la chance.
J’ai trois frères aussi dont un qui commente quasi systématiquement (histoire d’améliorer mes statistiques merci frangin) et les deux autres sont pas mal connectés donc ils me suggèrent d’autres chaines à regarder ou pour des collaborations.
Parfois, je rencontre des YouTubeurs qu’ils adorent et, là, je sens leur admiration… c’est cool, parce que moi aussi je les admire dans ce qu’ils font. C’est super important d’avoir le soutien de ses proches je trouve, surtout dans ce genre de milieu.
Quand j’ai des commentaires négatifs, insultants voire rageux, j’envoie toujours une capture d’écran à mes frangins et on en discute ! Au final, je supprime ou je ne réponds pas et mes frères m’aident à encaisser, et ça fait du bien.
Quelle sont tes sources d’inspiration ?
Valentine :Mon modèle niveau chaine de vulgarisation musicale c’est, évidemment, Monsieur PV Nova ! C’est un très bon musicien mais il a aussi un regard pertinent et une excellente capacité d’analyse dont je m’inspire beaucoup.
Niveau vulgarisation, j’admire aussi beaucoup Léo Grasset de la chaine Dirty Biology. Il arrive à proposer des vidéos d’une grande qualité avec une très bonne recherche scientifique, des raisonnements vraiment intéressants et touche un public super large ! Franchement respect.
Après, en tant qu’auteure et réalisatrice, je m’inspire beaucoup de chose : depuis toute petite, je suis bercée par le duo Thierry Loreau et Pierre Barré qui ont récemment fait la série ‘Jeunes solistes, grands destins‘, je suis une fan de l’émission suisse ‘Passe-moi les jumelles, j’adore l’univers de Coco de la chaine ‘Nébuleuse et cacao‘, je suis aussi des artistes très connectés comme la soprano Julie Fuchs ou le contreténor Jakub Józef Orliński.
Quelle est ta première expérience de tournage ? Comment cela s’est passé ?
Valentine : Ma toute première expérience, c’était un petit rôle dans un long-métrage de Lucile Hadzihalilovic avec Marion Cotillard. Elle n’était pas encore internationalement connue mais je l’admirais avec de grands yeux du haut de mes 10 ans ! C’était la première fois que je découvrais l’univers merveilleux du cinéma : l’envers du décor… C’était fascinant et je me suis promise de recommencer.
Une dizaine d’années plus tard, j’ai vécu ma plus ‘grosse’ expérience de tournage puisque j’étais au casting d’une série belge ‘Esprits de famille‘. Le tournage a duré plus de 3 mois et ça a vraiment été l’occasion pour moi d’observer, de comprendre et d’apprendre. À ce moment-là, j’étais loin de me douter que, quelques années plus tard, je me retrouverais à diriger mes propres projets !
Quel a été ton meilleur moment de réalisation ? Le pire ?
Valentine : ‘Le meilleur reste à venir‘ comme on dit ! Il y a encore quelques mois, jamais je n’aurais imaginé porter la casquette de ‘réalisatrice’ mais, finalement, je me retrouve aujourd’hui à diriger et réaliser deux gros projets : un documentaire sur Beethoven et ma série ‘Interlude‘.
Quand j’étais petite, je mettais en scène mes petits frères dans des pièces de théâtre que j’écrivais et dans lesquelles je jouais (vive le cumul des fonctions) ! Durant mes études de musicologie, j’ai fait des stages en mise en scène d’opéra avec de Stefano Mazzonis di Pralafera, Jean-Louis Grinda et Claus Guth. Mais, je ne m’imaginais pas mettre en scène avant longtemps !
Après, j’ai réalisé qu’envisager de mettre en scène un opéra (une œuvre imposante, composée et écrite par des génies et interprétée par des artistes beaucoup plus expérimentés que moi), c’était différent de réaliser mes propres vidéos. Parce que mes projets, je les écris, je les imagine et je sais très exactement comment les défendre, pourquoi et ce que je veux partager avec les gens.
Récemment, tu as proposé une analyse de Star Wars intitulée ‘Star Wars : Quand l’Opéra scelle le destin de la galaxie’. La vidéo revient sur une scène majeure de la saga, trop souvent sous-estimée. Une analyse pertinente qui m’a permis de me faire une autre idée sur le film de Lucas. As-tu eu des retours similaires de la part des fans de Star Wars ?
Valentine : Oui, j’ai eu plein de retours assez positifs de gens qui me disaient ne jamais avoir vraiment considéré cette scène. Sans divulgâcher l’entièreté de la saga, cette scène entre Palpatine et Anakin dans l’épisode III prend d’autant plus de sens quand on la met en miroir avec l’épisode IX (L’Ascension de Skywalker) puisqu’on comprend que cette scène à l’opéra est vraiment un pivot majeur de la prélogie.
Après Pretty Woman et Star Wars, penses-tu étendre ce type d’analyse à d’autres films ? Je pense par exemple à une séquence culte du Cinquième Elément.
Valentine : Évidemment ! ‘Interlude’ a été pensé comme une série. L’épisode sur Pretty Woman était un pilote que j’ai présenté au FRAMES Web Video Festival avec lequel j’ai remporté le prix de la vulgarisation.
Suite à ça, le label Pandora Création (qui produit aussi Le Fossoyeur de Films, Axolot…) m’a proposé de faire un deuxième épisode (celui sur Star Wars) pour voir si on pouvait éventuellement travailler ensemble sur ce projet. Et, comme ça s’est bien passé, on a décidé de lancer la production d’une saison complète.
En tout, il y aura 12 épisodes dans cette première saison d’Interlude (on va donc en tourner 10 dans les mois à venir). Je ne veux pas en dire trop mais, il y aura évidemment un épisode sur la scène à l’opéra dans ‘Le cinquième élément‘ !
Quelles sont, dans tes vidéos, celles qui te semblent les plus intéressantes, qui te tiennent le plus à cœur, et pourquoi ?
Valentine : Question difficile… Je pense que, si j’ai autant de vidéos et de formats différents sur ma chaine, c’est justement parce qu’ils expriment tous une part de ma curiosité et une facette de la musique que j’ai envie de faire découvrir au public. C’est surement dans les vlogs que je partage le plus mon quotidien et avec toutes les vidéos de rencontres (invités opéras, instruments de musique…) que c’est le plus intéressant car il n’y a pas que ma vision mais, aussi, celle d’un autre créatif !
Je dirais que chaque vidéo est intéressante et me tient à cœur au moment où je la travaille : de l’écriture au montage en passant par le tournage, je suis à fond dans chaque capsule. Si ce n’était pas le cas, la vidéo ne sortirait simplement pas… et ça m’est déjà arrivé : parfois, je trouve l’angle abordé pas assez intéressant ou je manque de cœur à l’ouvrage. Dans ce cas-là (c’est rare mais ça arrive), je ne publie pas la vidéo et je la garde pour moi en me demandant comment l’améliorer pour plus tard.
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux jeunes créatifs qui souhaitent partager leurs univers sur la toile ?
Valentine : Je pense que mon conseil serait ‘Soyez passionné’ ! C’est un peu cliché mais, je suis certaine que si ce dont on parle nous passionne vraiment, on ne perdra jamais l’envie de partager. Il faut créer pour soi-même avant de le faire pour la reconnaissance des autres. Si on aborde un sujet qui nous passionne vraiment et qu’on le fait honnêtement et avec notre cœur, on ne pourra jamais se tromper. C’est valable dans tous les arts selon moi ! Faire une vidéo c’est comme jouer de la musique : d’autres pourraient le faire aussi, mais si on y met notre propre personnalité, notre interprétation et notre fougue, le résultat sera unique. Même si on traite d’un sujet qui a déjà été abordé cent fois, ce qui compte, c’est d’apporter un nouveau regard sur ce dont on parle.
Si tu pouvais adresser un message à toi-même à l’âge de 10ans, lequel serait-ce ?
Valentine : Je me dirais ‘Toutes les galères, les rejets, les blessures mais aussi les découvertes et les partages que tu vis aujourd’hui sont en train de construire qui tu seras demain. Alors, vis-les à fond parce que ça te nourrit et ça t’apprend à vivre !‘
Que ferais-tu avec un budget digne d’un blockbuster ?
Valentine : Je tournerais une grosse série de vidéos de cours de musique (solfège, histoire, analyse). Histoire que chacun puisse avoir les bases de la musique classique depuis chez lui, quelque soit son âge ou son milieu social. J’engagerai d’autres musicologues pour m’aider à bien faire mes recherches, de jeunes musiciens pour illustrer les propos ainsi qu’un graphiste en animation pour faire des visuels super interactifs ! Je fais déjà un peu ça sur ma chaine aujourd’hui mais avec trop peu de temps et trop peu d’argent.
Nous faisons appel à ton esprit créatif. A toi de nous proposer quelque chose et de commenter.
Valentine : J’ai toujours été fascinée par le feu : écouter le bois crépiter, regarder les braises rougeoyantes dans la cheminée ou bien fixer la flamme d’une bougie… Autrefois, la musique se lisait à la lueur des chandelles alors je trouve cette lumière magique. J’ai pris cette photo en décembre 2019, à Noël. C’était comme une mise en abîme…
Tu le sais, notre thématique est la Pop Culture. Que signifie pour toi la culture populaire ?
Valentine : La culture populaire c’est, selon moi, la culture ‘du peuple’ mais sans connotation péjorative. C’est la culture accessible à tous et qu’un peuple partage. Ce qui est intéressant, c’est que, selon la culture justement (selon la région, le pays ou même le continent mais aussi l’époque), la ‘culture’ peut englober des choses très différentes.
Quelles sont tes œuvres de référence dans la Pop Culture ?
Valentine : Il y en a beaucoup… Au cinéma, je citerais par exemple des grandes sagas ou films cultes : Harry Potter, Star Wars, Les Visiteurs, La Cité de la Peur, OSS 117, Dikkenek (Belgique oblige (rires))… Comme jeux vidéos, je ne suis pas une grande gameuse mais, évidemment, j’ai joué à Rayman, aux Sims ou à Mario Kart… En BD je suis une fan inconditionnelle de Tintin et, enfin, en musique je peux clairement affirmer que j’écoute de tout : classique, rock, pop, rap, RnB, électro… Autant la pop culture que la ‘musique de niche’.
Et quelles sont tes attentes ?
Valentine : Et bien… Je ne suis pas sûre d’avoir vraiment des attentes. J’aime bien être surprise ! D’autant que, avec la crise culturelle qu’on vit actuellement suite au Covid19, la seule chose que j’attends c’est que la culture puisse reprendre ses droits.
Un mot sur ton actualité ? Tes projets en cours ?
Valentine : A nouveau, le Coronavirus bouleverse un peu tout mais, à priori, je vais tourner un documentaire sur Beethoven cet été (qui devrait sortir à l’automne) et je prépare aussi la saison 1 d’Interlude.
A quel autre créatif souhaiterais-tu voir poser ces questions ?
Valentine : Il y a quelques mois, j’ai rencontré Marie de la chaine Mary Cherry ! Je suis devenue complètement fan de son travail. Elle imagine des gâteaux de folie mais son univers est bien plus large ! En novembre, elle a organisé une Tea Party sur le thème d’Alice au pays des merveilles ! Tout était dans le thème : les pâtisseries (évidemment), la déco, les costumes… C’est une vraie créative autant dans sa cuisine qu’en vidéo et sur les réseaux sociaux !
As-tu beaucoup de retour des personnes qui te suivent ?
Valentine : Franchement oui ! Je suis moi-même surprise de recevoir autant de retours positifs. C’est souvent des fans de musique classique qui sont heureux de ne plus être seuls ou bien des institutions, des événements ou des musiciens qui encouragent mon projet. C’est très motivant !
Tes abonné(e)s te soufflent des idées parfois ?
Valentine : Oui, les gens m’écrivent régulièrement avec des idées mais, la plupart du temps, ce sont des idées que j’ai déjà prévues mais que je ne peux pas réaliser tout de suite, faute de temps et/ou de moyens !
Que voudrais-tu dire à tous tes abonné(e)s et aux prochains ?
Valentine : Je dirais à toutes les personnes qui me suivent déjà où qui me découvrent ‘Merci d’être curieux’ !
Pour terminer, quelle question aurais-tu souhaité que l’on te pose et qu’aurais-tu répondu ?
Valentine : Ça m’a manqué de parler de bouffe (rires) J’adore allier les plaisirs et je trouve que musique et cuisine se marient très bien ! J’ai déjà fait une vidéo sur le sujet et j’adorerais en faire d’autres. Donc, j’attendais la question ‘Quel est ton plat préféré et/ou qu’est-ce que tu aimes le plus cuisiner ?’ et j’aurais répondu que j’adore manger des lasagnes (et les pâtes de façon générale) et que je fais très bien le risotto.
Encore une fois merci Valentine d’avoir participé à Adopte un Créatif.
Valentine : Merci à toi pour tes questions et merci à toutes les personnes qui ont suivi le fil de cette conversation !
Propos recueillis par Thomas O. pour Eklecty-City.fr, qui remercie Valentine de s’être prêtée au jeu d’une interview. Crédits photos Élisabeth Van Hecke.
Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Ace Modey.
Avec sa chaîne ‘Lo Film’, Ace Modey nous parle de Teen Movies, mais aussi de Stoner Movies. Récemment, Ace a eu une belle exclusivité avec la participation de Redman sur l’une de ses vidéos. Rencontre avec un jeune des 90’s biberonné à la megadrive et au magnétoscope.
Bonjour Ace Modey, merci de participer à notre chronique ‘Adopte un Créatif’. Dans le cas où il y aurait des internautes ignorant ton actualité peux-tu te présenter et nous rappeler ton parcours ?
Ace Modey : Mon pseudo c’est Ace Modey, de la chaîne LO FILM, je suis un kid des 90’s, biberonné à la megadrive et au magnétoscope, de toujours il semble que je sois attiré par les films et donc le cinéma pour je ne sais quelle raison.
Tout ce que je sais c’est qu’à l’âge de 3 ans j’étais si attiré par cette machine dans laquelle on pouvait mettre des VHS pour voir des dessins animés que je me suis coincé les doigts dedans, provoquant du coup une grosse frayeur à mes parents qui ont pu sauver ma petite mimine du dévoreur de bande magnétique du salon.
Jump dans le futur, j’ai 16 ans je quitte le collège, j’hésite entre un BAC PRO Audiovisuel ou un BEP Métiers de la Communication & Industrie Graphique Spécialisée en PAO, en gros apprendre à créer de la publicité pour des entreprises via Photoshop, Illustrator ou encore Indesign. Je choisis la deuxième option car c’est la seule qui me permet de me mettre en alternance et donc gagner de l’argent, bêtement. Mais étant déjà sur de multiples forums et étant habitué à faire des bannières et autres avatars via Photoshop, l’envie d’en apprendre plus et me faire payer pour ce que je faisais déjà gratuitement depuis mes 13 ans était une motivation trop forte pour écouter mon instinct.
Entre-temps j’ai créé une chaîne Dailymotion où j’y poste mes premières vidéos, il y a donc 12 ans de ça, j’y poste surtout des montages sur de la musique Rap entre autre du Parkour, du Stunt etc. inspirés des vidéos des Ruff Ryders.
J’y fais mes premiers essais de motion design aussi pour des rappeurs indépendants, et je réalise mes premiers clips pour mon meilleur ami d’enfance qui rap encore de nos jours, Lartson.
2 ans d’apprentissage plus tard mon BEP n’existe plus, mon patron ne me garde pas pour un BAC PRO, et je me retrouve à 18 ans à devoir trouver un job, du coup j’enchaîne les boulots alimentaires.
J’ai ramassé des fraises, des kiwis, des pêches, des salades, des concombres, des pommes, bref à des années-lumières de mon rêve ultime, travailler dans l’image. Bref on skip toute cette période douloureuse pour arriver enfin en 2012, je crée ma première chaîne Youtube, j’y poste un peu de tout et n’importe quoi, surtout du gaming, puis en 2016 je crée enfin ma chaîne actuelle mais sous son premier nom, ‘TaspasVu ?‘ avec comme envie de faire découvrir mes films préférés que je trouve méconnu à un public plus large.
Hors le nom est une horreur pour le référencement, les gens ne me trouvent pas, les vidéos ne sont pas assez bonnes, bref voilà 2019, je suis papa de deux enfants, je quitte un énième job alimentaire déprimant et qui me bousille la santé pour ENFIN me lancer cœur et âme dans l’aventure de la vidéo avec comme idée de vivre de mes créations et de mes connaissances pour mettre en images tout ce qu’on peut me demander, LO FILM est né et voilà j’en suis maintenant à la gratifiante expérience de se faire interviewer pour mon travail, c’est dingue.
Quelle est ta toute première expérience avec internet ?
Ace Modey : Des bruits de modem horribles, un chronomètre et des codes d’heures gratuites, voilà mes premiers souvenirs sur Internet. A l’époque mes sites préférés c’est JeuxVideo.com ou encore Allocine. Je peux enfin avoir avoir accès aux filmographies de mes acteurs et actrices préférés.
Avant ça je lis le Télé Star familial dont je découpe les résumés des films qui me donnent envie et que je rassemble dans des cahiers avec comme but de me renseigner pour trouver d’autres films du même genre qui pourraient m’intéresser.
Un peu plus tard, mon papa craque n’ayant pas assez de temps d’internet à disposer entre ma sœur, mon petit frère et lui-même – ma maman n’utilisait pas internet – il passe enfin à l’internet illimité et les 512kbs. Mon papa me fait alors découvrir un site magique qui lui permet d’avoir accès au dernier Spider-Man encore au cinéma, ou bien un petit film pour enfant qui s’appelle Harry Potter et tout ça gratuitement.
Ce qui l’arrange beaucoup vu que je suis surement insupportable à demander sans cesse d’aller au cinéma voir tel ou tel film, et l’ayant forcé une fois de trop à aller voir un film de 3h nommé Le Seigneur Des Anneaux.
Je découvre le piratage, l’accès à de multiples œuvres que mes parents ne peuvent pas m’acheter faute de moyens et étant littéralement boulimique d’œuvre du 7ème art.
Avec l’arrivée de l’ADSL, Kazaa, Emule ou Bittorrent tout s’accélère, je découvre quelques centaines de longs métrages puis l’arrivée des DVDs vient un peu chambouler le tout, j’en ai marre de la qualité DIVX et on prend l’habitude avec mon père encore une fois d’aller chercher à Vidéofutur des films que l’on peut louer pour 2€ et copier sur des DVDs vierges. J’établis une collection de DVDs ‘pirates’ d’un de mes genres favoris à l’époque et toujours aujourd’hui, les Teen Movies.
Puis je découvre les forums, msn, j’ai enfin mon ordinateur personnel, ultime cadeau d’anniversaire que je réclame depuis 6 ans et tout le reste est raconté dans la question précédente.
Présente-nous ton univers :
Ace Modey : (Rires) alors pas de flippe hein mais Ace Modey vient du démon Asmodée ou Asmoday ou encore en latin Asmodeus, représentation du péché de luxure, ange déchu qui serait le fameux serpent qui aurait fait craquer Eve pour une pomme. Tout un délire donc, qui m’avait énormément plu étant assez fan d’ésotérisme et autres délires occultes car n’étant pas croyant. Si je croyais vraiment en ça jamais je n’aurais choisi ce pseudo c’est sûr.
Et Ace Ventura est l’un de mes films d’enfance, du coup j’ai décidé d’écrire ce nom différemment en y posant ma patte pour ne pas être associé seulement à un démon mais en m’appropriant ce nom que je trouve stylé et plein de sens.
Mon univers est celui des Teen Movies, des Stoner Movies, et tout ce qui peut s’apparenter à de la contre-culture. J’aime beaucoup aussi tout ce qui est documentaire, surtout politique, comme ceux de Michael Moore par exemple.
L’horreur est aussi un genre que j’aime énormément notamment tout ce qui est compilation de courts-métrages comme ABC of Death ou la trilogie V/H/S, et tout ce qui peut être culture street c’est mon totalement mon délire.
Qu’est ce qui t’a donné ta vocation ?
Ace Modey : Je pense sincèrement que cela vient de mes parents, ils m’ont très vite autorisé à regarder des œuvres pourtant déconseillées pour mon âge, parce que je les suppliais de le faire d’ailleurs.
Grâce à ça j’ai pu voir des films comme Les Dents de la Mer, Scream ou encore Blade a seulement 7-8 ans et j’ai même pu aller voir Le Pacte Des Loups au cinéma à l’âge de 10 ans alors que le film était déconseillé au moins de 12 en salle.
Tout ça parce que j’étais fan de The Crow, la série avec Marc Dacascos et qu’il joue dans le film de Christopher Gans.
Ils m’ont rendu cinéphile, donné un accès à une culture illimité grâce à internet et leur porte-monnaie, ils ont acheté une caméra DV avec laquelle j’ai pu m’amuser, puis j’ai eu mon appareil photo caméra personnel pour toujours plus expérimenté avec ma passion, et ils ont fait de moi le passionné que je suis, si passionné que maintenant je ne peux pas m’empêcher de partager ça avec des inconnus via ma chaîne Youtube.
Quelle a été la réaction de tes proches ?
Ace Modey : Ils m’ont poussé à faire ce dont j’étais passionné, donc ils n’étaient ni surpris, ni choqué que je me lance dans toute cette aventure, c’est quelque chose que je traîne depuis si longtemps que c’était logique pour eux que j’essaye en tout cas.
Ma femme m’a offert mon premier Canon Eos 550D avec lequel j’ai pu tourner mes premières vidéos sur le cinéma et m’a poussé à concrétiser mon envie de partager ça avec le plus grand nombre donc elle était ravie que son cadeau puisse servir à m’épanouir et généralement mes proches comme mon petit frère avec qui j’ai tourné le pilote de mon émission ou mes plus proches cousins (Bambu & RBT) m’ont toujours soutenu et son à l’origine de longues discussions sur divers films. Ils m’ont aidé à construire mon argumentaire et m’ont fait réaliser que tout ce que je leur raconte sur les films qu’on regardait ensemble pouvait être utilisé de manière divertissante pour d’autres personnes.
Quelle sont tes sources d’inspiration ?
Ace Modey : Il y en a beaucoup, dans les inspirations majeures il y a Kevin Smith, qui est mon réalisateur préféré et qui m’a montré la voie à suivre grâce à ses films et ses livres.
Puis il y a Yannick Dahan, dont je dévorais chaque Opération Frissons, scotché à son éloquence et son phrasé si particulier et passionné.
Puis il y a eu Rurik Sallé, dont les Panoramad sur le site Mad Movies m’ont fait découvrir des œuvres hors normes et dont j’étais friand, lassé des productions grand public.
Après ces trois personnes vient une personne particulière, avec qui j’ai pu échanger au tout début de mes réflexions pour créer une chaîne à mon image et qui m’a poussé lui aussi à le faire, j’ai nommé le talentueux et trop sous côte Punky, qui par le biais de conversations Skype et Twitter m’a aidé à trouver les outils nécessaires à tout bon vidéaste qui se respecte et qui m’a aidé à m’améliorer sûr de nombreuses vidéos. C’est définitivement l’une de ces personnes qui m’a inspiré mais aussi et surtout convaincu que moi aussi je pouvais le faire.
Après ça viens évidemment Karim, Gilles et Jeremy, parce que honnêtement comment ne pas être inspiré par leur travail remarquable… Pas grand monde je pense.
Quelle est ta première expérience de tournage ? Comment cela s’est passé ?
Ace Modey : La toute première expérience de tournage pour ma chaîne c’était un délire, il y avait mon petit frère, Bambu et ma femme. On a tourné une espèce de sommaire que j’avais préparé ainsi que des bouts de textes, on n’est pas allé jusqu’au bout car on n’arrivait pas à avoir le résultat que je voulais, j’ai réitéré l’expérience, seul cette fois-ci, et quelques jours plus tard j’ai monté la vidéo. J’en étais pas fier, trop stressé et trop coincé à mes yeux, j’ai donc tourné une troisième fois la vidéo et voilà que mon premier TPV, sur The Interview, sort sur ma chaîne Youtube.
C’était éprouvant, démotivant même mais au final d’avoir enfin terminé une vidéo entière sur un sujet qui me tenait à cœur m’a permis d’en écrire une deuxième, puis troisième et ainsi de suite jusqu’à maintenant.
Quel a été ton meilleur moment de réalisation ? Le pire ?
Ace Modey : Le meilleur moment de réalisation, je pense pour l’instant que c’était ma vidéo sur Speed, tourné chez mon acolyte Lartson et avec RBT, c’était fun on a bien rigolé, j’ai pu décomplexer et gagner en confiance, j’étais bien entouré donc c’était facile à faire.
Le pire, c’est sûrement pour ma vidéo sur Kidulthood, j’étais stressé, Papa depuis peu, j’ai recommencé le tournage 3 fois jusqu’à atteindre le résultat qu’on peut voir sur ma chaîne, je n’étais jamais content du ton employé, ou de mon éloquence. Si je devais remake une vidéo de ma chaîne ça serait celle-là juste pour pouvoir me venger de moi-même et ma timidité.
Je note également que ta chaîne a gagné en visibilité avec ta vidéo consacrée à Scream 3 (que je vous conseille de regarder). Comment expliques-tu cela ? As-tu changé ton approche dans l’analyse de film ou dans le montage ?
Ace Modey : Merci, en fait pas plus que sur une autre vidéo, je pense avoir juste choisi un sujet assez catchy, en vrai à chaque sortie de vidéo je passe par une phase de réflexion et d’auto-critique assez sévère, ce qui me permet de sortir des vidéos toujours plus travaillées.
J’ai eu de la chance pour ma vidéo sur Scream 3, dont je voulais parler depuis très longtemps car comme je le dis je l’ai vu très jeune, et c’est ce film qui m’a fait découvrir Jay & Silent Bob et donc Kevin Smith, ce qui me mettra sur la voie de la réalisation. Puis j’ai eu la chance d’être partagé par Punky, Zoltan, et d’autres comptes plus suivis que le mien ce qui m’a donné pas mal de visibilité.
Quelles sont, dans tes vidéos, celles qui te semblent les plus intéressantes, qui te tiennent le plus à cœur, et pourquoi ?
Ace Modey : En vrai chacune de mes vidéos à une histoire derrière qui m’est propre, je pourrais parler de celle sur Chevalier, qui est la première vidéo que j’ai faite en étant Papa, et vu le sujet du film et son raisonnement chez moi c’était vraiment pour laisser quelque chose à mon fils pour plus tard.
La vidéo sur Harold & Kumar était une vidéo qui me tenait vraiment à coeur tant j’aime cette trilogie et je voulais à tout prix montrer à tout le monde que les Stoner Movies pouvait être drôle ET intelligent à la fois.
Je pourrais encore évoquer celle sur Best Of The Best qui est un clin d’oeil pour mon Père, car c’est ces VHS que je piquer en boucle et BOTB en faisais partie. Mais si je devais en retenir qu’une seule ça serait celle sur How High, parce qu’il y a Redman dedans qui dit mon blaze et ça c’est un rêve que j’ai traîné avec moi sur une très longue période de ma vie, Redman étant l’une de mes influences majeures dans mon humour et mon amour du rap.
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux jeunes créatifs qui souhaitent partager leurs univers sur la toile ?
Ace Modey : Regarde d’autres vidéos, cherche ce que t’aimes chez les autres vidéastes et ce que tu n’aimes pas chez les autres, une fois que tu as trouvé regarde les vidéos qui te marquent le plus, en bien ou en mal, 2, 3, 10 fois, étudie le montage, écoute comment sont mixés les différents éléments de la vidéo, vois les erreurs qu’ils ont faites, note tout ce que t’aime, note tout ce que tu n’aimes pas, puis une fois cette phase de recherche effectuée, écris, prend un sujet que t’aime, écris dessus, avec tes mots, ton regard unique à toi-même et lance toi.
N’ai pas peur de l’échec, on est tous passés par des 10 vues au début, c’est après que ça prend, quand tu es assez bon pour être recommandé par d’autres c’est là que tu commences à gagner. J’ai mis 5 ans à dépasser les 400 vues par vidéo. 5 années de doute, de colère, de frustration, utilise tout ça comme des armes pour sortir des vidéos toujours plus travaillées et ne crie pas victoire si ta vidéo dépasse 1500 vues en 3 jours parce que la prochaine peut faire 200 en 1 mois. Ce n’est rien, faut dépasser les échecs et les transformer en apprentissage, et pour citer le poète et rappeur Demi-portion ‘qui ne se plante pas, n’a aucune chance de pousser’.
Si tu pouvais adresser un message à toi-même à l’âge de 10ans, lequel serait-ce ?
Ace Modey : Achète des bitcoins bordel ! (Rires)
Blague à part, honnêtement je lui dirais peut-être d’attendre ses 18 ans pour fumer ses premiers joints et d’y mettre aucune trace de tabac. Je lui dirais de profiter de ses proches car tu ne sais pas quand ils vont partir, mais aussi de ne pas aller en apprentissage, suis ton instinct, va faire un bac pro audiovisuel.
Que ferais-tu avec un budget digne d’un blockbuster ?
Ace Modey : Un survival-horror qui se terminerait dans un château en France où on découvrirait que le grand méchant du film qui a organisé une chasse d’être humain sur ses Terres avec ses amis bourgeois est en réalité le patron d’une société secrète qui à chasser des créatures cryptozoologiques, et qu’ils gardent leur tête en trophée, mais qu’un seule de ses monstres n’a pas pu être tué et qu’il est captif dans un bâtiment situé en dessous du château.
Le climax serait le suivant, le héros de notre film qui court depuis près d’une heure et quart du film et dont l’histoire est liée à l’immigration libère le monstre qui détruit une partie du château et tue tous les bads guy pour enfin s’enfuir en s’envolant. Hypé ? Le scénario est écrit, j’ai même des plans storyboardés, amis producteurs, je me tiens à votre disposition.
Nous faisons appel à ton esprit créatif. A toi de nous proposer quelque chose et de commenter.
Ace Modey : Je me suis senti inspiré par le nom de ton site, et vu que ma formation de GFX est encrés en moi, voilà le résultat, j’espère que ça sera à ton goût.
Tu le sais, notre thématique est la Pop Culture. Que signifie pour toi la culture populaire ?
Ace Modey : C’est large, pour moi la culture pop c’est tout ce qui peut être évoqué avec des inconnus sans qu’ils se sentent étrangers du sujet dont tu parles. Évidemment c’est surtout tout ce qui est blockbuster, mais aussi les œuvres cultes du 7ème art. Après la culture de niche c’est super aussi et ça reste ce que je préfère car c’est une terre inconnue très souvent et j’aime rattacher certaines œuvres obscures à des œuvres populaires car il y a plein d’œuvres qui se retrouvent cachées par des années de suprématie de films ultras populaires dont on connaît tous les secrets et moindres détails. Il est temps de chercher plus que ça.
Quelles sont tes œuvres de référence dans la Pop Culture ?
Ace Modey : Dans le désordre le plus total ça peut aller de la série Lost à X-Files, en passant par Fringe, Buffy Contre Les Vampires, Weeds, Sons of Anarchy et évidemment Breaking Bad et Better Call Saul.
Il y a aussi évidemment les grandes licences comme Star Wars, Le Seigneur des Anneaux, Freddy, Jason, Chucky, Les Gremlins ou pour changer totalement d’univers il y a n’importe quel album de Tupac, Meth & Red, DMX, Mac Miller, Salif, Nessbeal, Despo, NX, Necro, Run The Jewels, 21 Savage, Cunninlynguists, Jedi Mind Tricks, Ill Bill, R.A The Rugged Man… bref un univers Rap, parfois hardcore et borderline qui m’attire depuis les débuts de mon adolescence et qui me suit depuis de nombreuses années.
Mais je ne m’arrête pas au Rap car j’aime aussi énormément le rock avec des artistes comme The Offspring, Chuck Berry, Nirvana, Kiss, AC/DC, les Red Hot Chili Peppers, Black Puma, Sum 41, Limp Bizkit, Korn, Tom Waits ou évidemment Rage Against The Machine.
Après j’aime bien aussi la soul et la musique plus douce comme Nina Simone, Mazzy Star, David Gray, The Verve, Cuco, Rex Orange County, Moby.
En résumé, mon univers musical s’étend sur une variété d’artistes plus ou moins connus mais je ne m’enferme pas dans un seul style.
J’aime la provocation, la vulgarité, donc évidemment South Park est pour moi l’une des meilleurs série animée existante à ce jour. Et sinon j’aime beaucoup la culture hacktiviste, j’ai une peine immense quand je pense au destin tragique d’Aaron Swartz et je supporte Edward Snowden.
Sinon pour finir en ce moment je me plonge dans le 3ème Art, avec des artistes comme Gustave Doré ou Zdzisław Beksiński dont les oeuvres m’impressionnent et m’inspirent énormément.
Voilà donc mon univers, rajoute à tout ça une tonne de vidéastes sur Youtube dont le nombre est bien trop élevé pour être cité ici mais je pense que tu as compris, je suis curieux de toutes les cultures et de tous les arts.
Et quelles sont tes attentes ?
Ace Modey : J’attends de pied ferme le Snyder Cut de Justice League. Ça fait 3 ans que j’attends ça, je l’ai vu au ciné et même si j’avais plutôt aimé certaines scènes c’était pas au niveau du Batman V Superman, ce qui m’avait déçu puis bon le premier trailer était à l’opposé du film que j’ai vu au cinéma donc vivement que ça sorte que je puisse effacer ce mauvais souvenir et revoir mes super-héros préférés dans toutes leurs splendeurs.
Sinon j’attends le Army Of The Dead de Snyder, n’importe quel projet de Guillermo Del Toro, David Fincher ou Jordan Peele. Et bien sûr j’attends la suite de Mallrats de Kevin Smith, son MooseJaws, bref n’importe quel truc que ce mec peut pondre je suis là à l’attendre comme le messie.
Niveau série j’attends la dernière saison de Better Call Saul pour enfin pouvoir dire qu’elle est meilleure que Breaking Bad, je le pense pas encore mais ce n’est pas loin honnêtement.
Un mot sur ton actualité ? Tes projets en cours ?
Ace Modey : Dernièrement est sortie ma vidéo sur That’s 70 Show que je trainais depuis 2016 et qui a changé de forme plusieurs fois, ça a été difficile de concrétiser cette vidéo mais elle est sortie et ça fait du bien parce que j’en suis plutôt fier.
Prochainement on a des clips à tourner pour Lartson, et le 3 juillet je sortirai une vidéo sur un film que je considère meilleur que Fast & Furious et qui pour moi aurait mérité pléthores de suite. Un croisement entre Oceans Eleven et Braquage a L’Italienne, qui a eu son succès à son époque mais que je trouve trop souvent oublié.
Puis il y aura une pause cet été avec peut-être un portrait de cinéphile pour quand même avoir du contenu à poster et on reprendra à la rentrée avec des sujets qui je l’espère attireront le public, mais toujours avec mon point de vue particulier, voire déviant (rires).
A quel autre créatif souhaiterais-tu voir poser ces questions ?
Ace Modey : J’aimerais bien voir Punky, Zoltan ou Azz l’épouvantail répondre à tes questions, il y a moyen d’avoir de très bonnes réponses puis j’aimerais beaucoup les lires.
Sinon il y a Cinéma & Politique que j’aimerais beaucoup voir dans ta section découverte de créatif.
As-tu beaucoup de retour des personnes qui te suivent ?
Ace Modey : De plus en plus, ce qui me fait énormément plaisir, surtout quand ce sont des retours constructifs qui me permettent de m’améliorer. Le plus dur quand on commence c’est justement de n’avoir aucun avis extérieur, généralement la famille trouve ça toujours cool à regarder parce qu’ils veulent te faire plaisir et leurs critiques sont souvent en dessous de la réalité, alors qu’avec des inconnus c’est plus souvent sans filtre du coup ça remet plus facilement en question. Le retour le plus plaisant est celui de raviver des souvenirs oubliés, et de faire découvrir des oeuvres, ça c’est hyper gratifiant.
Tes abonné(e)s te soufflent des idées parfois ?
Ace Modey : C’est plus souvent mes proches, et surtout Punky qui me souffle des idées de génie pour mes vidéos, sinon mon public n’est pas assez gros et présent pour me souffler quoi que ce soit, mais le peu que j’ai c’est déjà super, j’ai plein d’encouragements et des ‘Tu vas percer’ c’est génial et ça booste ma confiance en moi. Le mieux reste de voir les gens partager mon travail à leurs proches pour leur dire que c’est bien et qu’ils doivent regarder ma chaîne, ça me touche vraiment ce genre de geste, car sans partage je ne serais pas visible.
Que voudrais-tu dire à tous tes abonné(e)s et aux prochains ?
Ace Modey : Mettez la cloche (rires), ne vous arrêtez pas à la miniature ou au titre je suis obligé d’être provocateur pour attirer le maximum de personnes, mais je me rend compte que certains jugent la vidéo à ça alors que j’argumente très souvent et que mon avis sur les questions posées dans les titres de mes vidéos est très souvent plus nuancé que ce que ça peut laisser paraître.
Pour terminer, quelle question aurais-tu souhaité que l’on te pose et qu’aurais-tu répondu ?
Ace Modey : Tu m’as pas demandé qu’elle était ma variété de Weed préférée, je suis assez déçu, du coup pour répondre je dirais la Blue Cheese avec son goût sucré et son odeur si particulière, j’aime énormément la Super-Skunk aussi. Dernièrement je me suis mis au CBD et la variété Chiquita Banana de chez Green Évolution est une tuerie.
Ah et pour finir, SNOOTCHIE BOOTCHIES !
Encore une fois merci Ace Modey d’avoir participé à Adopte un Créatif.
Ace Modey : Merci à toi de m’avoir invité, abonnez-vous (rires).
Stéphane Picq is a French composer and sound designer who mainly worked for ERE Informatique/Exxos and Cryo Interactive. Among his most famous video game compositions are Dune and the emblematic soundtrack of Lost Eden.
Before music became his main activity, Stéphane started coding video games in 1983. It was while porting the games to various systems, including the Amiga, that he started adding music and sounds to the games. After working for several years as a composer and sound designer, he left France in 1998 and moved to Madagascar, where he currently resides. He now works in the field of gemstones.
In this interview, I talk with Stéphane about his background, his working methods, his influences, but also the reasons for his departure from the video game industry. Encounter with a gemstone of music.
Follow the link below to read the original interview in French.
Hello Stéphane, first of all thank you for granting me this interview. I’m really happy that we were able to schedule this interview. Before we start, for those of you who don’t know your background, can you introduce yourself?
Stéphane : I’ve been passionate about computers since I was a teenager, I programmed very early, first in Basic, then in machine code, then in C. I’ve been a computer programmer since I was a teenager. I was far from being bad, but tired of programming, an amateur musician by the way, I made a translation to video game soundtracks. The context and the demand were favourable at the time. What was a hobby became a profession.
On your website, you described yourself as ‘a fan of all music that modifies states of consciousness: shamanic ritual music, techno-trance, sacred music, and some meditative ‘new-age’ pieces. A human being, roommate of this planet, like you’. Today, does this description still seem right to you?
Stéphane : I think my spirituality of the time has been diluted a bit in the context of the harsh and gentle life in Madagascar, but I don’t deny anything. On the other hand, I would no longer say ‘roommate of the planet’, but ‘one of the cells of the planet as a global living entity, Gaia’.
From 1985 to 1987 you were in charge of the games section of Science & Vie Micro. Was this your first job related to video games?
Stéphane : No, I started coding in 1982, and released a little arcade game on ZX Spectrum in 1983, and another one later on Armstrad CPC 464. I also sold in stores the first computers with musical capabilities, the MSX, around the same time, and I was already a regular contributor to Ere Informatique before that. At Science & Vie Micro I was very badly paid, but I received all the latest games for free!
Do you keep a good memory of this time ?
Stéphane : Of course. We were enthusiastic pioneers, everything had to be done, in the beginning it was really the System D! And then we had a lot of freedom as creative people who weren’t salaried but paid in advance on sales, we made a lot of money too, if the game was a success…
How did you start in one of the first French software publishing companies, Ère Informatique?
Stéphane : After learning to program on my own, I produced a few insignificant games that were never commercialized, except for one of them (Lombrix), which appealed to this small, fledgling company. I should point out that I was never salaried, but only an author paid on sales.
I read that it was after a rejection of computer language that you discovered your path, music composition. Is the anecdote accurate?
Stéphane : Absolutely. My last game on Armstrad CPC 464 (Birdie) being a technical feat for the time, but with poor playability, ERE Informatique offered me to translate a game on Atari ST (Bubble Ghost) to Armstrad CPC 464, which I did without any difficulties, but then it was really a challenge to convert it to Commodore Amiga. I had to learn the C language in a few months, digesting hundreds of pages to master this complex computer, and coding thousands of lines!
It was exhausting, but I made a music in one night, which didn’t exist in the original version. Being both a coder and a musician, programming music on SoundTracker step by step, in hexadecimal, was a real pleasure. The company liked my music and offered me to do all the soundtracks and sound effects for their future games on Amiga. It was easy for me and very well paid for the time spent, unlike coding. Most of my best pieces of music were done in one night, or even in two or three days.
And that’s where you specialize in sampling and sound digitization, often with the means at hand. For example, you use an empty honey pot for the percussions of Lost Eden.
Stéphane : When I was nine years old, my birthday present was a SONY portable tape recorder with a very good quality microphone (I told my parents that I wanted to become a journalist). At the time I was disappointed because I was waiting for something else, but finally I started to have fun recording everything that came to my mind, the sounds of Nature, the sounds of everyday objects used in other ways, and so on. So, when I had the opportunity to sample sounds much later to make my own library, it was natural for me to hijack any object to make a sound that could be manipulated as I wished. The honey pot I don’t remember, but I made a dissonant harp sound in Atlantis with a string fryer found in the trash, sampled and played four octaves down.
What was your working method, the creative process? Did you need images to compose or just descriptions and keywords?
Stéphane : No working method. Besides, I don’t like the word ‘work’, which evokes a constraint. I would spend a lot of time sampling or programming my own sounds, then I would say ‘here, I’m going to test this one’, and then I would launch Cubase, and the song would magically build itself, when I was inspired, and I would add more melodic lines over my first draft.
When it came to composing from a visual or a verbal description, I would integrate the feeling of the scenes to be illustrated musically, and then I would stop thinking about it. And then it matured on its own during my meditations, and at some point it was ready in my head (or elsewhere), without me knowing it. I’d get on the keyboard, and it would come out on its own. Of course it has some thinking too, but it’s only used to organize things that come out of somewhere else. I was lucky enough to be allowed to work in complete freedom, and despite some adjustments sometimes requested by the team of some games, I was never refused a song.
It seems to me that nature also played a key role in your creative process?
Stéphane : I think Nature is supposed to have a primordial place in the well-being of every normal human being who is aware of being part of it. Having said that, I came to live in Paris to work on Dune, but I went out as often as I could to go to the forest. Apart from that I always lived in the countryside and finally in the Luberon, in the middle of pines and vineyards.
Is it fair to say that nature was an extension of your recording studio?
Stéphane : I wouldn’t say that. Nature’s just the opposite! Back then, a home studio was dozens of metres of cable with always a false contact, a dusty PC, the eye glued to a screen 12 hours a day, synths that had to be reconfigured one by one when you started up, in short, endless headaches. Nature was the source, the oxygen of my being, while the studio was just a capricious tool that had to be mastered properly to express what I had in mind.
Precisely, if I evoked the ‘nature’ and ‘extension of your studio’ it was to make you relive these images:
Stéphane : We had a lot of fun shooting this. Of course no ambient sound is real. I was a bit naive and a bit pompous, but I don’t regret anything, apart from the technological limitations that forced us to resort to excessive image compression that gives a mediocre quality in the end.
If you could address a message to this young Stéphane Picq, what would it be?
Stéphane : Very good question, it makes me think of Wolinsky, who released a comic book on this theme. I would need whole pages, but it can be summed up like this: ‘What you know or think you know is only important and real for yourself, it’s a tool to understand (or a handicap to distort) what you feel. Reality is only the perception you have of it. There are a thousand and one realities, which change according to your point of view and your experience, but nothing else is true than what you feel in your heart. If you allow the hazards of life to hurt you and darken your inner light and your perception, it will be very difficult for you to regain contact with this light and sensitivity. I know something about that. Preciously preserve the child within you, it is your most precious treasure.‘
In 1992, it is in a way the consecration, the original soundtrack of Dune is unanimously acclaimed. The famous Tilt magazine awarded him the Golden Tilt, which was no mean feat at the time.
Stéphane : Well, I was happy and very proud at the time to receive this brass trophy awarded by professionals congratulating each other, as well as others abroad that the company’s executives went to receive in my place. In their eyes, I was probably not worth a plane ticket to Los Angeles. But my greatest pride is the hundreds of messages I still get every year from people for whom my music meant something in their youth.
For several years now, you have been asked to re-release the album ‘Dune Spice Opera’. However, EMI Publishing has always refused to give you back the reproduction rights. Can you tell me more about this? This contract was signed in 1992 and lasts for 30 years. Do you have good news for 2022?
Stéphane : Apart from the comfortable production advances during the development of the game itself, I never received a penny on the sales of this album by Virgin Records. In the enthusiasm of the moment, I was well manipulated and very naive by signing a contract in legal English, paragraphs without commas, incomprehensible despite my good level of English. Undated, I signed for thirty years. And there was an oddity at the SACEM that I didn’t receive any reproduction or broadcasting rights.
When we set up the ‘Multi Media Music‘ label with my friend Pierre Estève (which has released Lost Eden, Atlantis and Riverworld), we tried to buy back my rights, even though the album hadn’t been in the catalogue since EMI took over Virgin Records. EMI publishing replied that it was not their commercial policy to retrocede the rights, and that, well, niet.
I don’t know what I would do in 2022, I still have the original files for a possible remix-reboot, but my version of cubase can’t read them…
Let’s go back to Lost Eden. Are you aware that play and especially music had a significant impact on children in the 90’s ?
Stéphane : Yes. I regularly receive messages. I think it’s my most successful album in terms of mixing and arranging, even if the melodies on Dune are better.
What were your influences for Lost Eden?
Stéphane : It’s hard to say at the moment. I listened to all kinds of music. In my old website archived somewhere on the net there is a list of what I listened to at the time.
Due to a hard drive failure, Dehydration Tower does not appear on the game album. Have you thought about doing it again?
Stéphane : I forgot the track and even the anecdote… Where can I listen to it?
Are there some untapped compositions of Lost Eden?
Stéphane : Everything I presented was used in the game. But I composed for fun and recorded about 130 songs that are still unreleased, whose digital masters disappeared in a fire. I still have the Midi files and some analogical K7s.
Have you ever wanted to use your compositions for other projects ? (Question asked by Judith from Demoiselles d’Horreur)
Stéphane : Well, yes. For example, I would have liked the director of the future new movie ‘Dune‘ to contact me to put one of my songs in the end credits, since he’s from the generation where he was probably a fan of this game. I contacted the prod, no answer. I’m open to all serious proposals.
(Fans, you know what to do, get involved on social networks)
Will fans be surprised to hear Stéphane Picq’s music composed for Cryo Interactive’s #Dune game? At least one music in the credits. If Denis Villeneuve is really a fan as he claims, we’ll be entitled to it. @warnerbros@HansZimmerpic.twitter.com/ABXpQRpCxl
— Eklecty-City – Pop Culture (@EklectyCity) July 22, 2020
At that time, would you have liked to compose for the cinema?
Stéphane : Absolutely, and I was even contacted for several projects that finally failed.
How do you decide that a work, a music, is finished? That there’s nothing more to add.
Stéphane : Or that there’s nothing to take away… I don’t know, it’s good to make a lot of friends listen to it and hear what they say, but often not. In fact, I used to compose the music I wanted to listen to, even if there were some specifications in relation to the storyboard. I think that my music is the least accomplished in my opinion, it’s precisely the ones where there were hesitations and dozens of versions.
In 1998, you left the micro-playing world and moved to Madagascar. What made you decide to quit?
Stéphane : I wanted to get some fresh air. Horizons. Africa. Tired of screens. And the environment was changing. We were bought by LVMH (Bernard Arnault, already). They wanted to pay everyone, put us in their system. A dozen of us had created Cryo Interactive, three years later there were over three hundred of us, most of them creative people paid by royalties, so there was a big motivation to produce the best, and then they started paying everyone, with big salaries but no more freedom, that’s called capitalism, isn’t it?
The quality of the games started to drop, and the atmosphere was becoming noxious, you had to release a game, not even finished, not even bugged, at the scheduled date, ‘who cares, we’ll put a patch on the internet’, even if it meant putting sleeping pills in the coke of a project manager who didn’t want to let go of his hard drive (as far as I could see).
And me and Pierre Estève never got a penny of royalties on the music of Atlantis, because the *SACEM had put its big nose into our business, no contract was signed because the SACEM had to charge exorbitant rights on the reproduction of CDs, so the management circumvented the law by having almost all the CDs duplicated in countries outside the SACEM zone.
This is called profit, for the shareholders and to the detriment of the creators. I and other creators sued through SACEM, which, having forcibly replaced our internal agreements, had to protect us. First successful lawsuit: Cryo owed me a million francs. Appeal: won again. Then, cassation, corruption of our lawyer, judgment overturned.
(*a French copyright management company founded in 1851. It is a member of the International Confederation of Societies of Authors and Composers.)
Then you move on to jewelry making. Is that still your main activity?
Stéphane : My main activity is the purchase & sale of precious and fine stones, with a speciality of star sapphire, but I also do jewelry mounting as a service for the client. I don’t sell jewelry without stones, but I can sell stones without jewelry.
What do you remember from those ten years in the video game industry?
Stéphane : We were free, well paid, we were able to work miracles with machines 10,000 times less powerful than a smartphone today. We were enthusiastic and motivated, until the suits and ties that sing the praises of maximum profit at all costs arrived in our daily lives, and put almost everyone in the position of a good « worker », with very attractive salaries, but no more profit on sales, and above all much less creative freedom.
From that moment on, the quality of Cryo Interactive‘s games began to decline, because people were no longer working for themselves, but for ‘them’, the shareholders, the managers, the professionals of the excel board, who never understood anything about creation as such. That’s when I broke away, and I don’t regret it…
Among all your musical compositions, which one would you like us to remember?
Stéphane: I can’t answer this question, it’s up to everyone to answer it, but I can mention some I’d like to forget, like the last track of the album ‘Dune, Spice Opera‘, Cryogénia, which was a big headache with Philippe Ulrich, and there were at least thirty versions before we could agree!
What are your musical influences?
Stéphane : I’ve always listened to different styles of music.. Music from the Middle East, Africa, India, Balinese, Ritual, Sacred, Shamanic from all over the world, Ambient, Jungle / Trip-Hop (you can find a bit of everything under this label), Techno-Transe, New-Age, classical music. Sometimes I still listen to progressive rock, hard rock, trash and blues.
To name a few bands : Astral Projection, Black Sabbath, Bjork, Brian Eno, David Hykes, Dead Can Dance, Depeche Mode, Ennio Morricone, Enya, Emir Kusturica, Eric Satie, Future Sound of London, Gong, Hallucinogen, John Barry, Kate Bush, King Krimson, Kraftwerk, Magma, Malicorne, Meat Beat, Mike Oldfield, Ministry, Mozart, Nusrat Fateh Ali Khan, Peter Gabriel, Philip Glass, Pink Floyd, Shylock, Steve Roach, Stravinsky, Tangerine Dream, Talk Talk, The ORB, Trans-Global Underground, Vivaldi, Wim Wertens, Yes …
If you are shocked to see some names side by side, remember that there is music for every hour of the day, multiplied by the number of different emotions you are able to feel, multiplied by the number of seasons, multiplied by the number of places where you are likely to listen to music… Personally, although I quite like techno-trance, it wouldn’t occur to me to listen to it on a beach in South India…
These days I listen to more reggae, blues, Latino and island music that’s a bit more festive.
In 2006, you announce on the abandonware forums that you want to set up a recording studio in Madagascar. Did this studio finally get off the ground?
Stéphane : Yes, finally, since 2014, the compact mini-studio of my dreams of yesteryear that does everything: A control keyboard, a good laptop, good software, an external sound card, and a good microphone. That’s all I need. I have 1000 times more sound possibilities, 1000 times more power, 1000 times less nuisance, and I can even compose and arrange sitting on the beach!
Is composing music still part of your daily life?
Stéphane : In periods. Sometimes I play several times a week, sometimes every day, sometimes I don’t feel like it for 6 months. I have a lot of compositions, but I have recorded only very few, so they stay alive.
Do you observe the evolution of music in video games or have you definitively turned the page ?
Stéphane : The music remains the music, but it’s the possibilities of sound effects that fascinate me, in 3d universes where you attach one or more sounds to an object, everything is dynamic.
Are you still in contact with the Cryo Interactive alumni?
Stéphane : Yes, some of them, on Facebook.
Do you have a message for them?
Stéphane : If I do, I’ll tell them in private (laughs).
Same question, but for all the fans who have been rocked by your music.
Stéphane : Thank you.
Finally, what question would you have liked me to ask you and what would you have answered?
Stephane : this one, LoL…
Or: ‘What do you think of the industrial capitalist system where profit alone counts, where nature and human beings are crushed for the sole benefit of an elite who own most of the media and who daze people with fake news and stupid and nasty talk shows, not to mention the psychosis maintained to further dominate people through fear?
My answer: The answer’s already in the question, isn’t it?
We’ve come to the end of the interview, thanks again for everything Stéphane.
Stéphane : It’s a pleasure to answer well asked questions, and I hope that those who will read me will think about what the world of tomorrow should be like…
Interview by Thomas O. for Eklecty-City.fr, who thank Stéphane Picq for having lent the game an interview.
Stéphane Picq est un compositeur et sound designer français qui a principalement travaillé pour ERE Informatique/Exxos et Cryo Interactive. Parmi ses compositions de jeux vidéo les plus célèbres nous pouvons citer Dune et la bande-originale emblématique de Lost Eden.
Avant que la musique ne devienne son activité principale, Stéphane a débuté en codant des jeux vidéo en 1983. C’est lors du portage des jeux sur différents système, notamment l’Amiga, qu’il a commencé à ajouter de la musique et des sons aux jeux. Après avoir travaillé pendant plusieurs années comme compositeur et sound designer, il a quitté la France en 1998 et s’est installé à Madagascar, où il réside actuellement. Il travaille maintenant dans le domaine des pierres précieuses.
Dans cette interview, je reviens avec Stéphane sur son parcours, ses méthodes de travail, ses influences, mais aussi les raisons de son départ de l’industrie du jeu vidéo. Rencontre avec une pierre précieuse de la musique.
Stéphane to many English fans, our interview is also available in English. Follow the link below.
Bonjour Stéphane, tout d’abord merci de m’avoir accordé cette interview. Je suis vraiment heureux que l’on ait pu fixer cet entretien. Avant de débuter, pour ceux qui ignorent ton parcours, peux-tu te présenter ?
Stéphane : Passionné par l’informatique depuis mon adolescence, j’ai programmé très tôt, d’abord en Basic, puis en code machine, puis en C. J’étais loin d’être mauvais, mais lassé par la programmation, musicien amateur par ailleurs, j’ai opéré une translation vers les BO de jeux vidéo. Le contexte et la demande étaient favorables à l’époque. Ce qui était un hobby est devenu un métier.
Sur ton site internet, tu te décrivais comme ‘un passionné de toutes les musiques modifiant les états de conscience: musiques rituelles chamaniques, techno-transe, musique sacrée, et certains morceaux méditatifs ‘new-age’. Un être humain, colocataire de cette planète, comme vous’. Aujourd’hui, cette description te parait toujours juste ?
Stéphane : Je crois que ma spiritualité de l’époque s’est un peu diluée dans le contexte à la fois âpre et doux de la vie à Madagascar, mais je ne renie rien. Par contre, je ne dirais plus ‘colocataire de la planète‘, mais ‘une des cellules de la planète en tant qu’entité vivante globale, Gaia‘.
De 1985 à 1987 tu es responsable de la rubrique jeux de Science & Vie Micro. S’agissait-il de ton premier emploi lié aux jeux vidéo ?
Stéphane : Non, j’ai commencé à coder en 1982, et commercialisé un petit jeu d’arcade sur ZX Spectrum en 1983, et un autre ensuite sur Armstrad CPC 464. J’ai aussi vendu en magasin les premiers ordinateurs avec des capacités musicales, les MSX, vers la même époque, et j’étais déjà un collaborateur régulier d’Ere Informatique avant. A Science & Vie Micro j’étais très mal payé, mais je recevais tous les derniers jeux gratos !
Gardes-tu un bon souvenir de cette époque ?
Stéphane : Bien sur. On était des pionniers enthousiastes, tout était à faire, au début c’était vraiment le système D ! Et puis nous avions une grande liberté en tant que créatifs non salariés mais payés en avances sur ventes, on gagnait pas mal de sous aussi, si le jeu était un succès…
Comment as-tu débuté dans l’une des premières sociétés françaises d’édition de logiciels, Ère Informatique ?
Stéphane : Après avoir appris à programmer tout seul, j’ai pondu quelques jeux insignifiants jamais commercialisés, sauf l’un d’entre eux (Lombrix), qui a plu à cette petite entreprise naissante. Je précise que je n’ai jamais été salarié, mais uniquement auteur rémunéré sur les ventes.
J’ai lu que c’est après un rejet du langage informatique que tu as découverts ta voie, la composition de musique. L’anecdote est-elle exacte ?
Stéphane : Tout à fait. Mon dernier jeu sur Armstrad CPC 464 (Birdie) étant une prouesse technique pour l’époque, mais à la jouabilité médiocre, ERE Informatique m’a proposé de faire la translation d’un jeu sur Atari ST (Bubble Ghost) vers Armstrad CPC 464, ce que j’ai fait sans difficultés, mais ensuite c’était vraiment un challenge de le convertir sur Commodore Amiga. J’ai dû en quelques mois, apprendre le language C, digérer des centaines de pages pour maitriser cet ordinateur complexe, et coder des milliers de lignes !
Ça m’a épuisé, mais j’ai fait une musique en une nuit, qui n’existait pas dans la version originale. Étant à la fois codeur et musicien, programmer une musique sur SoundTracker pas à pas, en hexadécimal, a été un vrai plaisir. La société ayant aimé ma musique, m’a proposé de faire toutes les bandes-son et bruitages de leurs futurs jeux sur Amiga. C’était facile pour moi et très bien payé pour le temps passé, contrairement au codage. La plupart de mes meilleurs morceaux de musique ont été fait en une nuit, voire en deux-trois jours.
Et c’est là que tu te spécialises dans le sampling et les digitalisations sonores, souvent avec les moyens du bord. Tu utilises par exemple un pot de miel vide pour les percussions de Lost Eden.
Stéphane : A neuf ans, mon cadeau d’anniversaire a été un magnétophone portable SONY avec un micro de très bonne qualité (je disais à mes parents que voulais devenir journaliste). Sur le moment j’étais déçu car j’attendais autre chose, mais finalement j’ai commencé à m’amuser à enregistrer tout ce qui me venait à l’esprit, les sons de la Nature, les sons d’objets du quotidien utilisés autrement, etc. Donc, lorsque j’ai eu bien plus tard l’occasion de sampler des sons pour me faire ma propre bibliothèque, c’était naturel pour moi de détourner tout objet pour en faire un son triturable à souhait. Le pot de miel je ne m’en souviens plus, mais j’ai fait un son de harpe dissonante dans Atlantis avec un coupe-frites à fils trouvé à la poubelle, samplé et joué quatre octaves en dessous.
Quelle était ta méthode de travail, le processus créatif ? Avais-tu besoin d’images pour composer ou seulement de descriptions et de mots-clés ?
Stéphane : Aucune méthode de travail. D’ailleurs je n’aime pas le mot ‘travail’, qui évoque une contrainte. Je passais énormément de temps à sampler ou programmer mes propres sons, puis il m’arrivait de me dire ‘tiens je vais tester celui-là’, et puis je lançais Cubase, et le morceau se construisait par magie, quand j’étais inspiré, et je rajoutais d’autres lignes mélodiques par-dessus mon premier jet.
Quand il s’agissait de composer à partir d’un visuel ou d’une description verbale, j’intégrais le feeling des scènes à illustrer musicalement, puis je cessais d’y penser. Et puis ça mûrissait tout seul pendant mes méditations, et à un moment c’était prêt dans ma tête (ou ailleurs), sans que je ne le sache. Je me mettais au clavier, et ça sortait tout seul. Bien sûr il a de la réflexion aussi, mais elle ne sert qu’à organiser les choses qui sortent d’ailleurs. J’ai eu la chance qu’on me laisse travailler en toute liberté, et malgré quelques ajustements parfois demandés par l’équipe de certains jeux, on ne m’a jamais refusé un morceau.
Il me semble que la nature occupait également une place primordiale dans ton processus créatif ?
Stéphane : Je pense que la Nature est sensée occuper une place primordiale dans le bien-être de tout être humain normal qui a conscience d’en faire partie. Ceci dit, j’étais venu vivre à Paris pour travailler sur Dune, mais j’en sortais aussi souvent que possible pour aller en forêt. A part ça j’ai toujours vécu à la campagne et finalement dans le Lubéron, au milieu des pins et des vignes.
Est-il juste de dire que la nature était une extension de ton studio d’enregistrement ?
Stéphane : Je ne dirais pas ça. La nature, c’est tout simplement l’opposé ! A l’époque, un home studio c’était des dizaines de mètres de câbles avec toujours un faux contact, un PC poussif, l’œil rivé sur un écran 12 heures par jour, des synthés qu’il fallait reconfigurer un par un au démarrage, bref, des prises de tête sans fin. La Nature était la source, l’oxygène de mon être, alors que le studio était juste un outil capricieux qu’il était nécessaire de maîtriser correctement pour exprimer au mieux ce que j’avais en tête.
Justement, si j’ai évoqué la ‘nature’ et ‘extension de ton studio’ c’était pour te faire revivre ces images :
Stéphane : On s’est bien amusé à tourner ça. Bien sûr aucun son d’ambiance n’est réel. J’étais un peu ingénu et légèrement pompeux, mais je ne regrette rien, à part les limites technologiques qui nous ont obligés à recourir à une compression d’image excessive qui donne une qualité médiocre au final.
Si tu pouvais adresser un message à ce jeune Stéphane Picq, lequel serait-ce ?
Stéphane : Très bonne question, ça me fait penser à Wolinsky, qui a sorti un album BD sur ce thème. Il me faudrait des pages entières, mais on peut résumer ainsi : ‘Ce que tu sais ou crois savoir n’a d’importance et de réalité que pour toi-même, c’est un outil pour comprendre (ou un handicap pour déformer) ce que tu ressens. La réalité n’est que la perception que tu en as. Il y a mille et une réalités, qui changent selon ton point de vue et ton vécu, mais rien d’autre n’est vrai que ce que tu ressens dans ton cœur. Si tu laisses les aléas de la vie te blesser et obscurcir ta lumière intérieure et ta perception, il te sera très difficile de retrouver le contact avec cette lumière et cette sensibilité. J’en sais quelque chose. Conserves précieusement l’enfant qui est en toi, c’est ton trésor le plus précieux.‘
En 1992, c’est en quelque sorte la consécration, la bande-originale de Dune fait l’unanimité. Le fameux magazine Tilt lui décerne le Tilt d’or, ce qui n’est pas rien à l’époque.
Stéphane : Bah, j’étais content et très fier à l’époque de recevoir ce trophée en laiton décerné par des professionnels se congratulant entre eux, ainsi que d’autres à l’étranger que les cadres de la société sont allés recevoir à ma place. A leurs yeux, je ne valais probablement pas un billet d’avion pour Los Angeles. Mais ma plus grande fierté, c’est les centaines de messages que je reçois toujours chaque année, de gens pour qui ma musique a compté dans leur jeunesse.
Depuis plusieurs années, on te demande une réédition de l’album ‘Dune Spice Opera’. Cependant, EMI Publishing a toujours refusé de te rendre les droits de reproduction. Peux-tu m’en dire plus à ce sujet ? Ce contrat signé en 1992 s’étend sur 30 ans. As-tu une bonne nouvelle à m’annoncer pour 2022 ?
Stéphane : A part les confortables avances de production pendant le développement du jeu lui-même, je n’ai jamais touché un centime sur les ventes de cet album par Virgin Records. Dans l’enthousiasme du moment, j’ai été bien manipulé et bien naïf en signant un contrat en anglais juridique, des paragraphes sans virgules, incompréhensibles malgré mon bon niveau d’anglais. Sans date, j’ai signé pour trente ans. Et il y a eu une bizarrerie au niveau de la SACEM qui fait que je n’ai ni touché de droits de reproduction, ni droits de diffusion.
Lorsque nous avons monté le label ‘Multi Media Music‘ avec mon ami Pierre Estève (lequel label a édité Lost Eden, Atlantis et Riverworld), nous avons tenté de racheter mes droits, alors même que l’album n’était plus au catalogue depuis la reprise de Virgin Records par EMI. EMI publishing a répondu que ce n’était pas dans leur politique commerciale de rétrocéder les droits, et que, bah, niet.
Je ne sais pas ce que je ferais en 2022, j’ai toujours les fichiers originaux pour un éventuel remix-reboot, mais ma version de cubase n’arrive pas à les lire…
Revenons sur Lost Eden. As-tu conscience que le jeu et notamment les musiques ont eu un impact significatif chez les enfants des 90’s ?
Stéphane : Oui. Je reçois régulièrement des messages. Je crois que c’est mon album le plus abouti en terme de mixage et d’arrangement, même si les mélodies de Dune sont meilleures.
Quels ont été tes influences pour Lost Eden ?
Stéphane : Difficile à dire à présent. J’écoutais toutes sortes de musiques. Dans mon ancien site web archivé quelque part sur le net il y a une liste de ce que j’écoutais à l’époque.
Suite à une panne de disque dur, Deshydratation Tower ne figure pas sur l’album du jeu. As-tu pensé à le refaire ?
Stéphane : J’ai oublié le morceau et même l’anecdote… Ou puis-je l’écouter ?
Y a-t-il des compositions non exploitées de Lost Eden ?
Stéphane : Tout ce que j’ai présenté a été utilisé dans le jeu. Mais j’ai composé pour le plaisir et enregistré environ 130 morceaux toujours inédits, dont les masters numériques ont disparu dans un incendie. Il me reste les fichiers Midi et des K7 analogiques.
As-tu déjà eu envie d’utiliser tes compositions pour d’autres projets ? (Question posée par Judith de Demoiselles d’Horreur)
Stéphane : Bah, oui. Par exemple j’aurais aimé que le réalisateur du futur nouveau film ‘Dune‘ me contacte pour mettre un de mes morceaux au générique de fin, puisque il est de la génération où il a été probablement fan de ce jeu. J’ai contacté la prod, pas de réponses. Je suis ouvert à toutes propositions sérieuses.
(Ndlr : Les fans, vous savez quoi faire, mobilisez-vous sur les réseaux sociaux)
Will fans be surprised to hear Stéphane Picq’s music composed for Cryo Interactive’s #Dune game? At least one music in the credits. If Denis Villeneuve is really a fan as he claims, we’ll be entitled to it. @warnerbros@HansZimmerpic.twitter.com/ABXpQRpCxl
— Eklecty-City – Pop Culture (@EklectyCity) July 22, 2020
A cette époque, aurais-tu aimé composer pour le cinéma ?
Stéphane : Absolument, et j’ai même été contacté pour plusieurs projets qui ont finalement avorté.
Comment décide-t-on qu’une œuvre, une musique, est terminée ? Qu’il n’y a plus rien à ajouter.
Stéphane : Ou qu’il n’y a rien à retrancher… J’en sais rien, il est bon de faire écouter à un max de potes et écouter ce qu’ils en disent, mais souvent non. En fait je composais la musique que j’avais envie d’écouter, même si il y avait un cahier des charges par rapport au storyboard. Mes musiques les moins abouties d’après moi, c’est justement celles ou il y a eu des hésitations et des dizaines de versions.
En 1998, tu quittes le milieu micro-ludique pour partir à Madagascar. Qu’est-ce qui t’a poussé à tout plaquer ?
Stéphane : Envie d’air. D’horizons. D’Afrique. Marre des écrans. Et le milieu changeait. On a été racheté par LVMH (Bernard Arnault, déjà). Ils voulaient salarier tout le monde, nous mettre dans leur système. On avait été une douzaine de personnes à créer Cryo Interactive, trois ans après on était plus de trois cent, majoritairement des créatifs rémunérés par royalties, donc grosse motivation pour pondre du top, et puis après ils ont commencé à salarier tout le monde, avec de gros salaires mais plus aucune liberté, ça s’appelle le capitalisme, n’est-ce pas ?
La qualité des jeux a commencé à baisser, et l’ambiance devenait délétère, il fallait sortir un jeu, même pas fini, même buggé, à la date prévue, ‘on s’en fout, on mettra un patch sur internet’, quitte à mettre des somnifères dans le coca d’un chef de projet qui ne voulait pas lâcher son disque dur (vu de mes yeux).
Et moi et Pierre Estève n’avons jamais touché un centime de royalties sur la musique d’Atlantis, car la SACEM ayant mis son gros nez dans nos affaires, aucun contrat n’a été signé car ladite SACEM devait prélever des droits exorbitants sur la reproduction des CDs, ce qui fait que la direction a contourné la loi en faisant dupliquer la quasi-totalité des CDs dans des pays hors-zone SACEM.
Ça s’appelle le profit, pour les actionnaires et au détriment des créateurs. Moi et d’autres créateurs on a fait un procès par l’intermédiaire de la SACEM, qui, s’étant substituée de force à nos accords internes, se devait de nous protéger. Premier procès gagné : Cryo me devait un million de francs. Appel : gagné encore. Ensuite, cassation, corruption de notre avocat, jugement cassé.
Tu t’orientes ensuite vers la création de bijoux. Est-ce toujours ton activité principale ?
Stéphane : Mon activité principale est l’achat & vente de pierres précieuses et fines, avec spécialité de saphir étoilé, mais je fais des montages sur bijoux à titre de service pour le client. Je ne vends pas de bijoux sans pierres, mais je peux vendre des pierres sans bijoux.
Que retiens-tu de ces dix années dans l’industrie vidéoludique ?
Stéphane : On était libres, bien payés, on arrivait à faire des miracles avec des machines 10000 fois moins puissante qu’un smartphone aujourd’hui. On était enthousiastes et motivés, jusqu’à ce que les costards-cravates chantres du bénéfice maximum à tout prix, débarquent dans notre quotidien, et remettent presque tout le monde au rang de bon ‘travailleur’, avec des salaires certes très attirants, mais plus aucun bénéfice sur les ventes, et surtout beaucoup moins de liberté créative.
C’est à partir de ce moment là que la qualité des jeux de Cryo Interactive a commencé à baisser, parce que les gens ne travaillaient plus pour eux-mêmes, mais pour ‘eux’, les actionnaires les managers, les pros du tableau excel, qui n’ont jamais rien compris à la création en tant que telle. C’est là que je me suis cassé, et je ne le regrette pas…
Parmi toutes tes compositions musicales, laquelle voudrais-tu que l’on retienne ?
Stéphane : Je ne peux pas répondre a cette question, c’est à chacun d’y répondre, par contre je peux citer certaines que j’aimerais qu’on oublie, comme le dernier morceau de l’album ‘Dune, Spice Opera‘, Cryogénia, qui a été une grosse prise de tête avec Philippe Ulrich, et d’ailleurs il y a eu au moins trente versions avant qu’on ne se mette d’accord !
Quelles sont tes influences musicales ?
Stéphane : J’ai toujours écouté différents styles de musique. La musique du Moyen Orient, Africaine, d’Inde, Balinaise, Rituelle, Sacrée, Chamanique du monde entier, Ambient, Jungle / Trip-Hop (on trouve un peu de tout sous cette étiquette), Techno-Transe, New-Age, la musique classique. Il m’arrive parfois encore d’écouter du rock progressif, du hard rock, du trash et du blues.
Pour citer quelques groupes : Astral Projection, Black Sabbath, Bjork, Brian Eno, David Hykes, Dead Can Dance, Depeche Mode, Ennio Morricone, Enya, Emir Kusturica, Eric Satie, Future Sound of London, Gong, Hallucinogen, John Barry, Kate Bush, King Krimson, Kraftwerk, Magma, Malicorne, Meat Beat, Mike Oldfield, Ministry, Mozart, Nusrat Fateh Ali Khan, Peter Gabriel, Philip Glass, Pink Floyd, Shylock, Steve Roach, Stravinsky, Tangerine Dream, Talk Talk, The ORB, Trans-Global Underground, Vivaldi, Wim Wertens, Yes …
Si vous êtes choqués de voir certains noms côte à côte, souvenez vous qu’il y a des musiques pour chaque heure de la journée, multiplié par le nombre d’émotions différentes que vous êtes capables de ressentir, multiplié par le nombre de saisons, multiplié par le nombre de lieux dans lesquels vous êtes susceptibles d’écouter de la musique… Personnellement, bien que j’aime assez la techno-transe, il ne me viendrait pas à l’idée d’en écouter sur une plage du sud de l’Inde…
Aujourd’hui j’écoute davantage du reggae, du blues, du latino et de la musique des îles un peu plus festive.
En 2006, tu annonces sur les forums d’abandonware que tu souhaites monter un studio d’enregistrement à Madagascar. Finalement, ce studio a-t-il vu le jour ?
Stéphane : Oui, enfin, depuis 2014, le mini-studio compact de mes rêves d’autrefois qui fait tout : Un clavier de contrôle, un bon PC portable, des bons logiciels, une carte-son externe, et un bon micro. Pas besoin de plus. J’ai 1000 fois plus de possibilités sonores, 1000 fois plus de puissance, 1000 fois moins de nuisances, et je peux même composer et arranger assis sur la plage !
La composition de musique fait-elle encore partie de ton quotidien ?
Stéphane : Par périodes. Parfois je joue plusieurs fois par semaine, parfois tous les jours, parfois je n’ai pas envie pendant 6 mois. J’ai plein de compositions, mais j’en ai enregistré seulement très peu, comme ça elles restent vivantes.
Observes-tu l’évolution de la musique dans les jeux vidéo ou as-tu définitivement tourné la page ?
Stéphane : La musique reste la musique, mais c’est les possibilités de bruitages qui me fascinent, dans des univers 3d ou tu attaches un ou plusieurs sons à un objet, tout est dynamique
Es-tu encore en contact avec les anciens de Cryo Interactive ?
Stéphane : Oui, certains d’entre eux, sur Facebook.
As-tu un message à leur faire passer ?
Stéphane : Si j’en ai un, je le leur dirai en privé (rires).
Même question, mais pour tous les fans qui ont été bercés par ta musique.
Stéphane : Merci
Pour terminer, quelle question aurais-tu souhaitée que je te pose et qu’aurais-tu répondu ?
Stéphane : celle-ci, LoL…
Ou alors : ‘Que penses-tu du système capitaliste industriel ou seul compte le profit, où la nature et l’être humain sont broyés pour le seul bénéfice d’une élite qui possède la plupart des médias et qui abrutissent les gens avec des fake-news et des talk-shows débiles et méchants, sans compter la psychose entretenue pour dominer encore plus les gens par la peur ?’
Ma réponse : La réponse se trouve déjà dans la question, non?
Nous sommes arrivés à la fin de l’interview, encore merci pour tout Stéphane.
Stéphane : C’est un plaisir de répondre à des question bien posées, et j’espère que ceux qui me liront penseront à ce que devrait-être le monde de demain…
Propos recueillis par Thomas O. pour Eklecty-City.fr, qui remercie Stéphane Picq pour s’être prêté au jeu de cette interview.
Pratiquement 30 ans après la sortie dans les salles de Terminator 2 : Le Jugement Dernier, le qui a défini le cinéma blockbuster des années 90 s’apprête à revenir dans les salles dans une version Corse inédite.
Alors que le film s’apprête à fêter son trentième anniversaire, l’association Fiura Mossa travaille actuellement sur le doublage Corse du film culte de James Cameron. Afin d’en savoir plus sur la version Corse du film attendue pour la fin de l’année dans les salles de cinéma Corses et plus tard en DVD / Blu-Ray, j’ai souhaité m’entretenir avec Jean-Yves Casalta, en charge de la direction artistique du doublage Corse de Terminator 2, et Andria Dominici, la voix Corse d’Arnold Schwarzenegger.
Une interview passionnante avec laquelle vous allez découvrir les coulisses du doublage et comment l’équipe en charge du doublage a adapté les dialogues dans la langue Corse. Enfin, nous avons droit à un petit extrait exclusif de la réplique phare d’Arnold Schwarzenegger par Andria Dominici. Aghju da vultà !
Terminator 2 : L’Ultima Sintenza
Interview avec Jean-Yves Casalta vice-président de l’association Fiura Mossa, en charge de la direction artistique du doublage Corse de Terminator 2, et Andria Dominici, la voix Corse d’Arnold Schwarzenegger
Bonjour Jean-Yves, André, tout d’abord merci à vous deux de m’avoir accordé cet entretien. Avant de débuter, pouvez-vous vous présenter :
Jean-Yves : Je suis enseignant en langue et culture corses de profession et de manière associative chanteur et musicien au sein du groupe Diana di l’Alba depuis 1993. Je suis aussi cofondateur de l’association Fiura Mossa avec Sylvain Giannecchini qui en est le Président. J’interviens également dans d’autres associations culturelles mais il serait peut-être fastidieux de tout expliquer dans cette interview (rires).
André : Pour ma part, sur scène en tant que chanteur depuis le début des années 90 et professionnel, toujours du chant depuis plus de vingt ans au sein de l’ensemble Barbara Furtuna. Et comme disait Jean Yves, je suis également acteur culturel dans de nombreux projets associatifs qu’il me serait également fastidieux d’expliquer… (rires).
Peux-tu nous présenter l’association Fiura Mossa ?
Jean-Yves : Fiura Mossa a été créée en 2010. Elle vise à promouvoir la langue corse auprès des jeunes par le biais de supports audiovisuels. En animation, avons doublé des séries télévisées (Yakari, Léonard), des courts-métrages (Le Gruffalo, le Petit Gruffalo, la Sorcière dans les Airs, l’Histoire de Noël) et un long métrage (Le Chant de la Mer).
Pour nos 10 ans nous avons voulu marquer le coup avec le doublage d’un film live et en l’occurrence d’un classique du cinéma. C’est ainsi que nous nous sommes retrouvés à travailler sur Terminator 2. Cependant nous n’oublierons pas les plus jeunes non plus cette année puisque nous allons adapter également deux moyens-métrages : Monsieur Bout de Bois et Un conte peux en cacher un autre.
Faire connaitre la langue Corse à travers des œuvres culturelles c’est quelque chose qui vous tient à cœur ?
Jean-Yves : Complètement. L’idée dans notre démarche est de valoriser l’image que les jeunes peuvent avoir de leur langue. Depuis une quarantaine d’années, c’est essentiellement le chant qui a porté de nombreux jeunes à parler corse. Nous espérons à travers l’audiovisuel en langue corse amplifier cette démarche. C’est pourquoi nous travaillons d’abord avec les scolaires. Notre but est avant tout pédagogique.
André : Pour ce qui me concerne, c’est un engagement qui fut pris dès l’adolescence et qui continue encore aujourd’hui à 51 ans. Alors oui, la transmission, la valorisation sont des moteurs indispensables pour la langue corse, avec aujourd’hui ce magnifique outil qu’est l’association Fiura Mossa, espace de création et de diffusion, surtout auprès des plus jeunes.
Une décennie après la création de l’Association, quel a été le travail de doublage le plus marquant pour l’équipe ?
Jean-Yves : Je pense que c’est sans doute le premier projet, à savoir la série Yakari. Nous avons pu rencontrer à cette occasion à Paris le réalisateur Xavier Giacometti qui était ravi de voir son travail adapter en corse, il faut préciser qu’il est corse également mais nous ne nous connaissions absolument pas.
Xavier nous a fait alors visiter les studios d’Ellipse Anime où était entre autre réalisée la série et le studio Audiophase où elle avait été doublée. Par la suite il a fait le déplacement en Corse lors des premières sessions d’enregistrement. C’est quelqu’un avec qui nous sommes restés très amis et qui vient d’adapter la série en film : Yakari la Grande Aventure. Ce sera sans doute un futur projet pour Fiura Mossa (rires).
Fiura Mossa double Terminator 2 : Le comédien Philippe Ambrosini (chemise blanche) la voix Corse du Docteur Silberman, Sylvain Giannecchini, Jean-Yves Casalta vice-président de l’association Fiura Mossa (t-shirt vert) et assis Petru Alfonsi et l’ingénieur son Christophe Mac Daniel (avec la casquette). Crédit Photo : Fiura Mossa.
Nous échangeons aujourd’hui pour parler de ce qui est sans doute l’un des projets majeurs de l’Association Fiura Mossa, le doublage de Terminator 2 : Le Jugement Dernier.
Jean-Yves : Tout à fait.
Pour le premier film live doublé par l’Association, vous avez choisi l’un des films culte de James Cameron qui a défini le cinéma blockbuster des années 90. Pourquoi un tel choix ?
Jean-Yves : À titre personnel, Terminator 2 est sans doute le seul film que je me rappelle avoir vu lors de sa sortie lorsque j’étais lycéen. Il y avait un tel engouement chez les jeunes autour de ce film, c’était quelque chose d’extraordinaire et cela était dû en grande partie aux effets spéciaux, révolutionnaires pour l’époque, mais aussi à la qualité du scénario. C’était une des premières fois qu’une suite était aussi bien voir mieux que le film original car elle y apportait plus de profondeur.
Je me souviens aussi du flipper ‘Terminator 2‘ dans un bar à Bastia sur lequel on a passé pas mal de temps à jouer ou encore des trailers radiophoniques qui étaient diffusé sur NRJ. C’est un film qui a incroyablement bien vieillit excepté un ou deux plans, les effets spéciaux lorsque le Terminator arrive en 1995. Quant au choix de ce film pour une adaptation en corse et bien il nous fallait un film connu de tous qui soit une référence dans la Pop Culture afin de créer un électrochoc psychologique qui fasse la démonstration que le corse, comme toutes les langues, peut parler de tout au-delà de son aire traditionnelle. Terminator 2 avait toutes les qualités requises pour cela.
Peux-tu nous expliquer comment obtient-on l’autorisation de doubler un film ? Quel a été le processus pour Terminator 2 ?
Jean-Yves : Pour obtenir une autorisation il faut contacter la société de production qui possède les droits et lui expliquer le sens pédagogique de notre démarche et sa finalité. Si tout est ok on discute alors du montant des droits et de leur durée. En l’occurrence les demandes de ce type concernant des langues régionales sont rarissimes ou inédites, et ils doivent parfois nous voir comme des extra-terrestres (rires).
Pour en revenir à Terminator 2 nous avons fait une demande conjointe avec nos amis bretons et occitans des associations Dizale et Conta’m auprès de StudioCanal afin de pouvoir leur faire une proposition financière plus avantageuse. Ils nous ont prêté une oreille attentive et ont fait remonter la demande aux Etats-Unis où notre projet a été accepté.
Terminator 2 : L’Ultima Sintenza – Un Filmu di James Cameron.
Pour les dialogues, quelle version du film est utilisée pour la traduction ? Est-ce la version originale ou la version Française ?
Jean-Yves : La version originale bien évidemment. Le script que m’a envoyé StudioCanal était en anglais. Cependant je me suis également intéressé à la version française voir parfois italienne ou espagnole pour voir comment certaines tirades ont pu être adaptées dans ces langues latines plus proches du corse que l’anglais.
Pour le titre du film j’ai privilégié la version française ‘Le Jugement Dernier‘ à ‘Judgment Day‘ car il s’agit moins d’une traduction que d’une adaptation. Il faut que cela ‘sonne’ également dans la langue cible. Ici par exemple ‘L’Ultima Sintenza‘ sonne mieux que ‘U Ghjornu di a Sintenza‘ tout comme j’imagine l’adaptateur en langue française a dû considérer que ‘Le Jugement Dernier‘ était plus opportun qu’une traduction littérale qui aurait donné ‘Le Jour du Jugement‘. Ce n’a pas été le cas par ailleurs en italien qui ont opté pour une traduction plus fidèle ‘Il Giorno delGiudizio‘.
Le processus de traduction a demandé combien d’heures de travail ?
Jean-Yves : Environ deux mois et demi de travail. Il ne s’agit pas seulement d’une traduction mais bien d’une adaptation. Le texte cible doit respecter le sens du texte source mais il doit également être synchrone avec l’image, et respecter le rythme des comédiens dans leur expression et le mouvement labial. Tous ces mouvements labiaux sont justement recensés dans la phase qui précède l’adaptation et qui s’appelle la détection.
Est-ce que le vocabulaire Corse est assez riche pour respecter l’intégralité des dialogues du film ?
Jean-Yves : Il n’y a pas eu à proprement parler de grosses difficultés au niveau lexical. On retrouve en filigrane dans ta question l’idée qu’une langue d’essence rurale ne serait pas apte à parler des choses du monde moderne dans toute sa complexité. S’il est vrai que le lexique contemporain ne trouve pas toujours sa traduction dans le lexique que nous ont léguée nos anciens, il n’en demeure pas moins vrai que le corse est une langue vivante et que par définition une langue vivante s’adapte et évolue.
En ce qui nous concerne, extraire la langue de son contexte naturel par le biais d’un film de science-fiction est justement un extraordinaire moyen pour l’enrichir, diffuser et populariser les innovations linguistiques. Dans Terminator 2 par exemple ‘la Thorazine‘ devient ‘a Turazina‘ ou ‘le poly-alliage mimétique‘ (Mimetic Polyalloy en V.O.) devient ‘U pulimischju mimeticu‘.
En revanche lorsque la longueur d’une phrase est inégale d’une langue à l’autre ou lorsque le synchronisme labial est impossible si l’on s’en tient à une traduction fidèle alors oui il arrive parfois que l’on soit obligé de remanier un peu le sens de la version originale.
Peux-tu nous donner un exemple de dialogue remanié ?
Jean-Yves : Et bien au début du film, dans la scène où John Connor vole de l’argent au distributeur automatique il s’exclame ‘Easy money !‘ (‘Argent facile‘ en VF) ce qui aurait donné en corse quelque chose comme ‘solli scuccagnati‘ ou ‘solli senza strazii‘. Pour être synchrone avec l’image j’ai privilégié ‘Eccu a muneta !‘ que l’on pourrait traduire en français ‘Par ici la monnaie‘. Le sens est légèrement différent mais on conserve une durée de phrase à peu près égale ainsi que la voyelle ‘E‘ en début de phrase et le mot ‘muneta‘ qui a la même racine que ‘money‘.
J’imagine qu’il y a eu un casting pour les comédiens de doublage. Quels ont été les critères de sélection ?
Jean-Yves : Oui nous avons fait deux castings, les critères fondamentaux sont au nombre de trois : Il faut avoir une bonne maîtrise du corse, il faut bien évidemment être comédien ou avoir des aptitudes à jouer la comédie et enfin il faut que le timbre de voix corresponde à la voix du comédien que l’on doit doubler.
Andria est le seul a ne pas avoir été pris sur casting. Nous avions déjà travaillé ensemble sur un épisode de la série animée ‘Yakari‘ il y a quelques années de cela et il suffit de l’entendre parler pour comprendre qu’il ne pouvait y avoir de meilleur choix que lui pour devenir la voix corse ‘officielle’ d’Arnold Schwarzenegger (rires).
Andria Dominici, la voix Corse d’Arnold Schwarzenegger.
André, tu as l’honneur, mais aussi la lourde tâche de prêter ta voix à l’un des personnages les plus emblématiques de la Pop Culture. Dans quel état d’esprit te trouves-tu ?
André : Tout d’abord honoré d’avoir été choisi par l’équipe de Fiura Mossa, car ce n’est pas tous les jours que l’on peut se targuer d’être la voix corse d’Arnold Schwarzenegger et du Terminator de surcroît. (rires)
Fier également d’être associé à ce grand film, référence de la science-fiction et véritable icône de la Pop Culture. De plus culture et populaire sont des mots que nous aimons conjuguer en Corse, tout cela agrémenté d’une BO de film sublimée par les Guns and Roses à leurs apogée à ce moment-là. Que dire de plus… Culte !
Et surtout très heureux, car nous venons de terminer il y a seulement quelques jours, le doublage complet de la voix du Terminator et à l’écoute du résultat, ça va être … Terrible !! (rires).
Parle-nous de ton parcours :
André : En fait, j’ai très peu de doublage à mon actif. Il y a quelques années, j’ai prêté ma voix pour un épisode de Yakari, toujours en langue corse et toujours sous la houlette de Jean Yves et de Sylvain. Mais bon les choses vont sûrement changer et s’accélérer après tout ça… (rires).
Parmi toute ta voxographie, quel(s) personnage(s) as-tu le plus apprécié jouer ?
André : Le tout dernier bien sûr, (rires) !!
Pour revenir à Terminator 2, je voulais savoir comment adaptes-tu ton jeu ? Est-ce que tu te calques sur le jeu d’Arnold Schwarzenegger ou sur l’interprétation vocale de Daniel Beretta pour la version Française ?
André : j’avoue que la difficulté première était justement de jouer une machine froide émotionnellement, impitoyable, qu’il a fallu doter de sentiments.
En premier lieu, je me suis penché sur le jeu vocal de chacun, tout d’abord avec l’original en anglais et les doublages français, italien et même espagnol, afin de déceler la meilleure façon de poser ma voix, mon timbre et ma propre tonalité. Nous avons également dosé le phrasé en ajoutant un supplément d’âme, pour éviter le rendu d’une voix trop synthétique et ainsi ne pas lasser l’auditeur. De plus c’est exactement ce que nous démontre ce Terminator-là, un Terminator tendant vers une forme d’humanité.
Ensuite il était clair dès le départ, que nous ne voulions pas imiter une quelconque version, d’ailleurs nous n’avons quasiment jamais écouté d’autres scènes doublées, hormis quelquefois l’originale pendant nos séances d’enregistrements quand nous avions un doute sur le jeu à développer. Je dirais que oui, le jeu d’acteur d’Arnold Schwarzenegger a essentiellement dicté mon interprétation.
J’ai envie de dire que doubler Terminator 2 en 2020 est un exercice périlleux. Nous avons un film qui a été doublé en plusieurs langues il y a presque 30 ans. Chacune des versions bénéficient d’un doublage de qualité, notamment la version Française qui est culte. Il doit y avoir une pression énorme en studio ? (rires).
Jean-Yves : C’est effectivement un peu stressant mais c’est aussi très motivant. Nous nous sommes toujours dit, depuis le début de nos doublage, que le résultat final devait être au moins aussi bon que les versions françaises ou anglaises. C’est le moindre des respects que nous devons aux œuvres cinématographiques ou télévisuelles mais également à l’image de notre langue qui s’en trouve valorisé lorsque la qualité est là.Sur Terminator 2, en raison de la dimension culte du film, il y a effectivement beaucoup d’attente à ce sujet. Après les premières sessions d’enregistrement je peux d’ores et déjà affirmer que la qualité sera au rendez-vous.
André : De la pression il en faut quelquefois, je pense. (rires)
En tout cas elle est nécessaire pour être conscient de l’enjeu, tirer vers la qualité et ainsi servir au mieux l’œuvre cinématographique et linguistique. Terminator 2 fait partie de l’histoire du cinéma à tout jamais. Aujourd’hui encore, il continue à fasciner. À nous maintenant d’écrire de nouvelles pages, des pages en langue corse, cette fois ci.
Tu parlais de la version française, j’ai une petite anecdote à ce sujet… Je viens d’apprendre que Daniel Beretta, la voix française d’Arnold Schwarzenegger, réside les trois quarts de l’année sur Ajaccio, Aiacciu dans le texte… et oui, en corse tout fini par se savoir… (rires) Qu’il se rassure, nous ne lui proposerons pas un remake du film Highlander et sa fameuse tirade : ‘il ne doit rester qu’un …’ (rires ). Plus sérieusement nous avons envisagé sa présence aux projections prévues, courant décembre 2020 sur l’île. En tout cas l’invitation est lancée !
Est-ce un avantage ou un inconvénient de connaitre les dialogues du film par cœur depuis des années ? Selon-moi c’est un peu des deux, un avantage car il y a déjà une partie du travail d’appropriation qui a été fait, mais aussi un inconvénient, car il y a risque de singer les répliques cultes.
Jean-Yves : Je pense que c’est plutôt un avantage car ces répliques cultes de la Pop Culture font partie d’un fond commun. Au final de ‘I’ll be back‘ à ‘Je reviendrai‘ en passant par ‘Aghju da vultà‘ c’est toujours la même résonnance que ces phrases génèrent en nous à l’écran et c’est également dû en grande partie au charisme d’Arnold Scharzenegger ne l’oublions pas.
André : L’avantage de connaître par cœur certaines scènes est certain. Si toutefois il y un respect total de l’œuvre cinématographique. Pour ma part il était clair et dès les premiers enregistrements de servir au mieux le film, ainsi que le jeu d’acteur d’Arnold Schwarzenegger. Nous voulions un doublage le plus juste possible dans l’interprétation et éviter la parodie, ni trop près ni trop loin de l’original, tout en affirmant notre propre identité. Je pense que nous avons réussi.
Fiura Mossa double Terminator 2 : Le comédien Philippe Ambrosini (chemise blanche) la voix Corse du Docteur Silberman, Sylvain Giannecchini, Jean-Yves Casalta vice-président de l’association Fiura Mossa (t-shirt vert) et assis Petru Alfonsi et l’ingénieur son Christophe Mac Daniel (avec la casquette). Crédit Photo : Fiura Mossa.
Dis-nous en plus sur les acteurs qui prêtent leur voix aux autres personnages principaux :
Jean-Yves : Sarah Connor est doublée par Laetitia Damiani qui a fait travail monumental. C’est de loin le personnage le plus difficile à jouer dans le film. C’est une comédienne amatrice qui a joué dans de nombreuses pièces de théâtre et c’est sa première expérience en post synchronisation.
Pour John Connor je te confirais que le choix a été plus difficile pour moi puisqu’il s’agit de mon fils, Andria Casalta. Suite au casting il a été retenu – de la manière la plus objective qui soit, je tiens à le préciser – avec un autre enfant Clemente Geronimi. Tous deux ont une bonne maîtrise du corse et une expérience en doublage. Une session avait été prévue pour les départager mais le confinement est arrivé et c’est finalement lui qui a imposé Andria. Les quelques deux mois et demi enfermés à la maison ont été mis à profit pour travailler le rôle, quant à Clemente il prête sa voix à Tim, l’ami de John.
Miles Dyson est incarné par Eric Barre qui est à la fois chanteur dans le groupe polyphonique Tavagna et également comédien. Le Docteur Silberman est joué par Philippe Ambrosini qui est le seul comédien professionnel de la troupe. Malgré une longue et riche carrière au cinéma c’est sa première expérience de doublage en langue corse et nous avons été ravis de pouvoir travailler avec lui.
Le T1000 est doublé par Régis Martini avec qui nous avions déjà collaboré sur deux projets de film d’animation. Janelle Voight est doublé par Marine Raffaelli qui est une des grandes révélations du casting puisque n’ayant aucune expérience théâtrale elle nous a gratifiés d’une prestation sublime avec également une maîtrise du corse parfaite. Enfin Todd Voight est joué par Jean-Philippe Salge qui est un acteur culturel depuis de nombreuses années au sein du groupe l’Arcusgi.
De façon plus globale, c’est en tout 52 personnes qui participent au projet et je profite de ton interview afin de les remercier pour leur implication et leur sérieux.
A cette heure, où en est le processus des enregistrements des voix ?
Jean-Yves : À l’exception de Sarah et John Connor, tous les autres rôles principaux ont terminé leurs enregistrements. Sur la première moitié du film les rôles secondaires et les figurants ont quasiment tous été enregistrés. On peut donc considérer qu’on en est à un peu plus de la moitié du film. Quand tout aura été enregistré, on procèdera à un visionnage afin d’évaluer la nécessité de reprendre telle ou telle tirade.
André : Pour ma part et comme je disais précédemment, la voix du Terminator est posée. Nous attendons avec impatience les premiers visionnages et aviserons sur d’éventuelles retouches. À suivre donc !
Si vous deviez choisir une réplique culte du film, laquelle serait-ce ?
Jean-Yves : Et bien je dirais : ‘Dammi i to panni, e to botte è a to mottocicletta‘. (‘Je veux tes vêtements, tes bottes et ta moto‘) dans la scène d’ouverture avec le biker ainsi que la réponse de ce dernier : ‘Ti sìscurdatu di dì per piacè !‘ (‘Tu as oublié de dire ‘S’il te plaît’‘).
André : Je choisirais la réplique : ‘i to tutori sò morti’. (Traduction littérale : ‘Tes tuteurs sont morts‘ ; Réplique en VF : ‘Tes parents adoptifs sont morts‘) réponse glaciale du Terminator, quand celui-ci comprend et informe John Connor, que ses tuteurs sont condamnés. Scène culte !
Andria, pour notre plus grand plaisir, peux-tu nous faire un ‘Aghju da vultà’ (I’ll be back / Je reviendrai) ?
Andria :
La version Corse de Terminator 2 sera-t-elle éditée en DVD / Blu-Ray ? Est-ce que la piste Corse sera disponible sur les futures éditions du film en France ?
Jean-Yves : Le film sera diffusé au cinéma dans un premier temps avec des séances tout public et d’autres que nous organiserons pour les scolaires (collèges et lycées). Puis la version corse sera éditée dans un combo DVD/Blu-Ray qui sera tiré à 1000 exemplaires.
Un collector de plus en vue pour les fans du film qu’il sera possible de se procurer dans les commerces en Corse ou sur notre site www.fiuramossa.com et sur la boutique de notre page FaceBook.
Si l’occasion se présentait, aimeriez-vous doubler en Corse les autres films de la franchise ?
Jean-Yves : Bien évidemment et ce serait en toute logique le premier Terminator !
André : Le tout premier opus bien sûr et peut-être le troisième ‘Le Soulèvement des Machines’ une trilogie en coffret collector en perspective, qui sait ?
Hormis Terminator, y-a-t-il un autre film culte que l’Association souhaiterait doubler ?
Jean-Yves : Un tas d’autres mais il serait assez compliqué de les citer tous.
La prochaine étape pourrait être le doublage d’un jeu video AAA ?
Jean-Yves : Pourquoi pas ? La langue corse doit être présente partout et d’abord sur les supports plébiscités par les jeunes. Pour marcher il faut avoir un pied en arrière, vers nos racines et la culture que nous ont léguées nos anciens, et un autre en avant vers le monde moderne.
André : Oui, ce serait la suite logique, les outils sont là, les volontés (politiques et associatives), les compétences, l’envie de transmettre, l’envie d’apprendre. Une langue pour vivre et avancer a besoin impérativement d’être en résonance avec son histoire, son présent pour ainsi entrevoir l’avenir. Mais pas seulement. Je pense qu’il faut également dépassionner certains débats linguistiques, éviter les dogmes, rendre la langue ludique, moderne, sexy quoi !!N’oublions pas que c’est une demoiselle… (rires).
Nous sommes arrivés à la fin, encore merci Jean-Yves, Andria d’avoir accepté de me parler de votre Association et du doublage de Terminator 2, à bientôt.
Jean-Yves : Merci à toi et à très bientôt. Hasta la vista baby !
André : Ce fut un plaisir, merci à toi. ‘À prestu !‘ ‘à bientôt !‘ (Evidemment avec la voix du T 800 modèle 1,0,1. de CyberdyneSystems Corporation).
Propos recueillis par Thomas O. pour Eklecty-City.fr, qui remercie Jean-Yves Casalta vice-président de l’association Fiura Mossa, en charge de la direction artistique du doublage Corse de Terminator 2, et Andria Dominici, la voix Corse d’Arnold Schwarzenegger, pour s’être prêtés au jeu de cette interview.
Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Mérouan et de sa chaîne Youtube Le Coin des Joueurs.
Alors que Carole Quintaine et Julien Chièze – qui a atteint récemment les 500 000 abonnés – font les beaux jours de l’actualité jeu vidéo sur Youtube, intéressons à un autre créatif qui mérite également de figurer dans vos abonnements. Avec Le Coin des Joueurs, Mérouan parle de l’actualité, mais aussi et surtout analyse les tréfonds du jeu vidéo le tout avec des interviews exclusives. Rencontre avec un joueur qui parle aux joueurs.
Bonjour Mérouan,merci de participer à notre chronique ‘Adopte un Créatif’. Dans le cas où il y aurait des internautes ignorant ton actualité peux-tu te présenter et nous rappeler ton parcours ?
Mérouan : Bonjour, merci à toi pour la proposition d’interview. C’est un plaisir de répondre à tes questions. Je m’appelle Mérouan, j’ai 24 ans et je suis diplômé d’un BTS en Marketing. J’ai depuis quelques mois le statut d’auto-entrepreneur. Je suis le créateur de la chaîne YouTube Le Coin des Joueurs et me suis lancé il y un peu plus de trois ans dans cette aventure. Concernant les collaborations, j’ai déjà eu la chance de faire des vidéos régulières avec les Share Players, Julien Chièze ou encore Carole Quintaine, et je fais souvent des enregistrements avec Hans Godard, un bon ami qui est aujourd’hui à Blizzard mais qui travaillait autrefois chez Naughty Dog.
Quelle est ta toute première expérience avec internet ?
Mérouan : Alors figures-toi que je n’ai eu Internet que très tardivement à la maison. Je devais avoir 16 ans.Donc en tant que réel utilisateur, mes premières expériences avec Internet sont survenues assez tard. En revanche, je l’utilisais bien avant, dès que j’en avais l’occasion, pour chercher des soluces de jeux ou encore regarder en boucle des bandes-annonces des titres que j’attendais le plus.
Présente-nous ton univers :
Mérouan : Sur ma chaîne, je réalise des analyses, des rétrospectives, des tests, des vidéos narratives ou encore des interviews avec des créateurs et créatrices de jeux vidéo dans une émission qui s’appelle Les Artistes du JV. Depuis la rentrée 2020, j’ai décidé de me lancer pleinement dans ma chaîne en lançant des formats d’actualité pour traiter des consoles Next-Gen à venir prochainement. Ce que j’aime faire avant tout, c’est de me diversifier au maximum.
Concernant le pseudo que je voulais donner à ma chaîne, je savais déjà une chose : je ne voulais pas qu’il porte mon nom. Il fallait quelque chose de percutant auquel gens pouvaient potentiellement s’identifier. Ensuite, je savais aussi que je voulais un nom qui soit compréhensible à la première lecture. Et enfin, je cherchais quelque chose qui fasse référence à un lieu virtuel où des joueurs pourraient se retrouver à travers mes vidéos. C’est plus ou moins comme ça qu’est né Le Coin des Joueurs je pense.
Qu’est ce qui t’a donné ta vocation ?
Mérouan : Indéniablement, c’est ma passion pour le jeu vidéo. Je pense que plusieurs jeux ont été les éléments déclencheurs de cette vocation. Je pense à The Last of Us, Donkey Kong Tropical Freeze, Super Mario 3D World (oui, j’aime énormément la Wii U), Uncharted 4… Ce sont des titres qui m’ont réellement fait comprendre que je n’avais plus envie de garder pour moi ce que je pouvais partager, à savoir cette passion pour le jeu vidéo. Des jeux qui m’ont fait aimer ce média plus que je l’aimais déjà auparavant.
D’ailleurs, pour la petite anecdote, le dernier jeu que j’ai terminé avant de commencer à écrire est Final Fantasy XV. C’est un titre avec plein de défauts, mais que j’ai énormément apprécié pour tout un tas de raisons (la musique y est pour beaucoup). Je pense qu’il a aussi indirectement joué un rôle dans cette envie de me lancer, étrangement.
Quelle a été la réaction de tes proches ?
Mérouan : Cela a été globalement bien perçu, même si pas toujours bien compris. Je dirai que ma mère s’est posée beaucoup de questions quand elle voyait que je consacrais autant de temps à l’élaboration et au développement de ma chaîne. Mais mes proches sont ravis que j’essaye de faire de ce que j’aime le plus une activité qui pourrait, je l’espère, devenir un jour une profession. Cela est souvent plus long lorsque l’on se lance dans notre passion. Et même si l’on peut parfois penser qu’aimer est synonyme de facilité, c’est en réalité très souvent l’inverse. Mais l’apport derrière n’en est que décuplé donc je suis persuadé que ça en vaut la peine.
Quelle sont tes sources d’inspiration ?
Mérouan : Mes sources d’inspiration ne sont pas nécessairement liées, du moins pas uniquement, aux jeux vidéo. Étant un grand fan de Dragon Ball, et de mangas par extension, Akira Toriyama est placé très haut dans mon estime. J’ai énormément de respect pour lui et le mythe qu’il a su créer avec son œuvre et m’en inspire forcément d’une manière ou d’une autre depuis l’enfance.
Mais dans le monde du jeu vidéo, il y a des personnes des j’apprécie énormément et qui m’ont inspiré à un moment donné. Je pense au regretté Satoru Iwata pour la bienveillance qu’il dégage, Bruce Straley pour ses compétences de manager qui ont porté Naughty Dog sur la décennie passée, Hideo Kojima pour ses envies de vouloir trahir et surprendre ou encore Eiji Aonuma pour sa carrière, mais aussi pour ce qu’il a apporté à Zelda Breath of The Wild. Ce jeu en lui-même est déjà une source d’inspiration à vrai dire.
Quelle est ta première expérience de tournage ? Comment cela s’est passé ?
Mérouan :Je vais ici parler uniquement de tournage sur plateau et non de tournage à la maison.
Ma toute première expérience de tournage s’est faîte en novembre 2017, c’était à la Paris Games Week, avec des amis qui m’ont invité sur leur chaîne pour réaliser la preview de Biomutant. C’était une expérience particulière au début. Je dois reconnaître que je n’étais pas très à l’aise alors que j’avais juste à partager mon avis. Donc ça s’est très bien passé dans l’ensemble mais j’étais totalement stressé malgré le fait que cela faisait déjà plusieurs mois que j’avais lancé ma chaîne.
Quel a été ton meilleur moment de réalisation ? Le pire ?
Mérouan : Cette fois nous sommes deux ans plus tard, à la PGW 2019, et les choses ont bien changé. J’ai décidé de monter une petite équipe pour aller couvrir l’événement, accrédité par le salon, au nom de ma chaîne personnelle et de revenir avec le maximum de previews. On a fait 17 plateaux et j’en étais l’animateur. Ces 17 previews sur 3 ou 4 jours sont mes meilleurs souvenirs de tournage. Une expérience riche, unique et surtout inoubliable tant c’était intense et amusant à la fois. Pour donner un exemple, on faisait des tournages sur toute la journée, en plus d’essayer les jeux, et je passais mes nuits à faire le montage des vidéos tournées dans la journée. Je ne dormais quasiment pas plusieurs nuits d’affilée mais c’est paradoxalement parmi mes meilleurs souvenirs.
Pour ce qui est du pire, je dirai que c’est le jour où j’ai décidé de me lancer pour la toute première fois dans un format face-caméra. C’était il y a deux ans et demi. Je ne connaissais pas encore l’exercice du face-cam et j’ai dû recommencer une centaine de fois avant d’avoir la bonne prise, car je tenais absolument à le faire en one-shot. C’était relativement frustrant et réellement décourageant.
Quelles sont, dans tes vidéos, celles qui te semblent les plus intéressantes, qui te tiennent le plus à cœur, et pourquoi ?
Mérouan : A cette question, il y a deux réponses que je ne peux départager.
Les premières sont les Artistes du JV. Ce sont les interviews que je propose aux côtés de personnes travaillant dans l’industrie du jeu vidéo. Ce format est important pour moi car il a en grande partie façonné la ‘ligne éditoriale’ de ma chaîne. Il est celui qui m’a sorti de ma zone de confort et qui a doucement mais sûrement cassé ma timidité. Il m’a attribué des compétences que je n’avais pas. J’ai beaucoup appris sur le milieu grâce à ces interviews et je suis heureux de savoir qu’elles puissent en apprendre aux autres. Et j’ai surtout pu faire des dizaines de rencontre grâce à ça.
Ensuite, il y a les Récits de jeu vidéo. C’est un format narratif, et donc écrit, dans lequel je mêle l’aspect personnel à l’œuvre que je décide de traiter à travers les émotions ressenties, la nostalgie, et même la poésie parfois. C’est le format qui me prend le plus de temps et demande le plus de travail que ce soit à l’écriture, à l’enregistrement et au montage. Mais la satisfaction à la fin n’en est que plus grande. J’ai eu l’occasion de produire quatre récits à ce jour : un sur la saga Uncharted, un sur The Witcher 3 découpé en 3 parties, un sur Life is Strange 2 et enfin le dernier consacré The Last of Us Part II.
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux jeunes créatifs qui souhaitent partager leurs univers sur la toile ?
Mérouan : Ce que je pense, c’est qu’il est très important de ne pas avoir peur de partager cet univers aux autres dans son intégralité. J’entends par là que si vous êtes quelqu’un d’imaginatif, exprimez votre créativité de plein de façons. Ne vous enfermez pas dans des formats. Osez des choses, partagez-les. Diversifiez-vous et montrez l’étendue de ce que vous savez faire en prouvant votre polyvalence. C’est votre univers. Si les autres ne le conçoivent pas, alors ils passeront leur chemin. Il ne faut pas avoir peur de la perception des autres sur votre travail.
Si tu pouvais adresser un message à toi-même à l’âge de 10ans, lequel serait-ce ?
Mérouan : Je lui dirai sans aucun doute se de se détendre un bon coup. J’étais un enfant/adolescent d’une timidité maladive. Donc 14 ans plus tard, j’aurais sans doute pas mal de choses à lui dire et à lui montrer pour l’apaiser. Je pense que ça l’aiderait beaucoup, même s’il n’y croirait sans doute pas trop.
Que ferais-tu avec un budget digne d’un blockbuster ?
Mérouan : Je réaliserai sans aucun doute une œuvre autour du Chevalier Noir. Ce n’est pas une blague, j’ai plein d’idées. Mais bon, il manque juste le budget…
Et si je devais créer quelque chose de plus personnel, je sais déjà que ça se déroulerait dans un univers féerique, saupoudré d’une ambiance médiévale. Je n’ai encore malheureusement jamais eu l’occasion de jouer à la saga Fable mais je pense que ça serait relativement proche dans l’esprit.
Nous faisons appel à ton esprit créatif. A toi de nous proposer quelque chose et de commenter.
Mérouan : Je vous partage quelque chose d’assez personnel. Quand j’étais étudiant, je gribouillais/dessinais souvent quand je m’ennuyais un peu en cours (même en dehors d’ailleurs). Et voici le dernier dessin que j’ai eu l’occasion de faire en classe. Un petit Son Goku, l’ange gardien de mes heures d’ennui. C’était en 2016, un lundi ou un mardi matin en cours de Culture Générale. Vous savez (presque) tout.
P-S : Ce n’est pas bien de dessiner en cours, faut écouter le professeur. Donc faîtes ce que je dis et pas ce que je fais, cela vaudra mieux pour votre avenir.
Tu le sais, notre thématique est la Pop Culture. Que signifie pour toi la culture populaire ?
Mérouan : C’est assez classique comme définition mais pour moi la culture populaire c’est ce qui englobe toutes les formes de divertissement/créations artistiques qui ont une résonance particulière auprès d’un grand nombre de personnes. Elle peut bien entendu prendre plusieurs formes comme la musique, le cinéma, les mangas ou encore les jeux vidéo.
Quelles sont tes œuvres de référence dans la Pop Culture ?
Mérouan : Je vais essayer de n’en citer qu’une seule par domaine afin de rendre l’exercice encore plus complexe.
Cinéma : The Dark Knight, de Christopher Nolan
Série : The Walking Dead (jusqu’à la Saison 5)
Jeux vidéo : The Last of Us de Naughty Dog (pour sa dimension cinématographique et ce qu’il a apporté au genre)
Musique : Linkin Park (parce que c’est une partie de ma jeunesse et de mon adolescence)
Et quelles sont tes attentes ?
Mérouan : Je n’ai pas d’attentes particulière sur la musique ou encore les séries. Mais concernant le cinéma, appréciant le travail de Denis Villeneuve, je suis très curieux de découvrir son prochain film, Dune (fraîchement reporté d’ailleurs). J’attends aussi énormément la suite de Spider-Man Into the Spider-Verse, prévue actuellement pour 2022.
Et en jeux vidéo, je pense que les attentes sont très nombreuses donc je vais me contenter de n’en citer que quelques-unes : Cyberpunk 2077, The Wolf Among Us 2, Spider-Man Miles Morales, le reboot de Fable (cela fait des années que j’ai envie de découvrir cette série) et bien évidemment Zelda Botw 2.
Un mot sur ton actualité ? Tes projets en cours ?
Mérouan : Alors sur ma chaîne, j’ai de nombreuses interviews en préparation. Mon but est vraiment de remettre ce format au cœur des contenus que je propose. Mais je ne peux pas encore dévoiler qui seront mes prochains invités. Et sinon il y a au minimum deux vidéos par semaine depuis la rentrée.
Il y a bien évidemment d’autres projets mais je ne peux pas encore en parler, notamment parce qu’ils n’engagent pas que moi.
A quel autre créatif souhaiterais-tu voir poser ces questions ?
Mérouan : Alors ils ne sont pas méconnus, mais les Share Players sont ‘décalés’ et pourraient rendre cette interview amusante. Yannick et Roman, les fondateurs de la chaîne, sont les premiers à m’avoir donné la parole pour m’aider à me lancer. Donc symboliquement, je me dois de les mentionner aujourd’hui.
As-tu beaucoup de retour des personnes qui te suivent ?
Mérouan : Oui, clairement. Je m’estime vraiment très chanceux de ce point de vue-là. Que ce soit sur mes réseaux sociaux ou même sur ma chaîne, les retours, en plus d’être nombreux, sont bons. Et c’est à mon sens le plus important.Mais surtout, j’ai de bons et nombreux retours sur les différents formats que je propose. Et ça me touche beaucoup parce que je sais que ce n’est malheureusement pas toujours le cas sur YouTube.
Tes abonné(e)s te soufflent des idées parfois ?
Mérouan : Alors c’est une question intéressante car cela peut arriver, oui. Mais hormis lorsqu’ils s’agit de commentaires sur les choses que je peux corriger/améliorer, j’essaye de ne pas trop prendre en compte les idées extérieures. En fait, j’estime que l’une des raisons pour laquelle des personnes peuvent vouloir consommer des contenus, c’est justement pour la découverte. Je me dis que si je commence à créer des vidéos qui sont le fruit d’idées qui ne sont pas les miennes, aussi excellentes soient-elles bien-sûr, cela pourrait perdre son charme. En tant qu’utilisateur, j’aime que des créateurs me surprenne à travers leurs contenus. Que leurs vidéos soient le fruit de leurs idées, et pas une retranscription des idées des autres. Ce n’est que mon avis cela dit. Je respecte totalement celles et ceux qui, au contraire, préfèrent être en phase avec les demandes de leurs abonnés. Cela a aussi bien entendu tout légitimité.
Que voudrais-tu dire à tous tes abonné(e)s et aux prochains ?
Mérouan : La première chose, c’est de les remercier. Cela peut paraitre évident mais voir que de plus en plus de personnes commencent à suivre mon travail est une énorme source de motivation. Ensuite, je dirai que c’est de continuer à interagir comme ils le font et de ne pas hésiter à le faire pour les futurs abonnés. Je trouve que l’interaction à distance entre personnes qui aiment et partagent une passion est la meilleure chose que YouTube puisse proposer.
Pour terminer, quelle question aurais-tu souhaité que l’on te pose et qu’aurais-tu répondu ?
Mérouan : J’aurais bien aimé que tu me demandes quelle question je n’aurais pas souhaité que l’on me pose. Et la réponse aurait été…
Voyons, si je ne veux pas qu’on me la pose, alors je ne la dévoilerai pas. Je te vois avec tes techniques pour me faire parler. (Rires)
Encore une fois merci Mérouan d’avoir participé à Adopte un Créatif.
Mérouan : Merci à toi surtout. J’ai adoré répondre à tes questions, même si je parle beaucoup trop. Elles étaient très pertinentes, pour certaines amusantes et surtout très originales. Ça me fait plaisir de pouvoir replonger dans le passé, même s’il n’est pas si lointain encore. Je te souhaite le meilleur et au plaisir de remettre ça dans quelques années.
Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Jessica, fondatrice et rédactrice en chef du blog Bon Chic Bon Genre.
Pour cette nouvelle interview, j’ai souhaité mettre en lumière le travail de Jessica et son blog Bon Chic Bon Genre. On ne le dit jamais assez, les blogueurs sont également des créatifs. J’ai découvert l’univers de Jessica par l’intermédiaire de la ‘s’horrorité‘, en résumé des créatrices de contenus passionnées par le cinéma d’horreur et d’épouvante. Avec Bon Chic Bon Genre, Jessica analyse le cinéma via deux notions, le féminisme et l’horreur. Clairement, elle propose du contenu et des analyses de qualités qui méritent que l’on s’y attarde. Rencontre avec une cinéphile, blogueuse, gameuse, féministe, mère.
Bonjour Jessica, merci de participer à notre chronique ‘Adopte un Créatif’. Dans le cas où il y aurait des internautes ignorant ton actualité peux-tu te présenter et nous rappeler ton parcours ?
Jessica : Je suis blogueuse cinéma, je tiens le site Bon Chic Bon Genre et j’aborde le cinéma sous le prisme du féminisme. Je suis blogueuse depuis plus de 10 ans, mais ce site a un peu plus d’un an.
Auparavant j’avais des blogs plus généralistes sur le cinéma et le cinéma de genre. J’ai une formation dans la stratégie digitale, donc rien à voir !
Quelle est ta toute première expérience avec internet ?
Jessica: Ça remonte à loin… Caramail peut être ! Mince je suis vieille…
Présente-nous ton univers :
Jessica : Il y a quelques années, j’ai un peu laissé en stand by le précédent blog que j’avais. Je me suis beaucoup investie dans 3 associations féministes où j’ai beaucoup déconstruit mon regard, l’histoire de mon pays, les systèmes structurels de domination. J’ai aussi organisé des projections, lu, collé des affiches, participé à des actions de rue…
Et mon regard sur le cinéma a forcément évolué aussi. D’autant que depuis #metoo, on entend plus de voix qui déconstruisent la manière dont les personnages féminins sont représentés.
Mais j’ai toujours peu vu/lu des travaux qui s’intéressent à la manière dont le cinéma de genre traitent les femmes, les minorités, etc… Comme c’est un cinéma souvent violent ou angoissant, il est admis que les personnages soient maltraités, et on se pose peu la question du genre. Alors que rien qui nous est montré dans une mise en scène est anodin.
Donc j’ai eu envie de croiser mon regard de féministe et de cinéphile de genre.
Pour le nom, j’ai repris la fameuse expression BCBG pour la détourner. Le cinéma de genre est souvent méprisé, surtout en France, alors qu’il est souvent bien plus respectable dans ses intentions que d’autres films d’un genre plus admis, comme la comédie française. Et puis comme je traite de genre et de cinéma de genre, je voulais garder le terme ‘genre’ pour être rapidement identifiable.
Qu’est ce qui t’a donné ta vocation ?
Jessica : Depuis petite j’aime le cinéma, c’est un art que je trouve complet (image, musique, couleurs, structure…). Mon frère m’a initié à Alien et Terminator quand j’avais une dizaine d’années et ces univers m’ont fascinées. J’étais trop jeune pour comprendre tous les enjeux, mais je voyais bien que ce cinéma avait des choses très différentes et intéressantes à dire.
Et comme beaucoup de gens, le cinéma m’aide à comprendre mon environnement, ma vie, les gens… je serais perdue sans !
Quelle a été la réaction de tes proches ?
Jessica : J’écris depuis longtemps donc ils n’ont pas été surpris. Ils sont contents de voir que ce blog m’amène à faire des rencontres, être invitée dans des festivals…
Quelle sont tes sources d’inspiration ?
Jessica : Je trouve mes idées d’articles quand je remarque un détail qui me pose question. Par exemple, quand j’ai vu Evil Dead (le remake, mais c’est pareil dans l’original), le perso féminin est violé lors de sa possession par l’entité maléfique via une branche. J’ai beau adoré Evil Dead, cette scène n’a pas beaucoup de sens, et surtout je me suis demandée si la représentation d’un homme ou d’une femme possedé.e, était traitée de manière différente dans les films de possession. Et si oui, comment ? C’est comme ça que j’ai commencé à faire une liste de films, à regarder, et à analyser.
Pour moi c’est important de lier les films à un autre que du cinéma, parce que celui ci s’inscrit dans une société et/ou son histoire.
Donc je connecte toujours le cinéma à des livres, podcasts, émissions, histoire…
Quelle est ta première expérience de créatif sur le web ? Comment cela s’est passé ?
Jessica : J’ai toujours écrit sur mes blogs. J’ai l’opportunité d’écrire pour d’autres mais mon blog me prend déjà beaucoup de temps. Et je tiens vraiment à garder mon blog tout simplement pour avoir la totale liberté d’écrire ce que je veux, quand je veux. Mais c’est sûr que ça demande plus de taf de manière générale (faire des recherches, écrire, gérer le site, communiquer…).
Après comme je me nourris et m’intéresse aussi beaucoup au travail des autres, je me suis dis que ça serait intéressant de faire des interviews de personnes qui tiennent des chaînes/blogs/podcasts. Mais quand j’ai vu à quel point les femmes étaient soit invisibilisées, soit avaient le syndrome de l’imposteur et osent moins se montrer, j’ai décidé d’interviewer uniquement des femmes.
Quel a été ton meilleur moment ? Le pire ?
Jessica : Mon meilleur moment je crois c’est quand Mylène de la chaine/blog Welcome To Prime Time Bitch a décidé de réunir des femmes fan d’horreur, qu’on appelle maintenant la S’horrorité (avec Demoiselles d’Horreur, Leo Lurillo et Laura Fait Genre).
Je n’aurais jamais pensé à m’allier comme ça sans se connaître et j’ai trouvé ça très sympa. Surtout que c’est arrivé pendant le 1er confinement, et ça a été l’occasion de démarrer des lives, de s’organiser pour prendre un peu de place.
Je n’ai pas de pire souvenir, il y a toujours parfois des désagréments, mais je tiens un blog, pas une chaîne, du coup je suis plus à l’abri quand même.
Quelles sont, dans tes publications, celles qui te semblent les plus intéressantes, qui te tiennent le plus à cœur, et pourquoi ?
Jessica : Les dossiers que j’écris sur les représentations. Pour le moment, j’en ai fait un sur la possession, la femme forte, la psychophobie. C’est très long à chaque fois mais très enrichissant.
C’est toujours intéressant de voir les thèmes abordés dans des sagas, comment les films évoluent, selon les réalisateur-rices…
Tenir un blog, c’est aussi des rencontres virtuelles / réelles. Quelles sont celles qui t’ont le plus marqué ?
Jessica : Incontestablement les femmes de la s’horrorité dont je parlais plus haut. J’ai eu l’occasion de rencontrer en vrai Mylène, Eleonore et Judith. Mais en dehors de cette s’horrorité j’ai aussi rencontré Sam de Vidéodrome, Clem de Cinéma&Politique. Et Océane du podast Lemon Adaption Club, EK de Vidéo 47, Raphaëlle de SweetBerry… C’était vraiment super, de belles rencontres, ce sont des femmes dont j’apprécie énormément le travail et qui proposent toutes des choses différentes et complémentaires.
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux jeunes créatifs qui souhaitent partager leurs univers sur la toile ?
Jessica : Avant de se lancer, il faut se demander de quoi on veut parler, sous quel angle et quel format. Il y a beaucoup beaucoup de blogs, chaînes, et même le podcast a explosé. Alors il faut apporter un contenu qui se différencie pour essayer d’être visible.
Ça passe par définir une stratégie éditoriale, quel que soit le support. De cette manière, le public saura identifier rapidement ce que la personne propose, et la suivra pour un contenu précis. Il y a tellement de contenu à dispo, qu’il faut pouvoir vite être identifié.e.
Si tu pouvais adresser un message à toi-même à l’âge de 10ans, lequel serait-ce ?
Jessica : Fais toi plus confiance ! (Mais je me le dis aussi maintenant…)
Que ferais-tu avec un budget digne d’un blockbuster ?
Jessica : Je le donnerais à Julia Ducournau pour qu’elle tourne un film sur Poison Ivy en militante écologique (et non en éco terroriste!), en mode Woman At War. Avec Harley Quinn qui vient filer un coup de main.
Nous faisons appel à ton esprit créatif. A toi de nous proposer quelque chose et de commenter.
Jessica : Je dessine régulièrement des perso issus de l’horreur pour mon compte Instagram. Alors voici le dernier en exclu totale qui sera intégré dans un prochain feed.
Tu le sais, notre thématique est la Pop Culture. Que signifie pour toi la culture populaire ?
Jessica :Je vais dire des choses déjà dites 100 fois mais c’est une culture qui est accessible en termes de concepts, d’images, et qui font appel à des émotions ou des vécus assez universels. Elle peut donc peut rassembler des personnes ayant un background très différent. Sous la forme en apparence légère, la pop culture peut aborder des thèmes très pertinents (le racisme pour les X-Men, le consumérisme pour les Gremlins…)
Quelles sont tes œuvres de référence dans la Pop Culture ?
Jessica : Je suis une grande fan d’Harley Quinn. Elle est passée par beaucoup de représentations différentes de son style que ça soit dans les comics, dessins animés, films. C’est un personnage féminin très maltraité par les hommes, et en particulier le joker. Elle représente beaucoup de formes de violences conjugales (physique, sexuelle, morale, verbale). J’aime beaucoup sa personnalité exacerbée, qui se soucie peu de ce qu’on pense d’elle, qui va au bout de son délire. Elle a une sexualité libérée et libre.
Je trouve qu’elle représente bien tous les aspects qu’une femme peut être. Sous emprise, violentée, déterminée, sexuellement active, combattive… Bird Of Prey représente bien cet état d’esprit, sans la prendre pour une folle décérébrée. (c’est une psychiatre à la base).
Sinon j’aime beaucoup Batman, pas tellement pour son côté justicier, mais pour sa grande solitude et sa noirceur qui en fait un superhéros proche des antagonistes. Et puis j’ai grandi avec les films de Spielberg aussi, E.T, Les Dents de la Mer, Jurassic Park et surtout la belle époque de Burton. Ce sont des films que j’ai toujours plaisir à regarder.
Et quelles sont tes attentes ?
Jessica : J’ai hâte de voir le Candyman de Nia DaCosta dont j’ai beaucoup aimé le 1er film, Little Woods. Je suis aussi curieuse de voir son Captain Marvel 2, même si le perso m’intéresse moins. Halloween Kills et prochain Scream évidemment.
J’ai hâte de voir Teddy, le prochain film de genre français de loup garou ! Mais aussi le prochain Aja qui sera en français, et sur Netflix. Et bien sûr Titane, de Julia Ducournau.
Un mot sur ton actualité ? Tes projets en cours ?
Jessica : Je commence tout juste à visionner des films de loups garou pour comprendre la représentation des loups garou selon le genre. J’adore les films de loup garou mais j’ai surtout eu l’idée de ce dossier en regardant Cursed de Wes Craven. C’est l’un des rares films où il y a à la fois une femme et un homme loup garou. Et les effets de cette transformation sont très différents.
A quel autre créatif souhaiterais-tu voir poser ces questions ?
Jessica : La chaîne The Plot Point. Elle décortique la manière dont les scénarios et personnages sont écrits et c’est passionnant. Elle n’a pas assez d’abonné.es !
As-tu beaucoup de retour des personnes qui te suivent ?
Jessica : Oui, parfois en commentaires mais surtout sur les réseaux sociaux. Surtout quand par rapport aux dossiers, c’est un contenu qu’elles ne trouvent pas forcément ailleurs je pense.
Tes abonné(e)s te soufflent des idées parfois ?
Jessica : Sur des idées de films oui ! J’ai découvert beaucoup de films de cette manière.
Que voudrais-tu dire à tous tes abonné(e)s et aux prochains ?
Jessica : Un grand merci d’accorder un peu de temps et d’intérêt à mes articles parfois très long ! Que chaque lecture est importante pour moi, et surtout j’espère contribuer à proposer un regard un peu différent sur le cinéma de genre.
Un petit message pour ta sororité de l’horreur ? (Rires)
Jessica : Je suis contente de vous avoir rencontrées, c’est encourageant de voir cette solidarité, dans cet univers compétitif. Et j’ai beaucoup appris à vos côtés donc merci beaucoup ! J’espère que cette s’horrorité va s’étendre !
Pour terminer, quelle question aurais-tu souhaité que l’on te pose et qu’aurais-tu répondu ?
Jessica : Mon péché mignon (qui n’est pas péché en fait) : le chocolat. J’adore parler de ma passion du chocolat.
Encore une fois merci Jessica d’avoir participé à Adopte un Créatif.
Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Clémentine et de sa chaîne Youtube ‘Cinéma et Politique’.
Après la création d’une chaîne Youtube consacrée aux sciences humaines et sociales, Clémentine a lancé la chaîne ‘Cinéma et Politique’ avec laquelle elle appréhende les films avec une approche politique. Avec ses vidéos, elle décode les coulisses de production d’un film via son contexte historique, social, politique, économique ou encore culturel. Rencontre avec une cinéphile fan d’Indiana Jones et de Faites entrer l’accusé.
Bonjour Clémentine, merci de participer à notre chronique ‘Adopte un Créatif’. Dans le cas où il y aurait des internautes ignorant ton actualité peux-tu te présenter et nous rappeler ton parcours ?
Clémentine : J’ai crée ma première chaîne YouTube en 2017, Le Labo de la Légiste qui était plus axée sciences humaines et sociales. Sur cette chaîne, j’ai un jour réalisé une vidéo sur la portée politique du western italien. Vu le succès de la vidéo, relatif à mon nombre d’abonnés sur la chaîne, j’ai décidé de créer une nouvelle chaîne, Cinéma et politique qui – comme son nom l’indique – unit en fait mes deux passions : celle qui m’accompagne depuis l’âge de 13 ans, le cinéma, et celle qui est venue un peu plus tardivement, la politique.
Quelle est ta toute première expérience avec internet ?
Clémentine : En 2001, la création de mon premier compte Caramail.
Présente-nous ton univers :
Clémentine : Ma chaîne a pour vocation d’appréhender les films avec une approche politique : c’est à dire, qu’il s’agit de considérer les films comme des objets politiques. Je tente donc de fouiller les imaginaires collectifs qu’ils véhiculent et de décrire le contexte (à la fois historique, social, politique, économique et culturel) qui entoure la production d’un film pour décoder le ou les discours politiques d’un film. Tout cela, je le fais en prenant appui sur du travail de recherche universitaire.
Qu’est ce qui t’a donné ta vocation ?
Clémentine : Je ne considère pas ma chaîne comme « une vocation ». Cette chaîne, c’est le résultat d’un parcours qui mêle intérêt pour la vidéo depuis toute petite, pour le cinéma ensuite et plus tard, pour la politique ainsi que les sciences humaines et sociales. Ma formation en audiovisuel est aussi essentielle dans ce parcours.
Quelle a été la réaction de tes proches ?
Clémentine : Pas de réaction particulière, la plupart s’en foutent ou ne sont pas au courant, d’autres s’intéressent à mon travail.
Quelles sont tes sources d’inspiration ?
Clémentine : Je n’ai pas vraiment de sources d’inspiration, en tout cas « conscientes », pour la chaîne. Pour le reste, c’est une autre histoire !
La qualité de ton écriture, le montage et la narration de tes vidéos rappellent ce que l’on peut voir sur la chaîne Arte. Le ton de la chaîne a-t-il influencé ton univers ?
Clémentine : Je ne sais pas, on me le dit souvent… Je visionne de temps en temps des documentaires sur Arte et ce, depuis pas mal d’années, donc peut-être, qu’inconsciemment, certaines choses m’ont marquée mais c’est impossible pour moi de donner des références précises.
Pour l’écriture, j’écris depuis très longtemps et quand j’étais adolescente, je tenais des blogs de cinéma donc mes compétences rédactionnelles résultent de tout ce travail. Pour le montage, je n’aime pas du tout les montages épileptiques que l’on trouve beaucoup sur YouTube. Je préfère quelque chose de plus posé. Il faut qu’on ait le temps de voir les images, les archives. Ce qu’on voit sur YouTube, c’est souvent du magma informe.
En fait, parfois, je me demande pourquoi certains ne font pas juste des podcasts tellement sur le plan visuel, les images sont juste là pour combler le vide. Un bon montage ne consiste pas à aller vite, à être super cut et à enchaîner les effets mais à bien raconter une histoire, un propos avec un bon sens du tempo qui permet de digérer les informations. D’ailleurs, mes vidéos pourraient être encore plus aérées à certains endroits.
Pour la narration, je tente d’avoir quelque chose de très structuré mais aussi de raconter des histoires pour rendre vivante et accessible l’approche politique du cinéma.
Quelle est ta première expérience de tournage ? Comment cela s’est passé ?
Clémentine : J’ai commencé à faire des « films » avec mes Playmobils quand j’étais petite. Cela s’est très bien passé car les Playmobils sont des acteurs dociles mais néanmoins, assez peu expressifs.
Quelles sont, dans tes vidéos, celles qui te semblent les plus intéressantes, qui te tiennent le plus à cœur, et pourquoi ?
Clémentine : Je dirais L’Inspecteur Harry car elle permet d’avoir un autre regard sur le film, de connaître un contexte finalement assez peu connu sur un film connu. Je trouve le contexte autour du film absolument passionnant. Je suis d’ailleurs en train de travailler sur une prochaine vidéo consacrée aux héros bodybuildés du cinéma d’action des années 80 et d’une certaine manière, elle s’inscrit dans la continuité de la vidéo sur L’Inspecteur Harry.
Ensuite, je dirais, La Bataille d’Alger car là encore, toute l’histoire autour du film est passionnante et foisonnante. En plus, ce film splendide est assez peu estimé en France.
Je trouve aussi qu’une vidéo comme celle sur le documentaire Octobre à Paris est aussi importante car elle révèle le problème de mémoire collective qu’il existe vis-à-vis de la colonisation en France.
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux jeunes créatifs qui souhaitent partager leurs univers sur la toile ?
Clémentine : C’est un peu compliqué de répondre à cette question car il faudrait vraiment voir au cas par cas en fonction des besoins, des demandes et des attentes… Je n’ai pas trop envie de balancer des trucs tartes à la crème : « persévérez », « il faut avoir foi en vous », etc., c’est un peu plus compliqué et concret.
Si tu pouvais adresser un message à toi-même à l’âge de 10 ans, lequel serait-ce ?
Clémentine : N’idolâtre personne !
Que ferais-tu avec un budget digne d’un blockbuster ?
Clémentine : Un western…
Nous faisons appel à ton esprit créatif. A toi de nous proposer quelque chose et de commenter.
Clémentine : Une photo kitsch pour rire de mon chat Petite lampe de poche (qui est la mascotte ponctuelle de la chaîne) retravaillée numériquement un peu à la manière des icônes du couple Pierre et Gilles.
Tu le sais, notre thématique est la Pop Culture. Que signifie pour toi la culture populaire ?
Clémentine : J’aurai dit au premier abord : « une culture consommée, appréciée par tout le monde », mais ce serait confondre culture populaire et culture de masse. Du coup : la ou plutôt les cultures des classes populaires, et elles sont très nombreuses !
Quelles sont tes œuvres de référence dans la Pop Culture ?
Clémentine : Indiana Jones (le héros de mon enfance), Les Dents de la mer, les films de série B italienne, Seinfeld, Tintin, Faites entrer l’accusé, Psychose, Boule et Bill, Jean Ferrat, et un tas d’autres choses !
Et quelles sont tes attentes ?
Clémentine : J’avoue ne pas être très au courant de l’actualité…
Si tu devais t’identifier à un personnage de fiction, lequel serait-ce ? Et pourquoi ?
Clémentine : Là, à l’instant T, j’ai envie de dire : Arturo Bandini, l’alter-ego de l’écrivain John Fante (La Route de Los Angeles, Demande à la Poussière, Rêves de Bunker Hill, Bandini). John Fante est mon auteur préféré et Arturo Bandini est un anti-héros très attachant : fantasque, excessif, qui bouillonne, avec ses hauts, ses bas, drôle, plein de culpabilité catholique, de paradoxes, bref, dont la vie intérieure est riche. J’adore lire ses aventures !
Un mot sur ton actualité ? Tes projets en cours ?
Clémentine : Je vais bientôt sortir les vidéos que nous avons réalisées avec la vidéaste de Videodrome : cinq vidéos pour parler de cinq films sur le travail. Ensuite, sortira la vidéo dont j’ai parlé plus haut, consacrée aux héros bodybuildés du cinéma d’action des années 80. Après, je prévois à priori de faire une vidéo sur le portrait du pouvoir policier dans le film Enquête sur un Citoyen au-dessus de tout soupçon.
Les sujets des sept prochaines vidéos sont en fait déjà prévus mais je préfère garder le suspens pour le moment.
A quel autre créatif souhaiterais-tu voir poser ces questions ?
Clémentine : Welcome To Prime Time Bitch !
As-tu beaucoup de retours des personnes qui te suivent ?
Clémentine : Oui, j’en ai plutôt pas mal même si beaucoup ont l’air d’être en sous-marin !
Tes abonné(e)s te soufflent des idées parfois ?
Clémentine : Oui mais c’est assez rare, néanmoins un des sujets choisis pour la nouvelle saison m’a bien été soufflé par un abonné…
Que voudrais-tu dire à tous tes abonné(e)s et aux prochains ?
Clémentine : Merci à toutes celles et ceux qui suivent mon travail, me soutiennent et font des dons. J’espère que les prochaines vidéos vous plairont !
Encore une fois merci Clémentine d’avoir participé à Adopte un Créatif.
A l’occasion de l’avant-première du nouveau film de Natacha Thomas, The Late Marilyn, Nephael, qui interprète la plus célèbre des golden girls à l’écran, se livre à une introspection.
Animatrice, modèle érotique, camgirl, mais aussi actrice, Nephael a plus d’une corde à son arc. Déjà à l’affiche de Blossom, Nephael est la vraie surprise de The Late Marilyn. Trop souvent réduite à sa plastique de sex symbol et d’objet de consommation, par certains esprits étroits, le parallèle entre Norma Jeane Mortenson et celle qui l’incarne devant la caméra de Natacha Thomas est une évidence.
Pour accompagner l’avant-première du film de Natacha Thomas, j’ai proposé à Nephael de se livrer à un petit travail d’introspection.
Bonjour Nephael, tout d’abord merci à toi d’avoir accepté de répondre à mes questions. A quelques heures de l’avant première de The Late Marilyn, quel est ton état d’esprit ?
Nephael : Bonjour Thomas et aux lecteurs ! Beaucoup de sentiments se mélangent, je suis à la fois excitée et impatiente que le public découvre le film, curieuse de savoir ce qu’ils vont en penser et légèrement nerveuse aussi des possibles retours. Un bon trac d’avant-première en somme !
Quelle a été ta réaction lorsque Natacha t’a proposé d’incarner Marilyn dans ses derniers jours ?
Nephael : J’étais très surprise et heureuse, j’adore travailler avec Natacha et quand je reçois un mail de sa part avec un scénario ou une idée ça me file toujours le sourire. Ensuite j’ai un peu paniqué parce que Marilyn Mornoe, quand même, ce n’est pas rien ! je me suis demandée si j’allais être à la hauteur du projet, du personnage mais j’aime les défis et si Natacha a pensé à moi pour l’incarner c’est qu’elle m’y voyait bien alors je l’ai suivi.
Aujourd’hui encore, Marilyn Monroe est trop souvent réduite à sa plastique de sex symbol et d’objet de consommation. Sur les réseaux sociaux, il arrive, trop souvent encore, que l’on te réduise à ton activité de modèle. Peut-on faire un parallèle entre la vie de Norma Jeane Mortenson et la femme qui se cache derrière Nephael ?
Nephael : Je n’irai évidemment pas jusqu’à comparer ma carrière à celle de Marilyn mais il y a forcément des paroles de Norma Jeane qui ont fait écho en moi. Notamment sur sa solitude et sur le regard que les gens avaient d’elle ou comme elle le dit « l’image qu’ils font de moi ». Les réseaux sociaux peuvent être dévastateurs et je me suis demandé si la carrière de Marilyn aurait été différente aujourd’hui avec cet outil en plus, cette surexposition constante et cette haine gratuite que l’on y trouve ou si c’était déjà comme ça à l’époque à cause de la présence/pression constante des photographes/tabloïds et du public. L’important dans le fond, c’est de savoir qui on est vraiment peu importe ce que les gens font de vous, mais ce n’est pas toujours évident !
Ce n’est pas la première fois que l’on te retrouve à l’affiche d’un film. Précédemment, tu as participé à Blossom dans un rôle à l’extrême opposé de tout ce que tu avais pu proposer jusqu’alors. Dis-moi en plus de cette expérience sur Blossom.
Nephael : Blossom c’était un peu pour moi le baptême du feu. Premier rôle sérieux, première collaboration avec Natacha à la réalisation et je ne vais pas te mentir, je ne suis pas totalement satisfaite de ce que j’ai donné à ce personnage et je me le suis pas mal reproché à l’époque. Il y avait quelque chose de bloqué en moi avec un peu de peur, de manque de confiance et peut-être aussi une habitude de travail que j’avais de mon époque télé qui m’avait un peu formatée à certaines mauvaises habitudes. Je n’ai à mon sens pas assez nourri le rôle. Très honnêtement, même si j’ai adoré l’expérience de Blossom, jamais je n’aurais pensé que Natacha me confierai un autre rôle et encore moins d’incarner Marilyn Monroe !
Avec The Late Marilyn, on constate une nette évolution dans ton jeu, tu es totalement habitée par Marilyn Monroe. Comment expliques-tu cela ?
Nephael : Pour faire suite à ce qui a été dit juste avant, j’étais surprise que Natacha veuille retravailler avec moi et sur un rôle comme celui ci. Alors j’ai saisi ma deuxième chance ! Sa confiance m’a portée et je ne la remercierai jamais assez pour ça. Avant et pendant le tournage je me suis plus fait confiance, j’ai profité de l’instant, me suis détendue, je me suis mise dedans et j’ai nourri le personnage, le jeu au point d’avoir l’air totalement déprimée entre deux prises et que des membres de l’équipe me demande si tout allait bien ! On en a d’ailleurs discuté avec Natacha en fin de tournage, elle avait constaté ce changement entre Blossom et The Late Marilyn et ça m’a touchée, j’étais super contente de son retour.
Comment as-tu préparé le rôle ?
Nephael : J’ai beaucoup lu le scénario, regardé et écouté les séquences que l’on peut entendre dans le film, regardé des films avec Marilyn. Comme je le disais plus haut, certaines paroles ont fait écho en moi, je suis donc allée chercher ces sentiments, ces émotions vécues pour incarner le rôle. J’ai pris le temps de me m’imaginer à sa place. En bref ce que je pense être le travail d’un comédien mais comme ce n’est pas mon métier, j’apprends, je tâtonne.
Dans le film, nous avons deux Marilyn. Tu l’interprètes à l’écran quand Sarah Bonrepaux incarne la pensée en voix off de Marilyn. Y-a-t-il eu des échanges entre Sarah et toi pour la préparation du personnage ?
Nephael : Il n’y en a pas eu, on s’est écrit après avoir toutes les deux terminé nos interprétations ! J’ai découvert le film il y a peu – je n’ai pas su attendre l’avant-première ! – et je la trouve tellement juste, bouleversante et je pense que vous serez d’accord avec moi.
Pour The Late Marilyn, tu t’es totalement abandonnée à Natacha Thomas. Comment décrirais-tu ta relation avec la réalisatrice ?
Nephael : Nous avons une relation amicale qui s’est développée pendant le tournage de The Late Marilyn. On était les seules à dormir sur place donc on a vraiment pu échanger sur plein de choses le soir et encore aujourd’hui on se message régulièrement sur divers sujets et beaucoup autour des paillettes, la grande passion de Natacha ! J’admire beaucoup son travail, sa passion pour les lumières, les couleurs, les focales et l’interaction entre tous ces éléments. C’est une vraie touche à tout qui adore explorer, tester et qui sait porter ses idées, son équipe et qui laisse sa place à chacun.
Avant The Late Marilyn et Blossom, tu as participé à Neon Slut, le trailer d’un film d’exploitation type 70’s qui aurait pu exister. Reverra-t-on cette jeune et heureuse Bavaroise dans un film ? (rires)
Nephael : Hahaha cette bonne vieille Olga ! Je ne sais pas du tout, les voies des 3 R sont impénétrables ! (les 3 R étant les scénaristes/réalisateurs du projet Renaud Duplessis, Renaud Daniel et Romain Minart !) En tout cas c’est sur ce projet que j’ai rencontré Natacha Thomas !
Revenons quelques années en arrière. En 2011, tu as participé au clip des Rois de La Suède, mis en scène par Kendy Ty, avec Mr Poulpe et Ivan le fondateur des Fatals Picards. Quel regard as-tu sur cette évolution artistique, d’une participation à un clip de potes au rôle de Marilyn ?
Nephael : Difficile pour moi de voir un lien entre tout ça ! Comme tu le dis, les clips des Rois de La Suède c’était un délire entre potes et je ne me suis jamais imaginée ou rêvée comédienne ni en 2011 ni même encore aujourd’hui ! Pour le rôle de Marilyn c’était beaucoup plus un challenge avec une vraie interprétation. Non pas que je sous-estime mon rôle de lapine coquine qui remue ses fesses dans le clip ‘myspace tu vas mourir‘ mais les deux n’ont pas grand chose à voir. Le point commun entre ces projets auxquels je participe ce sont les super rencontres qui en découlent. J’aime participer aux projets qui me font vibrer ou qui m’amusent avec des gens que j’apprécie, dont j’aime le travail.
Que peux-tu nous dire sur tes prochains projets et ceux en cours ? Un nouveau film avec Natacha Thomas ?
Nephael : De mon côté je n’ai rien en cours. On a discuté dernièrement d’autres projets de Natacha et elle sait déjà que je me ferai une joie de tourner à nouveau pour elle. Et peut-être même qu’il y aura du texte. Ce qui est bien c’est qu’avec Natacha, j’y vais étape par étape ! Enfin ceci dit, une interprétation sans texte n’est pas aussi évidente qu’on pourrait le penser !
Quel(s) rôle(s) aimerais-tu que l’on te propose ?
Nephael : Si tu as entendu parler de ma passion pour le tir, je dirais forcément un rôle avec des armes, une flic ou un rôle carrément Badass dans un film d’action!
As-tu un message pour l’équipe de The Late Marilyn ?
Nephael : Comme le dirait Natacha sur un tournage ‘vous êtes parfaits‘ ! J’ai adoré ces journées de tournage en votre compagnie, toujours dans la bonne humeur et la bienveillance. Merci pour vos sourires et vos rires, j’ai hâte de remettre ça et de vous retrouver pour mettre en image les prochaines idées pailletées et parfois farfelues de Natacha ! Bravo à Sarah et Romain pour leurs interprétations et puis une fois de plus, un grand merci à Natacha pour sa confiance.
Nous sommes arrivés à la fin, encore merci Nephael de t’être prêtée au jeu d’une interview, à bientôt.
Nephael : Merci à toi pour l’invitation. Bonne avant première à toutes et à tous j’espère que le film vous plaira ! A bientôt !
Propos recueillis par Thomas O. pour Eklecty-City.fr, qui remercie Nephael de s’être prêtée au jeu d’une interview.
Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Raphaëlle et de son podcast ‘L’Hymne à la Daube’.
Il y a quelques mois, j’ai découvert sur twitter un teasing au sujet d’un nouveau podcast. Baptisé ‘L’Hymne à La Daube’ le concept se veut original, à chaque épisode un(e) invité(e) chanteur(se) analyse une chanson ‘daubesque’ qui leur est chère. Un podcast qui aspire à l’abolition de l’idée de bons et mauvais goûts musicaux. Après plusieurs numéros, j’ai souhaité en apprendre plus sur la créatrice à l’origine de ce nouveau rendez-vous. Des Beatles aux Jonas Brothers, découvrez l’univers de Raphaëlle.
Bonjour Raphaëlle, merci de participer à notre chronique ‘Adopte un Créatif’. Dans le cas où il y aurait des internautes ignorant ton actualité peux-tu te présenter et nous rappeler ton parcours ?
Raphaëlle : Salut ! Alors je m’appelle Raphaëlle, et je suis en fait assez nouvelle dans le monde du journalisme culturel. J’ai obtenu ma licence de Philosophie à La Sorbonne et j’ai eu l’occasion d’enseigner l’anglais, le français et la philo à plusieurs reprises, dans des cadres différents. Je me destinais en fait à devenir professeure de français en Angleterre jusqu’en 2019, parce que je tenais absolument à retourner vivre dans ce pays, pour lequel je voue un amour sans limite depuis que j’ai 14 ans, et dans lequel j’ai eu la chance de passer un an et demi. Ayant complètement raté les études de FLE qui auraient pu me permettre de réaliser ce rêve, ma famille, mes amis, toutes les personnes bienveillantes qui me suivent de près, m’ont fait comprendre que c’était peut-être un signe pour me mettre à travailler dans ce qui me plaisait réellement : la musique.
J’ai toujours aimé écrire, et c’est vrai que depuis l’enfance, j’écoute de la musique en permanence, et c’est la seule chose dont je sais à peu près parler. Je me suis alors tournée vers un ami, JD Beauvallet, co-fondateur des Inrocks, qui m’a grandement encouragée dans cette voie, et qui m’a vraiment donné envie de me lâcher un peu, de m’écouter, et d’admettre que c’était une chose qui m’avait toujours attirée. Par chance, peu de temps après, Les Inrocks ont posté une annonce de recherche de stagiaire au sein de leur équipe (fin 2019), et j’ai sauté sur l’occasion.
Je m’estime très chanceuse d’avoir été prise parce que j’ai le souvenir d’avoir dit n’importe quoi lors de mon entretien ! Ils ont décidé de croire en moi, j’imagine, et je leur suis très redevable. J’y ai fait six mois absolument géniaux, lors desquels je me sentais bien plus à l’aise que pendant mes études de FLE. J’y faisais des news, sorties de clip, parfois quelques papiers un peu longs, dont un paru dans la version papier (consécration pour une stagiaire ! C’était le numéro de Leïla Slimani, dans lequel j’avais assuré la rubrique Médias, en parlant de l’émission de Jehnny Beth sur Arte.), et des interviews d’artistes.
Malheureusement, le Covid-19 est arrivé vers la fin de mon stage, en 2020, et il a bien fallu que je ‘m’occupe’ en attendant le retour à la vie normale. J’ai donc proposé des piges à General Pop, pour qui je travaille encore très occasionnellement, et surtout, j’ai monté ce podcast vers la fin de l’année.
Quelle est ta toute première expérience avec internet ?
Raphaëlle : Je pense que comme beaucoup de personnes de mon âge (je suis née en 1995), mes premiers souvenirs d’Internet remontent aux vidéos de Mozinor sur Dailymotion. On regardait ça en boucle avec mon frère, ma sœur et mes cousins, et on se marrait tellement. Et puis ‘Le grand détournement‘ est devenu un classique rapidement, ainsi que ces vidéos cultes qui sont devenues des memes classiques, comme ‘Chocolate Rain’ ou ‘Leave Britney Alone’. Good times.
Présente-nous ton univers :
Raphaëlle : J’ai sorti un épisode 0 en prévision de ce qui allait suivre pour expliquer le concept de L’Hymne à La Daube. Tout est né de cette chanson, ‘Sucker‘ par les Jonas Brothers, qui est un coup de cœur que j’ai eu en 2019. Au même titre que lorsque j’ai découvert ‘Happiness is a Warm Gun‘ des Beatles quand j’étais adolescente, je n’en revenais pas de tomber en amour pour de la musique à ce point. Et ça m’a pris beaucoup de temps d’accepter qu’entre un groupe que j’ai longtemps moqué (les Jonas Brothers) et un groupe qui m’a conditionnée dans ma passion pour la musique en général et à qui je dois à peu près tout (les Beatles), j’avais pu ressentir, le temps d’un titre seulement, la même chose.
Je trouvais ça fou, et j’ai fini par douter de mon bon goût, puisque j’ai toujours pensé, et je le pense encore, que les Jonas Brothers ne font, à mon sens, pas de la ‘bonne’ musique. Cependant, voilà, Sucker a fini par devenir la chanson que j’ai le plus écoutée sur Spotify depuis que j’ai l’appli (la chanson est sortie en 2019, j’ai Spotify depuis 2016…) Et je me suis penchée sur ce phénomène et me suis dit que ce que me faisait ressentir cette chanson devait être, malgré moi, bien réel.
Même si objectivement, je sais que ce n’est pas ce que je qualifierais en temps normal de bonne musique. Mais j’ai tellement de choses à dire, tellement de choses que j’éprouve, par rapport à cette chanson. Alors j’ai voulu lui rendre hommage, parce qu’elle est boudée par mes ami.es quand je la propose en soirée/dans la voiture, alors qu’elle m’est très chère.
J’ai réfléchi quelques jours à comment je pourrais rendre cet amour visible, et je me suis rendu compte que les artistes avaient aussi des ‘daubes’ chéries, comme tout le monde, je suppose. Mais j’ai voulu mêler ce que je savais faire, le format d’interview en tant que journaliste, à une vraie discussion autour de ce phénomène d’amour réel pour quelque chose de pas terrible. J’en ai parlé autour de moi, on m’a beaucoup encouragée, alors je me suis lancée.
Le format écrit ne m’intéressait pas trop pour ce projet, et on m’a toujours dit que j’avais une voix de messagerie vocale (on en tire les conclusions qu’on veut), et je me suis dit : pourquoi pas. Pour ce qui est du nom de L’Hymne à La Daube, je voulais quelque chose qui évoque bien l’idée de ‘célébration’ d’un truc ‘pas terrible’. Si en plus ça pouvait faire écho directement à des titres de chanson (là, j’ai de la chance, on a ‘L’Hymne à l’Amour‘ et ‘L’Hymne à la Joie‘ à la fois !), c’était encore mieux !
J’aime penser que le titre est assez parlant en soi et qu’il est drôle.
Les Beatles ont complètement changé ma vie.
Qu’est ce qui t’a donné ta vocation ?
Raphaëlle : Je crois que je n’ai pas suffisamment confiance en moi pour attester que je suis vraiment forte quand il s’agit de parler de musique, mais je peux affirmer sans crainte que c’est ce que je préfère faire. Cependant, sans la bienveillance et les conseils de mes proches, je crois que je n’aurais jamais osé franchir le pas du revers de situation, pour me consacrer à cette passion plutôt que de suivre le schéma que je m’étais imposé des années durant.
Sans mes ami.es/proches, sans JD, je me serais destinée à cet avenir de professeure et aurais simplement continué à écouter beaucoup de musique. Si on revient vraiment à la racine de tout ça, si on considère que tout remonte à mon amour pour la musique, alors tout a réellement commencé avec les Beatles quand, lors de vacances d’été avec ma meilleure amie, Clara, et ses parents à 12-13 ans, on n’écoutait que ça en voiture.
J’ai développé une vraie addiction pour le groupe. Je les écoutais en m’endormant, je les écoutais dès le réveil, et quand au collège je sentais que c’était possible, je cachais un écouteur dans ma manche, et j’écoutais les Beatles. Aussi bête que ça puisse paraître, sans être jamais allée en Angleterre, c’est eux qui m’ont immédiatement donné envie d’y vivre, parce que j’ai découvert la culture musicale de leur pays, et que je n’ai jamais développé un attrait aussi intense pour autre chose depuis. C’est naïf, c’est irréfléchi, et pourtant, c’est ce qui m’anime encore aujourd’hui.
J’aimais déjà la musique auparavant, j’ai beaucoup écouté Queen et Mylène Farmer notamment, mais je n’éprouvais pas un besoin viscéral d’en parler. Les Beatles ont complètement changé ma vie.
Quelle a été la réaction de tes proches ?
Raphaëlle : Essentiellement beaucoup de soutien, j’ai eu tellement de chance. Beaucoup de gens ont cru en moi à des moments où je ne me sentais pas capable, et vraiment, je leur en suis très reconnaissante. Je me sais très bien entourée.
Quelles sont tes sources d’inspiration ?
Raphaëlle : Je ne consomme pas vraiment de podcasts, à vrai dire. J’ai écouté quelques épisodes de grands noms, comme Les Couilles sur La Table, La Poudre, quelques épisodes d’A Bientôt de te Revoir, mais même si je trouve que le format de podcast est très important et intéressant, j’en suis quand même restée à un point où, quand j’en commence un, je me dis que je pourrais plutôt être en train d’écouter de la musique.
J’espère que ça me perdra, honnêtement. Il faut soutenir ces projets, et c’est un super concept. Sinon, je dirais… Les Jonas Brothers et les Beatles ! Et ce serait injuste de ma part de ne pas citer Arctic Monkeys, qui est la deuxième grande étape dans ma vie de mélomane : ayant vécu dans le désespoir de ne jamais pouvoir voir les Beatles en concert (et les groupes auxquels je les rattachais, beaucoup d’artistes anglo-saxons des années 60-70), j’étais extrêmement frustrée d’appartenir à une époque qui semblait ne jamais me combler.
Et puis en 2010, j’ai découvert Arctic Monkeys. Si les Beatles m’ont fait comprendre que la musique était quelque chose de crucial pour moi, Arctic Monkeys m’ont montré qu’il y avait énormément de musique qui valait la peine d’être écoutée actuellement. Je ne suis plus du tout dans le regret grâce à eux, et je m’ouvre aux nouveautés avec plaisir.
Quelle est ta première expérience de créatif sur le web ? Comment cela s’est passé ?
Raphaëlle : Encore une fois, comme beaucoup de personnes de mon âge, je crois que je peux admettre que ma première création web, c’était un Skyblog. D’ailleurs, il existe encore, c’est sweetdreams0609.skyrock.com. Je n’ai plus d’accès, j’ai oublié les mots de passe etc., mais il est bel et bien vivant ! Il n’y a dessus plus que les photos de mauvaise qualité de danseuses de flamenco que j’avais vues lors d’un voyage scolaire de 3ème en Andalousie. La photo ‘de profil’ du blog, c’est Paul McCartney en concert, parce que je l’avais vu, l’année d’avant, pour la première fois de ma vie sur scène, et que je ne m’en relevais pas.
Quel a été ton meilleur moment ? Le pire ?
Raphaëlle : Les meilleurs moments s’accumulent, c’est simplement quand un.e artiste me dit oui quand je leur propose de participer. Que des personnes que je connais ou non croient en mon projet et veulent y participer, qu’ils/elles y voient un intérêt, que ça leur donne envie, c’est les meilleurs moments. Peu importent la notoriété, ma relation avec l’artiste. Les réponses positives sont ce qui me touche le plus.
Le pire, je pense que je ne le connais pas encore vraiment, puisque je suis toute nouvelle sur le terrain. Disons que je n’étais pas très contente quand j’ai constaté que la prise de son de Pi Ja Ma (épisode 1) était mauvaise malgré mes nombreuses précautions. Elle était repartie à Avignon où elle habitait à ce moment-là, ce n’était pas possible de recommencer l’épisode, et je tenais tellement à ce qu’il s’était spontanément dit dans la première version, que oui, là, c’était pas super.
Quelles sont, dans tes créations, celles qui te semblent les plus intéressantes, qui te tiennent le plus à cœur, et pourquoi ?
Raphaëlle : Pour ce qui est du podcast, j’ai du mal à avoir le recul nécessaire pour avoir un épisode favori. D’un côté, il y a les artistes qui sont des ami.es que j’aime énormément, et avec qui c’est toujours un plaisir de discuter, et de l’autre, les artistes que j’ai rencontré.es à cette occasion, et qui ont souhaité participer purement parce que le podcast leur plaisait, indépendamment de l’hôte.
Je tiens à tous ces rapports de façon égale. Cependant, dans mon passé de petite journaliste aux Inrocks, je suis particulièrement fière de mon papier sur Working Men’s Club, dans la catégorie ‘Groupe à Suivre’ du magazine, que j’avais rédigé en novembre 2019, très peu de temps après mon entrée dans la rédaction. François (Moreau), mon tuteur et journaliste musical de la rédaction, m’avait très rapidement confié cette interview malgré mon peu d’expérience, et rétrospectivement, ça me touche beaucoup. Parce que WMC est un groupe qui désormais reçoit la reconnaissance qu’il mérite, et que j’adore ce qu’ils font.
Je suis très fière de constater que je fais partie des toutes premières personnes à en avoir parlé, à les avoir introduits en France. Pareil, avoir pu mettre en avant l’émission de Jehnny Beth, que j’admire énormément, c’était une super expérience. Je crois que je ne suis pas peu fière de m’être prouvé que je pouvais établir un rapport avec des personnes que j’admire et dont je salue le travail, à travers mes réflexions et ce que m’évoquait leur musique. Et je me retrouve avec General Pop à interviewer Arlo Parks, Nilüfer Yanya, Flyte, des artistes qui sont soit déjà très intégrés dans l’industrie soit encore peu connus au bataillon.
Et j’aime constater que le stress avant chaque interview est le même, peu importe la notoriété des uns et des autres. J’aime constater qu’avant tout, j’aime la musique de ces artistes, et pas ce qu’ils représentent. C’est pareil pour le podcast.
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux jeunes créatifs qui souhaitent partager leur univers sur la toile ?
Raphaëlle : DO IT. JUST… DO IT! Non, sérieusement, parlez-en à des personnes bienveillantes qui vous connaissent bien. Évaluez leur réaction, voyez ce qu’ils/elles en pensent. Ce n’est pas leur avis qui est décisif, c’est le vôtre, mais peut-être que leurs conseils sauront mieux vous guider dans une certaine direction. Quoiqu’il en soit, écoutez-vous, et sentez-vous légitimes. Moi-même encore j’ai bien du mal à admettre que je fournis un travail réel – alors que j’y consacre énormément de temps et d’énergie. Faites-le. Vous valez le coup d’essayer.
Si tu pouvais adresser un message à toi-même à l’âge de 10 ans, lequel serait-ce ?
Raphaëlle : Je n’ai honnêtement rien à redire sur ma propre éducation musicale. Je ne peux même pas me conseiller d’écouter plus de musique : c’est impossible. J’écoutais de la musique tout-le-temps. On s’écarte, mais je pense que les messages que je m’adresserais ressortiraient beaucoup plus de l’ordre des combats que je mène aujourd’hui, à savoir le féminisme et la lutte pour la survie des animaux.
Je me dirais d’être cohérente avec ce qui me touche au plus profond de moi-même (savoir très bien que je subis déjà une pression sexiste même à cet âge, et que les animaux que je consomme sont aussi ceux que je serais incapable de tuer moi-même parce que j’ai toujours adoré les animaux). Que ce n’est pas chose facile, que ce sont des combats avec soi-même et les autres, mais qu’en affirmant que certaines de mes pratiques ne concordent pas avec ce que je ressens, c’est là que commencera réellement mon développement personnel.
Non, tu n’as pas besoin de porter une jupe et de te démener pour plaire aux garçons pour exister. Non, tu n’as pas besoin de manger de la viande pour survivre. Oui, tu dois te battre pour te trouver, mais ça vaudra le coup, et tu seras fière de toi.
Que ferais-tu avec un budget digne d’un blockbuster ?
Raphaëlle : Dans un monde sans Covid-19, j’irai à travers le globe pour faire intervenir des artistes internationaux sur L’Hymne à La Daube ! Pour ce qui est du matériel, le podcast n’est vraiment pas la forme de création qui coûte le plus cher, il suffit de deux micros assez lambda et d’un logiciel (moi, je n’utilise que GarageBand, gratuit sur Mac.) En revanche, oui, je vadrouillerais pour enfin transformer L’Hymne à La Daube en Ode To Crap ! D’où mes sous-titres anglais et français sur YouTube, pour rendre le contenu accessible à toutes et tous.
Je fais appel à ton esprit créatif. A toi de nous proposer quelque chose et de commenter.
Raphaëlle : L’autre jour, au téléphone avec Charles-Elie (mon ami qui s’occupe du mastering des épisodes), je gribouillais sur un papier. J’ai toujours, toujours ‘gribouillé’. Je ne suis pas très forte, mais je réfléchis et écoute mieux quand je m’occupe les mains. Je n’ai jamais compris pourquoi ça a résulté en un oignon sympathique, mais j’ai adoré le résultat. Je m’y suis attachée.
Peut-être qu’il y a un lien avec le fait que j’ai récemment expérimenté une multitude de recettes vegan (je suis moi-même végétalienne depuis trois-quatre ans, et végétarienne depuis huit ans), alors que je ne me suis jamais vraiment intéressée à la cuisine. Mais j’ai eu un élan, une envie subite d’essayer, et j’imagine que c’était notamment pour prouver qu’on mange bien, quand on est vegan, et qu’on propose des choses qui sont super bonnes, et surtout : que c’est POSSIBLE ! Ma frénésie s’est un peu calmée, mais je dois la retrouver. Je sais faire une tarte au citron meringuée, un gâteau au chocolat, un gâteau à l’ananas, des madeleines, une tarte aux poireaux, plein de choses, en fait ! Le tout : vegan, dont une tarte aux oignons. D’où ce petit oignon fou-fou et souriant.
Il y a tellement de choses importantes dans la Pop Culture
Tu le sais, notre thématique est la Pop Culture. Que signifie pour toi la culture populaire ?
Raphaëlle : Fatalement, je l’associe à l’art musical, celui qui m’est le plus familier. Le nom qui me vient en premier, c’est Madonna. Je ne crois pas vraiment en ses créations des dernières années, mais jusqu’à Confessions On a Dance Floor (2005), j’enfonce une porte ouverte, mais je la trouve révolutionnaire sur plein de plans. Un talent incroyable.
Je pense que la culture populaire a été détournée pour désigner quelque chose de plutôt négatif, maintenant. C’est comme ça que je l’entends. D’ailleurs, ça rejoint mon idée de L’Hymne à La Daube, quand on pose la question du bon et du mauvais goût : la plupart des daubes dont on me parle font partie de la culture populaire. Je trouve qu’il y a du bon et du mauvais dedans, même si c’est bateau. Mais je refuse qu’on ne lui trouve que de la simplicité, et qu’on lui reproche un manque de subtilité. Il y a tellement de choses importantes dans la Pop Culture. La liste de créations appartenant à la Pop Culture est tellement longue et évidente que je peine même à citer des noms. La Pop Culture est partout, par définition. Me concernant, elle est bienvenue, avec ses défauts et ses qualités, puisqu’elle permet des discussions intéressantes.
Quelles sont tes œuvres de référence dans la Pop Culture ?
Raphaëlle : Je suis extrêmement fan de beaucoup de films, que je peux revoir des milliers de fois, et je ne m’en prive pas. Parmi eux, il y a Jurassic Park (le premier seulement, les suites sont des insultes), la trilogie Retour Vers le Futur, je ne sais pas si Alien fait partie de la Pop Culture, mais j’adore ce film (encore une fois, le premier seulement !) Je suis fan de beaucoup de vieux films Disney (La Belle au Bois Dormant, Peter Pan, Pinocchio,…) et chez Pixar, je pense que Vice Versa m’a bien plus bouleversée que je ne le pense.
Pour la musique, j’ai vraiment du mal, parce que les genres commencent à se brouiller, et ce qui se réclamait indie devient pop dans l’esprit collectif. Par exemple, Tame Impala fait partie de la Pop Culture à mon sens, ainsi que Mac DeMarco. Je les adore. En bandes dessinées, je m’y connais très mal, et je ne sais pas si celles-ci entrent dans la définition qu’on attend, mais j’ai grandi avec Calvin et Hobbes et Gaston Lagaffe. Et je ne m’en lasserai jamais.
Et quelles sont tes attentes ?
Raphaëlle : Je n’attends rien des artistes (musiciens, cinéastes, illustrateurs, etc.) Moi-même, je n’ai pas l’âme d’une créatrice de contenu purement original, puisque mon podcast ne traite que d’œuvres déjà publiées. Je ne sais pas créer, je sais parler de, je sais m’intéresser à. Je ne peux rien attendre, je fais confiance, c’est tout.
Je pense que ça rejoint ce que je disais précédemment, peut-être qu’au-delà de l’essence du contenu, j’attends simplement qu’on considère enfin les femmes comme des êtres humains à part entière dans la culture, qui forge les esprits et les personnalités. Plus de femmes musiciennes mises en avant à des festivals et dans des grandes salles. Plus de rôles féminins avec de fortes psychologies, pas juste des femmes fatales ou des petites choses frêles, mais des personnages qui existent indépendamment des personnages masculins, ou du moins, leur étant égales. Plus de reconnaissances de femmes créatrices de bandes dessinées, etc. Je ne connais (et apprécie beaucoup) que Pénélope Bagieu, du moins c’est le seul nom qui me vient. La faute me revient aussi parce qu’il suffirait que je m’ouvre un peu plus à cet art, mais il faudrait aussi que l’on sache me donner envie de le faire.
Un mot sur ton actualité ? Tes projets en cours ?
Raphaëlle : Tout se déroule comme prévu. La suite dans la durée dépend essentiellement du virus, parce que j’ai des artistes britanniques à faire intervenir sur L’Hymne à La Daube. J’aimerais vraiment faire les entretiens face à face et pas à distance, je tiens beaucoup à la proximité que deux interlocuteurs doivent avoir quand on traite de l’intimité. Donc voilà, cet été, j’espère, le podcast sera officiellement bilingue.
A quel autre créatif souhaiterais-tu voir poser ces questions ?
Raphaëlle : Sans hésiter, Pi Ja Ma ! C’est l’invitée de mon premier épisode. Elle touche à tout, la musique, le dessin, et récemment, elle a tourné dans un court-métrage. Elle a une super culture, elle est très curieuse et elle me fait pleurer de rire.
Dans ton entourage, il y a une autre créatrice de contenus, Judith de la chaîne Demoiselles d’Horreur. C’est pourquoi je suis obligé de te poser cette question ‘Quel est ton film d’horreur préféré ?’ (Rires).
Raphaëlle : Mon film d’horreur préféré, c’est mon film préféré tout court. Judith et moi avons grandi en regardant beaucoup de films ensemble (je précise qu’elle est ma grande sœur, au cas où.) Elle s’y connaît bien mieux que moi, mais on a globalement les mêmes références, et j’aime beaucoup regarder des films d’horreur aussi.
En vacances dans un manoir au Portugal, à 14 ans, ma meilleure amie Clara, Judith et moi, avons regardé Shining. C’était la première fois pour moi. Au même titre que ‘Sucker‘ ou ‘Happiness is a Warm Gun‘, je suis tombée en amour pour ce film, ainsi que pour Kubrick en général, dont l’œuvre m’émeut plus que n’importe quel autre réalisateur. J’ai regardé Shining tous les jours pendant un petit temps (on dirait les origines d’une future serial killeuse…), et je l’avais même installé sur mon premier iPod. Lors d’un long voyage en car avec mon collège, je l’avais regardé deux fois sur sont tout petit écran, parce que je ne m’en lassais simplement pas. Je ne vois pas de défauts à ce film. Mais comme Judith, je suis dingue du Dracula de Coppola, de Sleepy Hollow de Burton, de The Others d’Alejandro Amenabar,…
Lorsque tu as lancé L’Hymne à La Daube, la chaîne YouTube de Judith existait déjà depuis quelques mois. Est-ce qu’il y a eu des discussions entre vous au sujet de la stratégie à adopter pour le lancement du podcast ?
Raphaëlle : A bien y réfléchir, pas vraiment. On est très proches, elle et moi, on se comprend pas mal sur beaucoup de points, mais son format et son sujet de prédilection sont quand même assez éloignés du mien. Le mien repose sur un rapport avec un ou des interlocuteurs, je m’efface pas mal, j’écoute les gens parler et j’essaie de pousser une réflexion à partir d’eux, mais Judith meuble seule ses propres analyses. Le tout, sur des œuvres qu’elle estime être relativement bonnes, tandis que le principe de ma création repose sur le soi-disant ‘mauvais goût’.
Elle m’a cependant énormément encouragée, elle consomme mon podcast et le suit de près, et elle me fait des retours, comme je le fais avec ses vidéos. J’aime beaucoup son contenu et je trouve qu’elle apporte vraiment quelque chose d’essentiel dans son domaine. Je ne veux pas trop m’avancer, mais j’ai cru comprendre qu’elle appréciait aussi mon travail. On ne se conseille pas trop sur le fond, chacune respecte le domaine de travail de l’autre, mais on se serre les coudes. Mais ça reste ma puante de sœur et il est hors de question que j’admette un jour que je l’aime, beurk.
As-tu beaucoup de retours des personnes qui te suivent ?
Raphaëlle : J’en ai beaucoup, proportionnellement au petit nombre de personnes qui me suivent ! Je n’ai pas une énorme communauté, en revanche, celle que j’ai est fantastique. Les retours sont exclusivement bons (bon, ça, ça ne détermine pas la qualité de mes auditeurs et auditrices), mais ce qu’il en est dit me touche beaucoup. Ce sont des personnes qui comprennent bien la portée du propos, et qui savent bien formuler ce qui leur touche.
Je suis contente aussi de constater que ça peut un peu ‘débloquer’ des personnes qui ont ‘honte’ de certains de leurs goûts. En tout cas, si mes auditeurs et auditrices lisent ces lignes, je vous suis très reconnaissante et vous remercie beaucoup pour vos retours, plus que pour vos partages, même s’ils sont très précieux. Savoir ce que vous pensez, les conclusions que vous tirez des épisodes, c’est ce qui me prouve que ce que je fais n’est pas en vain. Merci.
Tes abonné(e)s te soufflent des idées parfois ?
Raphaëlle : On me souffle des idées d’invité.es à accueillir, oui ! Sachez d’ailleurs que la majorité de vos désirs sont des ordres. A suivre.
Que voudrais-tu dire à tous tes abonné(e)s et aux prochains ?
Raphaëlle : L’un des principaux buts de ce podcast reste l’invitation à découvrir des artistes. Certains sont déjà connus, mais d’autres sont encore neufs dans le paysage musical, et je tiens vraiment à ce que mon émission permette d’éveiller la curiosité du public. Je n’invite que des personnes dont j’apprécie le travail, et j’estime que tous méritent une reconnaissance. Ne vous ruez pas que sur les artistes que vous connaissez déjà ! Apprenez à connaître le travail de chacun d’entre eux, laissez-vous surprendre ! Et aussi : bienvenue à toutes et tous !
Pour terminer, quelle question aurais-tu souhaité que l’on te pose et qu’aurais-tu répondu ?
Raphaëlle : J’aurais aimé qu’on me demande combien de baleines bleues faudrait-il superposer sur la longueur (de tête à queue) pour atteindre la hauteur de la Tour Montparnasse. La réponse est 7 baleines bleues. Superposez sept baleines bleues bout à bout le long de la Tour Montparnasse, et vous verrez. Essayez, ça vaut le coup.
Encore une fois merci Raphaëlle d’avoir participé à Adopte un Créatif.
Raphaëlle : Merci à vous pour votre initiative de donner un peu de visibilité à un projet naissant et indépendant ! C’est super.
Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Geoffrey Crété et Simon Riaux du site Ecran Large.
C’est un numéro spécial aujourd’hui. A travers cette chronique, j’ai l’habitude de mettre en lumière des créatifs en tous genres. Des blogueurs, des rédacteurs, des créateurs de contenus sur les réseaux sociaux ou encore des Youtubeurs. L’idée de départ de la chronique est de partir à la rencontre des différents talents du web, qui ne sont pas forcément dans les tendances. Des créatifs chez qui on retrouve la passion, la vraie, l’envie de partager avec les autres.
Nous avons également des créatifs et des passionnés derrières certains médias connus de tous. Depuis plusieurs mois, je réfléchissais à l’idée de partir à la rencontre des rédacteurs de ces médias et notamment de Geoffrey Crété et Simon Riaux. Si vous êtes un.e féru.e de l’actualité cinéma vous les connaissez très certainement. Ils officient tous les deux sur le site Ecran Large.
Habituellement, quand un site a une thématique cible c’est très rare, pour ne pas dire jamais, qu’il consacre un papier à un autre média sur la même thématique. Ce n’est pas ma manière de fonctionner, bien au contraire. EL est l’un des rares sites français que je consulte régulièrement. J’apprécie le ton et la diversité des contenus. S’il m’arrive de ne pas partager leur point de vue sur un contenu, l’argumentaire est toujours intéressant et j’avoue être un immense fan des célèbres punchlines de Simon. Aussi, depuis quelques mois, nous sommes nombreux à avoir remarqué ‘un second souffle’ au sein de leur rédaction, notamment avec la création de contenus vidéo. C’est pourquoi je trouvais pertinent de consacrer un numéro d’Adopte un Créatif à Geoffrey Crété et Simon Riaux.
Dans cette interview croisée, nous évoquons leurs parcours respectifs, l’actualité des salles et des plateformes de streaming, le genre héroïque, le Snyder Cut, Hollywood et la ligne éditorial du site. Letoutsaupoudré avec lespetitesnotesd’humourdeSimon.
Rencontre avec les Tango & Cash de l’actualité cinéma.
Bonjour Geoffrey, Simon, merci d’avoir accepté mon invitation pour la chronique ‘Adopte un Créatif’. Dans le cas où il y aurait des internautes ignorant votre actualité, pouvez-vous vous présenter et nous rappeler votre parcours ?
Geoffrey : Je suis le rédacteur en chef d’Ecran Large. J’ai fait la même école de ciné que Simon, et on se détestait déjà à l’époque. On s’est donc dit que ce serait drôle de subir une cohabitation dans la même boîte. Avant Ecran Large, et après mes études, j’ai mis un orteil sur les plateaux de tournages, dans la déco, la régie, l’assistanat. Ensuite, j’ai commencé à écrire pour quelques sites : j’ai débuté sur DVDrama (rapidement racheté par TF1, et renommé Excessif), et je suis passé par Webedia (expérience fascinante dans la presse people, parce que Mimi Marchand était dans le coin, et que depuis elle est devenue une star grâce aux Macron). J’ai aussi écrit des articles pour quelques autres médias, dont UGC illimité et Tecknikart (qui ne m’a jamais payé d’ailleurs).
Simon : Après (un peu) d’études de lettres, portées par le désir d’être enseignant, j’ai compris que poursuivre dans cette voie m’exposerait à assassiner un contingent non-négligeable d’élèves, ou de professeurs. J’ai donc tenté le concours de l’ESEC, que j’ai rejoint, pour suivre la section production audiovisuelle. Ce fut l’occasion de rencontrer Bruno Hodebert, qui était le référent pédagogique de cette option et le directeur des études. Sa bienveillance et son parcours m’ont pas mal aidé, non seulement à voir clair dans ce qui ne ressemblait pas encore tout à fait à un projet, mais aussi à y réinjecter de la curiosité, à un moment assez particulier, ou, entre la professionnalisation d’un domaine auparavant placé sous l’égide de la passion, l’arrivée à Paris et la confrontation avec un environnement radicalement différent de ce que je connaissais jusqu’alors rendait l’adaptation, ou à tout le moins la sérénité, difficile.
Geoffrey, en 2008 tu obtiens ton diplôme d’assistant réalisateur de l’ESEC. Dans la foulée, tu participes à différents projets ‘Un village français’ sur France 3 et ‘Paris 16’ pour M6. Quels souvenirs gardes-tu de ces deux expériences ?
Geoffrey : Super souvenirs pour le puceau des tournages que j’étais. Sur Un village français, c’était un tempo très particulier : la déco bosse loin du plateau, prépare les prochains décors, et s’en va quand toute l’équipe arrive pour filmer. Mon premier tournage, c’était plusieurs mois à 100km du tournage. On investissait des lieux fantomatiques avec une tonne de planches, de meubles, d’accessoires.
Je me souviens avoir rempli des sacs de livres parce qu’on tournait dans une vieille bibliothèque qui allait les jeter. C’était le truc le plus triste du monde de les voir attendre les poubelles. Et surtout, je garde le souvenir du chef déco François Chauvaud et son frère Jean-Luc, qui sortaient du carton Les Choristes. De sacrés caractères, des gens adorables, passionnés, méticuleux. Ils m’ont même offert un iPod pour mon anniversaire sur le tournage, c’était dingue pour moi.
Paris 16, j’en garde surtout un grand souvenir humain. Cette série, c’était du n’importe quoi, très symptomatique de la production TV française – et si on lançait direct 80 épisodes, sur un scénario basique de mauvais soap, et à peu près zéro ambition visuelle ? C’était quasi intégralement en studio, j’étais la dernière roue du carrosse mise en scène, donc rien à voir avec Un village français. Et ça a été un tournage magique, grâce à l’adrénaline de l’équipe mise en scène… et à l’énergie des soirées. Pensée pour Eugénie, parce que c’est grâce à elle que je me suis retrouvé là, et c’est devenu une amie proche. C’est ça aussi la fameuse magie des tournages.
Ensuite, tu officies comme assistant régie sur plusieurs épisodes de ‘X femmes’, la série érotique et anthologique de Canal+. Comment es-tu arrivé sur ce projet ?
Geoffrey : Encore une amie, Marie, qui bossait déjà dessus. Comment dire non à un projet de courts-métrages pornographiques féministes, réalisés par des femmes ? Là encore, belle expérience. Je me souviens que Mélanie Laurent, qui réalisait l’un des courts, a été castée dans Inglorious Basterds pendant la prépa, donc on a vu de loin ce grand moment. J’ai aussi pu boire une bière en face d’un sex shop avec Zoe Cassavetes, une autre des réalisatrices.
J’ai pu lui dire que j’adorais Parker Posey, qu’elle avait dirigée dans Broken English, c’était mon petit plaisir cinéphile. Je me souviens aussi et surtout de la productrice Sophie Bramly, une femme brillante, impressionnante, extrêmement gentille, mais assez intimidante vu son parcours. Et puis bon, j’ai bossé sur des porno. Forcément ça laisse des souvenirs, intéressants disons.
En 2014, après un court-métrage co-réalisé avec Clémentine Isaac, tu réalises Axiome, un court-métrage de science-fiction. Peux-tu nous pitcher le projet ?
Geoffrey : C’est un long court-métrage de SF-dystopie. C’est l’histoire d’un garçon né avec des anomalies : il a un handicap à la jambe, et une étrange marque sur sa rétine. Il se sent incomplet, et cherche un sens à son existence. Jusqu’au jour où l’humanité découvre une forme de vie extra-terrestre microscopique, qui est identique à ce qu’il a gravé dans son œil. A partir de là, il va voir que les gens autour de lui commencent à changer, et que quelqu’un ou quelque chose le poursuit.
Quelles ont été tes influences pour Axiome ?
Geoffrey : La parano de L’Invasion des profanateurs de sépulture, la mise en scène de Shyamalan sur Signes, et l’étrangeté mélancolique de Richard Kelly.
Simon, que penses-tu de Geoffrey en tant que réalisateur ?
Simon : C’est très difficile de répondre à cette question. Pas seulement parce qu’il va me lire, mais parce que, sitôt qu’on passe un tant soit peu derrière l’écran, dans les coulisses, pour produire, pour écrire, pour réaliser, pour interpréter, pour partager un exercice critique, le sens de certains mots diffère, tout comme la nature de l’expérience. Je suis parfaitement incapable d’appréhender Geoffrey comme réalisateur, ou comme un pur objet abstrait de mise en scène.
En revanche, ce que je vois, ou plutôt ce que je sens, qui est à la fois passionnant et rassurant (à mes yeux), c’est l’impression de ressentir devant son travail une expression très cristalline de Geoffrey. De son rapport au monde, fort et intéressant parce que paradoxal, ou toujours nuancé au bon endroit. Volontaire sans être violent, stimulant sans rouerie, au style suffisamment assumé pour brandir le bizarre. Le Geoffrey réalisateur ressemble au Geoffrey que je connais, ou à ce que je perçois de lui.
Il me semble que tu prépares d’autres projets. Un drame qui se déroulerait dans le sud de la France et plusieurs scénarios d’horreur. Peux-tu nous en dire plus ?
Geoffrey : Le drame, c’est un long-métrage, donc autant dire que j’ai le temps d’avoir les cheveux beaucoup plus grisonnants avant qu’il se concrétise. Tant mieux, il mérite des réécritures et plus de maturité vu le sujet. En revanche, je développe activement un court-métrage d’horreur-fantastique féminin, avec une touche de médiéval, que j’ai écrit et compte réaliser. Il s’appelle pour l’instant Ava, et Michael Proença m’accompagne, avec sa boîte Wild Streams.
Simon, tu es également diplômé de l’ESEC avec plusieurs expériences dans l’assistanat de production et de décoration. Peux-tu nous parler des différents projets sur lesquels tu as travaillé ?
Simon : Publicités, clips et pilotes de série, aussi excitants que dépaysants, puisque les deux années où j’ai officié comme assistant de production en plateau et assistant déco sont nées d’un quiproquo. Je suis arrivé en prépa d’un long-métrage auto-produit et joyeusement fauché, affilié à la machinerie par un assistant de production manifestement aussi manuel que moi.
D’un tournage parfaitement surréaliste en Auvergne ont découlé de très jolies rencontres et deux années de travaux aux postes mentionnés ci-dessus. Autant d’expériences plutôt passionnantes et surprenantes.
On t’a également vu comme chroniqueur dans l’émission ‘Le Cercle’ de Canal +. Ça te manque de ne plus pouvoir partager ta passion à l’écran ?
Simon : Alors, ce n’est pas seulement que ça me manque, c’est que ça me ronge le cerveau. Le Cercle a cela de très beau d’avoir réussi l’assemblage d’un groupe à la fois suffisamment bienveillant pour que chacun ait une immense confiance en ses compagnons d’armes, et suffisamment malicieux pour générer une très belle électricité en plateau. Avec pour résultat un collectif qui permet à chacun de se trouver des moments de passion et de partage très forts, rendus possibles par une addition d’empathie. Chacun y est mis en avant, par la communauté de tous.
Un plaisir retrouvé avec les nouveaux contenus d’Ecran Large ?
Simon : Un plaisir conjugué, plus que retrouvé. C’est une mécanique très différente, de se lancer au sein d’un plateau, d’un groupe, sous l’égide d’un présentateur, et de s’exprimer seul face caméra, ou en duo. Je serais même tenté de dire qu’exception faite de la caméra elle-même, c’est une pratique fondamentalement différente, qui réclame une mélodie, un rapport à soi, à son expression, qui n’ont que peu de choses à voir avec celle d’une émission en bande.
Il est nécessaire, pour être pertinent et s’y amuser, de trouver sa mélodie, son tempo, son terrain de mise en danger, ce déséquilibre qui oblige à trouver ce grand écart entre équilibre et véritable lâcher-prise, mais je pense que c’est cette tension qui constitue l’unique point commun entre les deux.
Diriez-vous qu’il est nécessaire d’avoir votre formation et votre expérience pour parler de cinéma ?
Geoffrey : Oh que non. Ecran Large en est, j’espère, la meilleure preuve. Dans l’équipe, on a des gens qui ont une pure formation de journaliste, qui sortent d’une école de cinéma comme nous, ou de la fac, avec une approche cinéma ou plus largement artistique.
Certaines personnes écrivent et réalisent des projets, d’autres sont uniquement intéressées par une approche théorique, et n’ont jamais mis les pieds sur un plateau. Ce n’est pas un accident : on cherche de la diversité dans les parcours, même si ça reste relatif, et que c’est tout sauf simple vu le petit site qu’on est. Ce qui compte, c’est la passion, le point de vue, la sensibilité, et la soif de découvrir, réfléchir et écrire. C’est la seule formation qui compte, et elle ne se fait pas simplement dans les amphi.
Simon : Il est nécessaire de se former, et d’entamer une expérience (qui demeurera par définition, perpétuellement inachevée), mais il n’existe pas de formation évidente, de voie royale, ou de déterminisme excluant. Parler du cinéma réclame d’être exigeant avec soi-même, de régulièrement se confronter aux styles, aux chapelles ou aux écoles qu’on récuse, pour mieux comprendre sa défiance, ou pour l’abattre, de toujours envisager sa pratique comme un partage plutôt que comme un don, comme une transmission qui nécessite une réciprocité. J’ai tendance à croire que se confronter au classicisme et à la culture académique demeure indispensable, surtout si on prétend les battre en brèche.
Mais ce n’est pas une question de formation, ou d’expérience professionnelle. C’est histoire de curiosité et d’appétit.
Quelle est votre définition de la cinéphilie ?
Geoffrey : C’est vouloir et pouvoir discuter, même si (et surtout si) on n’est pas d’accord sur une œuvre ou un.e artiste. Parce que le dénominateur commun entre les cinéphiles, ça restera la passion, et le besoin de voir et revoir et réfléchir et découvrir et partager. Donc la cinéphile, en tout cas celle qui me plaît et qu’on défend sur Ecran Large, ce n’est pas s’autoproclamer juge de la bonne ou mauvaise cinéphilie, hiérarchiser les genres et les gens, alimenter les guerres de camps et bloquer les échanges avec tout un tas d’étiquettes qui réduisent les personnes, parce que c’est plus simple que de débattre.
Simon : Un cinéphile, c’est quelqu’un qui mange et boit beaucoup, et a une idée arrêtée de ce qu’est un mauvais cinéphile. Sinon, c’est quelqu’un qui n’arrive pas à s’endormir devant un long-métrage qu’il n’a jamais vu.
Qu’est ce qui vous a donné cette vocation ?
Geoffrey : Je dirais qu’il y a eu trois paliers. Le premier, c’est quand je me posais devant la TV pour regarder Aliens le retour ou Les Oiseaux, avec ma mère. Pas de cauchemar, juste une immense fascination. Le deuxième, c’est quand j’ai découvert Scream 2, qui m’a passionné et m’a ouvert plein de portes (Wes Craven bien sûr, mais aussi Gregg Araki, via Rose McGowan dans le premier Scream).
Le troisième, c’est l’option cinéma audiovisuel de mon petit lycée en Mayenne. Là, j’ai vu Pierrot le fou, et tant pis si c’est cliché mais voir Belmondo et Anna Karina quitter Paris, et comment Godard filme ça… un choc. Là, je me suis dit : ok, le cinéma c’est pas juste pour me divertir. Il y a un truc supérieur, absolu, que je veux comprendre, et faire.
Simon : Je ne sais pas. J’ai le sentiment que ma seule vocation, c’est plutôt celle du conteur, qui me paraît tout à fait compatible avec le rôle du critique, et qui me vient à la fois d’avoir assisté, tout môme, à des contes chantés dans une bibliothèque de Cosne sur Loire, et d’avoir toujours ressenti la joie profonde qu’engendrait chez moi le fait de raconter.
Cette équation s’est incarnée dans le cinéma et son partage, mais ne s’y limite pas.
Quelle est votre toute première expérience avec internet ?
Geoffrey : On dirait un mauvais téléfilm (ou le pilote de Paris 16 tiens), mais à mon arrivée à Paris, à 18 ans. Là, j’ai eu internet, dans ma chambre étudiante, et ça a été un puits sans fond. Boulimie totale de films et séries, à un niveau totalement ridicule avec le recul. Donc ma première expérience a été celle de la consommation frénétique, sept jours sur sept.
Pour ce métier, ma première expérience marquante a été la critique de Solomon Kane, en 2009, sur DVDrama. J’ai eu droit à mes premiers commentaires énervés, insultants et enragés. Parce que je trouvais que c’était une merde. Ça a été un petit choc ces réactions. Que j’étais naïf…
Simon : On n’avait pas d’ordinateur chez moi, donc, même si j’avais lu et entendu deux trois bricoles chez moi ou dans des journaux, Internet, c’était un truc profondément abstrait. Et puis, en troisième, le grand frère d’un copain est arrivé devant nous, fier comme un paon, pour expliquer qu’il avait piraté le premier Spider-Man de Sam Raimi, que j’ai donc dû voir dans une résolution inférieure au nombre de boutons que j’avais sur le visage.
Ce fut mon premier contact avec Internet, le fondement d’une méfiance profonde avec l’idée de l’instantanéité, et la certitude que dieu était forcément mort, pour avoir laissé un grand frère prognathe me flinguer la découverte de Spider-Man sur grand écran.
Quelles sont vos sources d’inspiration ?
Geoffrey : Comme créatif, je dirais Bertrand Blier, Gregg Araki, Richard Kelly, Vincenzo Natali, Robert Altman, Lars Von Trier, Shane Carruth, Todd Solondz, Aaron Sorkin, Jacques Tati, Alan Ball, Charlie Kaufman, Lovecraft et Trent Reznor.
Simon : C’est à peu près toujours la littérature, que je tiens pour l’art suprême, ou plutôt l’art premier. Celui qui nécessite le moins de matériaux et engendre dans notre esprit la plus viscérale matérialité, en plus d’être un outil d’émancipation surpuissant. C’est l’art qui provoque et génère en moi le plus d’images, de zones de liberté, de ruptures, et dont je retire les émotions, les couleurs, qui me poussent à écrire, mais aussi à penser le cinéma.
Pensez-vous que les salles de cinéma sauront faire face aux plateformes de streaming ?
Geoffrey : Je vais déjà commencer par une évidence : je ne sais pas. C’est important, je pense, de le rappeler, parce qu’il suffit de parler à des collègues, des exploitants ou regarder les stratégies des studios pour se dire que visiblement, personne ne sait. Et c’est pas grave de ne pas savoir et ne pas la jouer expert ou medium.
Cela dit, je pense que les deux coexisteront, et que la vraie question est plutôt de savoir quels genres de films continueront à être exploités en salles, et lesquels seront réservés à la SVOD. Le fossé va t-il se creuser et devenir infranchissable pour certains ? Les premières victimes de cette situation, de cette concurrence qui devient parfois une guerre, ne sont pas les grosses productions. Donc je me demande quelles répercussions tout ça aura, à long terme, sur l’écosystème, et la variété des œuvres. N’oublions pas que la fréquentation des salles de ciné françaises était en progression avant la pandémie, en 2019 c’était une année quasiment record, donc il y a un public. Même s’il y a Netflix et compagnie. Et même si ce public a peut-être tendance à se concentrer sur certains films, de plus en plus…
Simon : Faire face, oui, assurément. Mais faire face comment ? Retrouver la répartition des forces d’avant la crise sanitaire ? Cela semble peu probable, d’autant plus que ces quelques mois ont sensibilisé un nouveau pan des spectateurs à la question de la chronologie des médias, qui leur paraît absurde. D’autant plus absurde que quand bien même les grands acteurs de l’industrie se concertent pour l’amender, on n’aborde jamais la question que sous son angle actuel : resserrer ou dilater les fenêtres d’exploitation. Or, c’est bien la question de permettre plusieurs types de fenêtres, de parcours, qui se pose.
Les salles survivront, et survivront solidement, à deux conditions. Premièrement, que le législateur assume que l’environnement économique du cinéma est fondé sur l’interdépendance entre différents formats et usages, et que laisser l’un d’entre eux écraser les autres serait mortifère pour le secteur économique, et pour notre rang culturel. Mais il faut aussi se poser la question de rendre la salle désirable au plus grand nombre. Pour de plus en plus de spectateurs, le cinéma est un lieu dont le confort est discutable, dont le prix est prohibitif et dont la programmation est aussi désirable qu’un banana split au Prozac.
Que pensez-vous de la multiplication des plateformes de streaming ? Selon-vous vont-elles perdurer dans le temps ?
Geoffrey : Je dirais que tout est possible. Personne n’imaginait que cette guerre du streaming allait démarrer aussi vite, avec tant de milliards jetés de tous les côtés, et un tel enthousiasme du public. On est encore dans l’œil du cyclone, avec beaucoup d’inconnus dans l’équation : HBO Max commence à peine, Paramount+ arrive bientôt…
On a déjà assisté au crash de Quibi et au décollage spectaculaire de Disney+, en quelques mois. En France, on n’a pas cette habitude d’abonnement multiples, mais aux USA, on peut être abonné à HBO, Showtime, Starz etc. Et comme le marché américain est une priorité pour ces plateformes… pas sûr que la question soit si importante que ça au fond.
Je me demande surtout ce qui se passera après la première phase (celle où on claque des milliards pour lancer la plateforme, se payer des talents et lancer de gros contenus), quand il faudra commencer à trier et gérer les succès et échecs. Vu comment Netflix continue à dépenser beaucoup, cette course sans fin ne risque pas de se calmer, en tout cas pour les gros acteurs de la SVOD – parce qu’il y aura sûrement d’autres « victimes », comme Quibi. Je me demande aussi comment on va tous gérer le flou total sur les chiffres de la SVOD, qui arrange bien le département marketing des firmes – mais bloque toute analyse ou décryptage.
Simon : Les utilisateurs ne pourront pas multiplier les abonnements, mais cette question me paraît totalement artificielle. Personne n’a jamais pu se payer TOUTES les séances des nouveautés de la semaine. Ou faire quotidiennement 60km pour accéder au cinéma le plus proche. Cette problématique me paraît d’autant plus sophistique que pour le prix de la plus modeste des plateformes, le spectateur a accès à une programmation autrement plus vaste que ce que permettait hier une petite salle de cinéma.
Pour autant la question du modèle économique de ces plateformes se pose. Actuellement, elles fonctionnent grâce à une capitalisation boursière qui a des airs de bulle, à des service tiers, ou à leur digestion par de giga-groupes qui les transforment en produit d’appel supposément rentables.
La question véritable, c’est celle, dans l’hypothèse d’une déflation des salles, de la raréfaction voire de la disparition des blockbusters, de leur capacité à créer de l’évènement, de l’engouement, de l’électricité, autour de leur modèle et de leur mode de consommation. A l’heure actuelle, les plateformes sont parfaitement incapables de vivre sans les salles. Elles ont besoin de leurs auteurs pour faire des coups, de leur crise pour acheter en masse, et de ce qu’elles ont produit pour grossir leur catalogue. Qu’en sera-t-il et qu’en serait-il si elles asséchaient le puit de pétrole qu’elles siphonnent actuellement ?
Quel regard portez-vous sur le cinéma français ?
Geoffrey : Je pense que critiquer « le cinéma français » est aussi inintéressant que de parler du « cinéma d’horreur » ou « des films d’auteur » comme un tout. Sauf à parler du système économique français, et donc de pur business, tout mettre dans le même sac n’amène pas grand-chose. Le résumer aux comédies avec Dany Boon ou Philippe Lacheau, c’est comme résumer le cinéma américain à Marvel et Adam Sandler. C’est la face émergée de l’iceberg, donc le punchingball parfait.
Comme ailleurs, il y a de tout et n’importe quoi en France. Chaque année on peut tomber sur plein de choses étonnantes, audacieuses, voire géniales, qui sortent des cases. Il faut simplement vouloir et pouvoir les voir. Et c’est là le vrai problème : le système français privilégie encore certains genres (comme la comédie, les drames sociaux), par tradition, notamment côté CNC. Et aussi parce que c’est le signal envoyé par le public dans les salles. Peu importe ce qu’on en pense, des gros films comme Le Chant du loup, L’Empereur de Paris, Dans la brume… auraient pu aider d’autres projets du genre à exister. Et montrer que le public était partant. Je pense aussi Comment je suis devenu super-héros, attendu en 2021.
Quand de tels films marchent finalement mieux à l’étranger que chez nous, je me dis que c’est symptomatique. Le cinéma de genre l’illustre parfaitement : on sait que même avec un très bon scénario, les producteurs et les distributeurs ont peur de se lancer. Un réalisateur m’a même raconté qu’on lui avait dit, « Ton scénario est super, et si c’était un film coréen, ça marcherait, on saurait comment le placer. Mais en français, non ». Je ne jette pas la pierre aux distributeurs et producteurs, ni au public. Je dis juste qu’il y a un problème plus large.
Prenons un cas de film d’horreur français : c’est un risque par principe, donc il aura un budget réduit, donc l’équipe devra sûrement faire de grosses concessions artistiques ; le budget promo sera limité, et comme les gros médias s’intéressent peu au genre (sauf s’il y a un visage très reconnu), il sera quasi invisible ; le film sera diffusé sur peu d’écrans, donc quasiment inaccessible hors Paris et grandes villes. Ce public chanceux hésitera sûrement, par peur que ce soit pas à la hauteur d’un film de genre étranger, et le mauvais score au box-office confirmera que c’est bien un risque. Çà se mord la queue. Et difficile d’y voir une issue réelle sur le long terme, à part quelques mini boosts comme au début des années 2000 (les prod Bee Movies, ou French Frayeur chez Canal), ou récemment avec Grave.
Simon : On entend que le cinéma français est mauvais. C’est un assez bon thermomètre pour repérer les gens qui ne le regardent pas, ne le connaissent pas, ne s’y intéressent pas, mais palpitent mollement pour des produits désincarnés venu des États-Unis, qu’ils jetterait avec l’eau du bain si on leur présentait comme français.
Il y a en France une détestation profonde d’un cinéma qui est perçu à la fois comme une orgie beauf à destination des prime times des grandes chaînes jadis hertziennes, et de l’autre comme un véhicule de domination de classe. Il y aurait une comédie méprisant le peuple pour le peuple et de l’autre côté, une sorte de lion’s club crapoteux du cinéma d’auteur, financé par les petits copains pour qu’on s’y rende comme à la messe entre cousins aux pieds palmés remontant les rigoles de champagne avarié depuis les fin fonds de Saint Germain des prés.
A bien y regarder, ces deux clichés sont vrais. Mais ils ne représentent qu’une proportion ridicule de ce qui se produit en France. Nous avons un des paysages cinématographiques les plus divers, vifs, créatifs, atypiques, du monde entier. Un paquet de pays rêveraient d’avoir un système de protection, d’encouragement et de financement tel que le nôtre. Certains, comme la Corée, l’ont d’ailleurs dupliqué. Avec succès.
Diriez-vous que Zack Snyder est un auteur ?
Geoffrey : « Auteur » n’a pas un sens figé et repose largement sur la sensibilité, donc oui, sans aucun doute. Je pense qu’il y a aussi une confusion parfois entre reconnaître l’auteur, et l’adouber. Zack Snyder a des thématiques, des obsessions, une identité forte. On peut avoir envie de se crever les yeux devant ses films, mais il faudrait être aveugle pour ne pas voir une cohérence. Donc oui.
Et si la question sous-jacente, c’est de savoir s’il peut exister des auteurs dans les blockbusters, et les films de super-héros, alors c’est un oui sans aucune hésitation.
Simon : Bah quand un studio en est à baptiser un film du nom de son réalisateur (coucou Zack Snyder’s Justice League), à priori, c’est un auteur.
Ben Affleck (Batman) et Zack Snyder sur les reshoots de l’automne 2020 du Snyder Cut. Une nouvelle séquence de quatre minutes pour le knightmare.
Justement, récemment nous avons pu voir le Zack Snyder’s Justice League. Etes-vous d’accord pour dire qu’il fallait le laisser terminer son arc de cinq films ?
Geoffrey : Ce qui est sûr, c’est qu’on en avait envie, parce que c’est ambitieux et excitant. Après, est-ce qu’il « fallait »… Justice League a été fait au cœur du système des studios, donc c’est largement un business avant d’être du cinéma. Ce n’est pas la première ni la dernière fois que ça arrive, même si le cas du Snyder Cut est unique.
Sinon, à ce compte, je pense qu’il « fallait » qu’un studio finance Les Montagnes Hallucinées réalisé par Guillermo Del Toro, produit par James Cameron, et avec Tom Cruise. Il « fallait » qu’un studio finance The Modern Ocean, film d’aventure et de pirates de Shane Carruth, produit par Fincher et Soderbergh, avec Anne Hathaway, Keanu Reeves et Daniel Radcliffe. Il fallait que Josh Trank sorte sa version des 4 Fantastiques aussi. On peut en lister des dizaines comme ça. J’ai donc un peu de mal avec l’idée que Zack Snyder est un cas à part, qui dépasserait les autres. Faire un tel film, avec de tels enjeux, va avec des contraintes immenses.
Pour nous, l’évidence est : il fallait qu’il suive ses plans, c’est un artiste.
Pour Warner, c’était peut-être : il faut revoir ces plans, ce n’est pas tenable sur le moyen terme.
Quand on parle de films à 200 ou 300 millions hors promo, on ne peut pas balayer le business pour uniquement parler art. Mais bon, rien n’est impossible : le remontage de Superman II, Southland Tales ressorti en Blu-ray version director’s cut, et le Snyder Cut le prouvent. Donc son arc de cinq films existera peut-être, sous une forme ou une autre.
Simon : Je ne comprends même pas la formulation. On ne parle pas d’un canard sauvage, fauché en plein vol par un vilain chasseur. La seule légitimité de Zack Snyder (et de tout réalisateur) à faire un film, c’est sa capacité à le réaliser, ou à trouver des gens qui souhaitent lui donner les moyens de le faire.
Étant donné ce que coûtent les films de Snyder, il a besoin pour y parvenir, des centaines de millions d’un studio. Si ce dernier estime que se retrouver sur les bras avec un des machins les plus laids de l’histoire du cinéma, inexploitable en salles, après deux contre-performances au box-office, je vois assez mal ce qu’il y a rétorquer à ça.
Et puis, que Snyder, réalisateur passionnant s’il en est, sorte de l’industrie ultra-normée et javellisée des super-héros pour revenir à des projets plus personnels, j’y vois plutôt un motif de satisfaction.
Passons à un sujet qui fâche (rires). Que pensez-vous de la stratégie de Marvel Studios pour son Marvel Cinematic Universe ?
Geoffrey : Là encore, j’oublie mon petit avis sur ces films. La stratégie, le projet, c’est indubitablement quelque chose de fou et d’unique. Le terme « visionnaire » est galvaudé, mais là c’est visionnaire. Aujourd’hui, on regarde vite ça d’un air blasé, en répétant à quel point c’est une usine, qui uniformise le scénario, la réalisateur, les effets visuels. Peut-être, probablement, sûrement. Mais quand ça a été doucement lancé en 2008, c’était un énorme pari.
Je sais qu’on peut tous en avoir marre, parfois, de ces super-héros. Mais je fais régulièrement une pause pour me dire qu’on assiste à quelque chose de jamais vu. On est clairement en plein dans quelque chose qui sera le chapitre d’un livre sur l’histoire du cinéma américain. Et encore une fois, je ne parle pas de la qualité des films : Hollywood a toujours été une usine, ça n’a rien de nouveau, seule la couleur des jouets change dans les rayons. On peut pleurer sur ça, et heureusement que tant de gens questionnent et critiquent ce modèle. Mais d’un point de vue froid de business, Marvel a réussi quelque chose d’énorme.
Simon : En termes de stratégie, c’est une réussite éclatante. Non seulement pour Disney, qui a connu une réussite plus massive que jamais auparavant dans son histoire, mais aussi en regard d’Hollywood, qui singe depuis dix ans la recette Marvel, sans y parvenir.
Qui dit stratégie global, dit formatage des contenus qui reposent tous sur un même cahier des charges. Toutefois, y-a-t-il un contenu Marvel Studios qui à vos yeux a su faire la différence ?
Geoffrey : J’aime l’écriture de Joss Whedon sur le premier Avengers (qui m’a parfois rappelé les grandes heures de Buffy), et la mise en scène de Joe Johnston sur Captain America. L’alliage des deux, je dirais que c’est James Gunn avec Les Gardiens de la Galaxie. J’ai toujours la sensation qu’il a exploité au mieux la formule Marvel, dans un mariage d’émotions, de fantaisie, d’humour, d’aventures, et de second degré (avec ses personnages, mais également le MCU lui-même). Et j’en ai marre des super-héros qui défendent du goudron dans une métropole, donc tout ce qui est véritablement cosmique, c’est un grand oui.
Simon : Le premier Captain America est un film d’aventure rétro assez imparable. Le second Gardiens de la Galaxie me fait immanquablement chialer, mais je mets ça sur le dos de Kurt Russell.
Pour rester dans le monde des super héros, Warner Bros et DC Films parlent désormais de multivers. Une stratégie qui permet de placer tous les films existants – des Superman de Richard Donner aux films les plus récents – dans le même multivers sans pour autant se soucier d’une quelconque cohérence. Où va Warner selon-vous ? Faut-il s’attendre à un Crisis On Infinite Earths au cinéma ?
Geoffrey : Est-ce qu’ils savent eux-mêmes où ils vont ? Et est-ce que finalement, c’est si important ? En ayant la tête dedans, médias et fans, on oublie qu’une grande partie du public se fiche peut-être de ces « détails ».
Quand Joker est sorti, c’était d’abord un film, avant d’être « mais est-ce que c’est la même timeline que ce Batman ? ». Quand Dark Phoenix est sorti, c’était d’abord un film (nul), avant d’être « encore cette histoire de Jean Grey ? C’est un remake ou pas ? ». Quand Superman apparaît à la fin de Shazam, c’est d’abord Superman, avant d’être Henry Cavill (ou pas). Quand Spider-Man est rebooté 2 fois d’affilée, ça restait d’abord un film Spider-Man.
Donc je ne sais pas à quel point ça pose problème au fond. Les croisements qu’il y a eu entre les films et les séries de l’Arrowverse montrent que c’est d’abord une source de petit plaisir, et pas forcément plus. D’autant que j’aime bien la liberté que ça peut laisser, pour que DC ait sa propre identité. J’aime Man of Steel et Aquaman, mais il y a un gouffre entre les deux, et c’est sûrement possible car il n’y pas d’univers étendu strict.
Dans l’idéal, ça laisse plus de place aux cinéastes, et ça exploite la richesse des comics et des personnages – au lieu de tout ramener sur une ligne générale. Toutefois, on sait que les comics Marvel s’étaient cassés la gueule dans les années 90, à force de trop ouvrir d’univers parallèles et s’y perdre. Il y a donc un risque. Je suis très curieux de voir ce que ça va devenir d’ici 5-10 ans.
Simon : Je ne sais vraiment pas à quoi m’attendre, et je les soupçonne de ne pas non plus en avoir la moindre idée. Si Warner veut user de cette carte pour tout remettre à plat et tenter de se donner une direction claire, pourquoi pas. Mais plus sérieusement, si ces studios s’avancent véritablement sur cette voie… je pense qu’ils le regretteront.
C’est un concept qui me paraît peu fédérateur auprès du grand public, très piégeux dans le temps (du genre à scinder le public ou à être un écueil à l’arrivée de nouveaux spectateurs), et c’est déjà ce type de développement qui a failli causer la banqueroute de Marvel, au tournant des années 90.
Attention, question difficile (rires). Qui est le meilleur… Batman ? Bruce Wayne ? Film Batman ? Et pourquoi ?
Geoffrey : Simon en parlera mieux que moi, parce que pour le coup je suis peu sensible à ce personnage. Pour moi, le meilleur DE Batman, c’est Michelle Pfeiffer en Catwoman. Donc Batman le défi est mon préféré, sûrement parce que je m’en fous de Batman dedans (comme Tim Burton), et parce que c’est le seul qui peut me faire verser une larme tout en m’émerveillant.
Simon : Le meilleur Bruce Wayne, c’est Michael Keaton. Parce que c’est le seul à en avoir fait un personnage complet. Après lui, il n’y a eu que des concepts. Des émotions. Son Bruce est le seul à avoir une personnalité propre, des enjeux qui ne soient que les siens.
Le meilleur Batman… c’est peut-être celui de Bale, malgré sa voix, qui m’agace terriblement, il y a dans ce Batman une intranquillité très intéressante, une sorte de sur-compensation permanente qui le rend passionnant.
Le meilleur film consacré au personnage c’est évidemment Batman Returns. Parce que ce n’est pas un bon Batman. Ou un bon film de super-héros; C’est simplement un chef d’œuvre, qui, de son écriture, en passant par sa musique, sa mise en scène, son montage, sa photo, son interprétation et sans doute le menu de sa cantine, impose à la fois une vision profondément original, un spectacle total, et une poésie qu’on n’a plus jamais retrouvé chez le personnage.
Si vous deviez vous identifier à un personnage de fiction, lequel serait-ce ? Et pourquoi ?
Geoffrey : J’hésite entre April dans Parks & Recreation, et Dark Smith dans Nowhere.
Simon : Le fils, dans Big Fish. Je partage avec lui le désarroi profond d’avoir souvent le sentiment d’être balloté par des héritages, que je ne peux m’approprier qu’en les racontant, et qui parfois m’emportent. Son rapport au récit, à la fiction, et donc à la foi et ultimement au don, me bouleversent.
Ces dernières années, Hollywood a massacré plusieurs franchises iconiques : Die Hard, Predator, Terminator etc. Diriez-vous qu’il faudrait les abandonner ?
Geoffrey : Abandonner, je ne sais pas, mais repenser, et faire une pause… certainement. Je ne vais pas crier au scandale par principe, parce que recycler une marque, un univers, ça n’a rien de nouveau. Des Universal Monsters aux comics, en passant par les jeux vidéo, ça a toujours été un moteur de la pop culture.
Tant mieux, tant pis, c’est comme ça, et ça donne parfois de belles choses. Mais là, le grand écart est trop grand : on part de purs films de cinéastes, avec des budgets relativement petits, pour arriver à de gros produits hollywoodiens. The Predator est sûrement le symptôme ultime : Shane Black était un choix intéressant, et ça se voit dans plusieurs scènes décalées, mais le studio a sûrement eu peur, et fait marche arrière pour rester dans les clous.
Résultat : ça n’a aucun sens, aucune âme. Il n’y plus aucun risque, aucune vision, aucune évolution. Même chose pour Terminator : le quatrième opus réalisé par McG a des défauts, mais au moins il sautait dans l’inconnu du post-apocalyptique. Sauf qu’après, ils sont revenus dans le pré-apocalyptique, encore et encore. Évidemment que ça tourne en rond. La saga Alien devrait servir de modèle : de vrais cinéastes, de vrais risques narratifs, et beaucoup de choix radicaux qui ferment des portes (tuer Hicks et Newt, tuer Ripley et la faire revenir en clone).
Simon : Je dirais que le massacre a été tel que je n’ai absolument plus rien à carrer de leur avenir.
Geoffrey : A peu près tout le temps. Un exemple : A.I : Intelligence Artificielle, réalisé par Spielberg. Je l’ai vu jeune, avec une envie de pure SF. Je n’ai rien compris, j’ai été totalement perdu en cours de route. Et quand je l’ai revu plus tard, j’ai trouvé ça majestueux et magnifique. Un de mes Spielberg préférés maintenant.
Simon : Oui, souvent. Récemment, au sujet de The Predator, que j’ai d’abord vécu comme un monstrueux ratage doublé d’un crachat. Et qui me paraît aujourd’hui une sorte de doigt d’honneur punk traversé de trouvailles assez géniales.
Parlons d’Ecran Large. Est-il juste de dire qu’il y a une nouvelle dynamique au sein de votre rédaction ?
Geoffrey : Une rédaction, ça évolue constamment. Diriger un site comme Ecran Large, c’est une bataille perpétuelle, pour exister, continuer, s’adapter et se défendre, sans jamais oublier ce qui compte – la passion pour le cinéma, les séries, les jeux vidéo, les comics etc. Et comme avec un gros paquebot, un changement prend du temps.
Depuis maintenant 3-4 ans je dirais, on a lancé plusieurs chantiers, à la fois dans la ligne edito, et dans l’équipe. D’un côté, il faut exister sur le marché, couvrir l’actu et en tirer profit. De l’autre, il ne faut jamais s’y noyer et s’y perdre, à la fois pour les lecteurs et lectrices, et pour l’équipe elle-même. Cet équilibre est difficile à tenir. Depuis quelques années maintenant, on a assemblé une équipe assez complète, unie, diversifiée mais harmonieuse. On se complète bien, on s’entend bien, et on s’écoute. On est beaucoup plus exigeants et clairs avec nous-mêmes, et ça nous permet d’être plus ambitieux, et de prendre quelques risques pour avancer.
Simon : Je ne crois pas. Ou plutôt, il n’y a pas ‘une nouvelle dynamique’. La nature d’EL, qui est celle d’un média web, est par essence d’être fluide et de toujours se penser comme sur le point de se réinventer, pas pour survivre, ou dans la contrainte, mais parce que considérant la cinéphilie et sa transmission comme une matière éminemment fluide et ne pouvant être cantonnée à un seul format d’expression.
J’ai parlé de ‘nouvelle dynamique’, car nous sommes nombreux à avoir remarqué qu’il y a davantage de contenus et notamment de la vidéo. Y-a-t-il un lien entre la crise sanitaire et ce second souffle que l’on ressent chez Ecran Large ?
Geoffrey : Le chantier YouTube était déjà lancé depuis un moment, on avait fait pas mal d’essais, on avait appris de nos erreurs. 2020 devait être le grand lancement et il se trouve qu’on s’est tous pris 2020 dans la tronche. Au milieu de ce bordel, avec une équipe réorganisée pendant le confinement et une actu bouleversée, on a pu concrétiser des choses dont on avait envie. Hors vidéo, sur les articles, on monte en puissance année après année, avec toujours la même envie de parler mieux et plus, de davantage d’œuvres. Mais ce n’est pas lié à la crise, c’était lancé avant et c’est un chantier sans fin. Parce qu’on peut et veut toujours faire mieux.
Simon : Non, la volonté et le projet d’intensification de la vidéo étaient bien antérieurs. En revanche, la crise sanitaire a sans doute facilité et accéléré les choses.
D’ailleurs, pouvez-vous nous présenter les autres ‘acteurs’ de la rédaction :
Geoffrey : Il y a d’abord l’équipe interne, avec Simon et moi, et deux autres personnes : Alexandre Janowiak, secrétaire de rédaction et rédacteur, qui vénère David Fincher et The Leftovers ; et Mathieu Jaborska, rédacteur et community manager, qui vénère Cronenberg et le gore.
Ensuite, il y a les freelances, quasiment tous d’ex stagiaires, avec des domaines ou des sujets de prédilection: Déborah Lechner (films d’animation et animes), Arnold Petit (comics), Prescilia Correnti(jeux vidéo), Camille Vignes (séries), Elliot Amor (animes, mangas), Flavien Appavou (mangas, animes), Mathias Penguilly (séries) et Lino Cassinat (un peu tout).
Enfin, il y a nos super stagiaires : Antoine Desrues, Salim Belghache et Maeva Antoni.
A côté de la rédaction, il y a l’indispensable Maximin Bulteau, notre cadreur et monteur, et Lena Lescureux, qui s’occupe des partenariats.
Est-ce que le format vidéo vous a donné une nouvelle proximité avec votre lectorat ?
Geoffrey : J’ai surtout l’impression qu’un nouveau lectorat nous a découverts. Pas mal de gens apprennent l’existence d’Ecran Large via YouTube, et ne savent pas que le gros de notre travail est sur le site. Pour les autres, c’est effectivement un moyen de se rapprocher de nous, et mieux nous définir. Comme on revendique notre dynamique d’équipe, et qu’on rappelle constamment qu’Ecran Large c’est une rédaction avec des personnes ayant des avis et des personnalités différentes, la vidéo permet d’incarner tout ça.
C’est une continuation logique et naturelle de ce qu’on fait et écrit au quotidien : discuter, débattre, blaguer.
Simon : C’est difficile à dire. J’ai le sentiment que ça ne change pas drastiquement des retours que nous recevons sur d’autres formats. Ils diffèrent sur la forme, mais on observe des schémas et des comportements qui me paraissent assez voisins. Certes, il y a une forme d’identification et d’affect qui sont plus marqués via les formats vidéo, mais comme nous fonctionnons là aussi en rédaction, et qu’il n’y a pas un visage unique qui incarne EL, ça a tendance à amoindrir un peu cet aspect, ou à le rendre plus diffus.
Avez-vous été surpris par l’accueil positif de ces nouveaux contenus ?
Geoffrey : Je m’attendais vraiment à beaucoup plus de violence dans les commentaires. Il y en a, et on les modère comme sur le site et sur les réseaux sociaux pour protéger l’espace d’échange. Mais je m’étais préparé à pire honnêtement.
Simon : Pas surpris qu’il y ait des retours positifs dans l’absolu. On avait très envie de se lancer depuis un moment, nos expériences, chacun de nos côtés, sur d’autres médias, d’autres formats, nous laissaient penser qu’il y avait non seulement un public qui pouvait s’intéresser à ce qu’on avait envie de proposer, tout comme il nous semblait qu’en bossant, on pouvait réussir à amener ce qu’on fait sur le site, sur Youtube. Ensuite, oui, la forme, souvent très directe, incarnée et personnelle que prennent les retours est toujours surprenante. Et stimulante.
Vous accordez également une place particulière aux jeux vidéo. En tant que joueur, quelle a été votre plus grande claque vidéoludique ?
Geoffrey : Malheureux, c’est un terrain glissant ça, je vais être obligé de reparler de Tomb Raider. La Révélation finale a été un moment majeur dans ma vie de joueur, parce qu’il m’a ouvert un imaginaire en 3D, et m’a fait tomber amoureux de cette saga qui me passionne encore.
J’ai grandi avec les mélodies et les couleurs de Streets of Rage et Golden Axe sur Mega Drive, mais la Playstation a tout changé pour moi. Et comme je ne peux pas accepter l’idée de ne citer qu’un jeu, je vais dire : les trois premiers Resident Evil, les trois premiers Silent Hill, Bioshock, Half Life 1 et 2, Alone in the Dark 4, Parasite Eve 2, Dead Space, Alien : Isolation, Horizon : Zero Dawn, et la trilogie Mass Effect. Côté plus indé : The Talos Principle, Fez, Limbo, A Plague Tale : Innocence, et pas mal de points and click comme Mystery Case Files.
Simon : Même des années après, ça reste Silent Hill 2. Je me le refais régulièrement, et je suis toujours aussi impressionné, puis balayé, parce ce qui a été accompli avec ici. On l’a souvent présenté comme le grand chef d’œuvre du survival horror, ce qu’il est, mais la formule est loin de tout en dire.
Au fond, c’est quoi la peur ? Et à fortiori la peur, manette en main ? On peut s’arrêter sur une définition assez simple, quoique très peu de jeux parviennent à en remplir les critères. Ce serait la rencontre, fructueuse, entre la terreur d’un côté (l’adrénaline, l’excitation provoquée par le surgissement brutal d’une monstruosité hostile, la mécanique de Resident Evil, en gros) et l’angoisse de l’autre (soit une crainte beaucoup plus irrationnelle, volontiers existentielle, qui ne s’incarne pas tant dans un ennemi ou une figure abominable, mais dans un réseau de signes, qui sapent notre capacité à nous fier à notre environnement). Quand ces deux logiques co-existent et s’entrechoquent, qu’on traverse un décor en courant parce que la créature qu’on a entraperçu dans un recoin nous terrifie, et que le sentiment d’absolu vertige qui nous étreint à chaque intersection augmente, alors oui, là, on est dans la peur.
Et ce que nous montre Silent Hill 2, c’est que la peur devient elle-même un tremplin poétique et méditatif qui autorise à peu près toutes les folies, toutes les expérimentations. Jusqu’à nous emmener dans des zones très troubles, sans réponse définitive. Explorer la psyché de James, en marchant aux côtés de Maria, c’est une expérience de l’éblouissement amoureux transmise et par la mise en scène, et par le gameplay. Errer dans les rues de Silent Hill, c’est une traversée introspective plutôt démente. Comprendre qu’Angela est ici pour venger un inceste et ultimement se damner, c’est un uppercut.
Et puis, on se passionne, à raison, aujourd’hui pour les narrations in-game, environnementales. Certes Silent Hill 2 repose en grande partie sur ses cinématiques. Mais c’est bien le gameplay et le cheminement du joueur qui prend en charge une proportion non-négligeable du sens, des émotions, et donc de la qualité du jeu. On peut scruter toutes les cinématiques de SH2 et ne rien comprendre du récit, ou de son sens. En revanche, faire face, dans une boutique abandonnée, à ces quelques mots gribouillés sur des journaux, ‘THERE WAS A HOLE HERE, IT’S GONE NOW’, c’est plonger à pied joints dans un terrier du lapin blanc dont je ne suis toujours pas sorti, 20 ans plus tard. Bref, c’est un peu de la balle.
Geoffrey, récemment tu as proposé une vidéo qui synthétise la saga Tomb Raider. En tant que fan de Lara Croft, que souhaiterais-tu pour l’avenir de la franchise ?
Geoffrey : Vaste question… A un degré moindre, je pense que Tomb Raider est devenu comme Star Wars : on en a une perception différente selon la période où on tombé dedans. Je suis tombé amoureux de Tomb Raider à l’époque où c’était un jeu d’aventure solitaire, avec beaucoup d’exploration et de backtracking, avec un sens du merveilleux voire de l’horrifique très prononcé. C’est Lara Croft qui explore seule des endroits oubliés par le temps, repris par la nature, et hantés par des choses surnaturelles. Avec un sentiment d’isolement incroyable et magique.
Donc c’est ce que j’aimerais retrouver. Parce que cette vibe Uncharted a condamné les jeux récents : ça n’est pas aussi épique qu’Uncharted, parce que ça arrive après et que ça ne va pas aussi loin. Je pense que Tomb Raider a besoin de faire une pause et trouver un axe d’évolution un minimum révolutionnaire (c’est ça qui l’a fait naître à la base). Et pour ça, je pense qu’ils doivent arrêter avec leurs budgets énormes, parce que de toute évidence ça étouffe toute créativité tellement il y a d’enjeux.
Simon, de ton côté y-a-t-il un jeu / une franchise / un concepteur que tu souhaiterais évoquer dans une vidéo ?
Simon : Alors bon, du coup Silent Hill, oui, ça me titille pas mal. Mais j’ai très envie de me repencher sur la saga Legacy of Kain, Soul Reaver. En termes de pure création d’univers et de direction artistique, on touche à quelque chose de très important.
Un monde dont la mythologie est une excroissance de plusieurs figures mythiques communes, une appropriation de genres et de sous-genres pas franchement inédit, mais qui parvient à imposer une singularité remarquable. La direction artistique est affolante. A un point tel, qu’on peut raisonnablement soutenir qu’il n’y a que deux grands jeux au sein de la série, Blood Omen : Legacy of Kain et Legacy of Kain : Soul Reaver.
Et pourtant, les épisodes qui leur ont succédé ont pu passionner encore, par les seules grâces d’une direction artistique phénoménale et d’une dimension épique et nostalgique qui poussait à prolonger l’aventure. Aventure qui trouve ses racines dans quantité de récits séminaux, Raziel a quelque chose de génial dans sa dimension tragique. C’est un Ulysse mutilé et amoindri, qui avance vers un Ithaque dont il n’est même pas sûr qu’il existe, et dont chaque nouvelle ruade contre le destin vient l’enchâsser un peu plus dans une mécanique fatale.
Du coup, je suis assez curieux de cette série, qui m’a retourné le cerveau, et qui, si on veut être un peu méchant ou malicieux, a presque réussi à prouver qu’on pouvait – un peu – s’affranchir du gameplay et proposer un grand récit qui tienne à son atmosphère, ses protagonistes, son univers, sa musique… et ses dialogues. C’est assez inhabituel, de se dire qu’un jeu vaut pour ses textes. Et pourtant, je me souviens d’être tombé de ma chaise. Écouter les joutes oratoires interprétées par Bernard Lanneau et Benoit Allemane, c’est un truc stupéfiant. Comme quoi, il existe un espace, où, comme le cinéma avant lui d’ailleurs, le JV peut attirer les autres arts et les utiliser comme matière première. Et puis bon, toute œuvre qui représente les vampires autrement que comme des rock stars dégénérées en pantalon de cuir pétées à la cocaïne mérite un immense respect.
Comme moi, diriez-vous qu’Hideo Kojima est un auteur ?
Geoffrey : Je ne connais pas assez pour me prononcer sur son travail, mais avec mes connaissances limitées, je dirais oui, sans hésiter. Et si la question derrière est de savoir si un créateur de jeu vidéo peut être un auteur, alors oui, sans hésitation aucune.
Simon : A partir du moment où absolument tout le monde a une idée de ce qu’est un jeu d’Hideo Kojima, c’est incontestablement un auteur.
Pour autant, le voyez-vous à la direction d’un long-métrage ?
Geoffrey : Vu l’ambition visuelle et narrative de Death Stranding par exemple, j’aimerais beaucoup oui. Encore une fois, je ne suis pas grand connaisseur, mais je sens toujours un énorme appétit de cinéma, et il travaille sur cette frontière dans le rythme, la narration, l’écriture. La question est de savoir où il pourrait concrétiser un tel projet : un budget de blockbuster semble idéal, mais pas sûr que ça lui donne la liberté qui va avec son univers.
Simon : J’adorerais me tromper, mais il me semble que ce qui fait la – grande – valeur de ces travaux est parfaitement antinomiques du cinéma. Il créé de l’émotion en travaillant l’interaction, et en questionnant le joueur sur son rôle et le sens de ce dernier. Autant de concepts qui n’existent pas au cinéma.
Quelles sont dans vos vidéos, celles qui vous semblent les plus intéressantes, qui vous tiennent le plus à cœur, et pourquoi ?
Geoffrey : Je suis systématiquement frustré de pas pouvoir en dire plus, parce que la question de la durée des vidéos est toujours là, mais je suis pas trop mécontent de celle du Total Recall, où j’ai pu survoler plein de choses, autant dans le scénario que les effets visuels. Celle sur Tomb Raider était un peu un rêve, et elle a bien marché à notre échelle, donc je suis ravi. J’aime aussi beaucoup celle sur Buffy, avec Camille Vignes, parce qu’on en parlait depuis environ 2 ans (et même si on voulait évidemment faire beaucoup plus long sur le sujet).
Globalement, ce sont des vidéos avec une fibre nostalgique très forte, qui me ramènent à mon enfance ou mon adolescence.
Simon : La prochaine.
Quelle(s) chaîne(s) youtube cinéma conseillerez-vous aux lecteurs ?
Geoffrey : La Boîte à FX, parce que c’est un passionné qui décortique les effets visuels avec une précision folle. Zoétrope, parce que j’ai beaucoup aimé sa vidéo sur les teenmovies, passionnante et très bien montée. Les Chroniques de Vesper aussi – obligé, elle a fait une super vidéo sur Tomb Raider.
Simon : Le cinéma de M. Bobine, Intercut et Demoiselle d’Horreur. Mais je ne suis pas très chaîne ciné. Je préfère les bouquins. Mais pour le coup, les captations des conférences de Thoret sont très bien.
Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux jeunes créatifs qui souhaitent partager leurs univers sur la toile ?
Geoffrey : D’y aller sans (trop) hésiter ! Tout le monde a sa place. Qu’on aime les blockbusters ou les films dits d’auteur, qu’on soit une pile électrique ou qu’on ait une voix très posée, qu’on ait envie de parler d’actu ou de vieux films datant des années 60, qu’on veuille parler divertissement pur ou politique… Il y a plein de publics, et donc plein de place. A titre perso, j’aime beaucoup voir des personnes aussi différentes avoir des chaînes, je pense que c’est très important pour se dire que beaucoup de monde a une voix légitime, et peut l’utiliser.
Simon : Ils feraient mieux de faire ça sur Internet. C’est très bien les toiles, mais les galeries d’art n’ont plus le vent en poupe et les musées sont fermés.
Si vous pouvez vous adresser un message à vous-même à l’âge de 10ans, lequel serait-ce ?
Geoffrey : J’avais envie de faire une blague, mais en fait non. Je le préviendrais qu’il va découvrir ce qu’est l’homophobie ordinaire dans les cours d’école, que ça va l’inciter à se faire un barrage pour ne pas l’affronter tellement c’est violent, mais qu’il devrait plutôt demander de l’aide, et foncer dans le tas. Bien sûr, il n’obéirait pas, parce que c’est 15 ou 20 ans après qu’on comprend ça.
Simon : ‘Méfie-toi de Geoffrey Crété !’
Que feriez-vous avec un budget digne d’un blockbuster ?
Geoffrey : Je fais une grande pause dans ma vie pour réaliser 3, 4 ou 5 films avec des mid-budgets, et sans claquer 150 millions en promo.
Simon : Je mettrai sur pied un projet de d’anarcho-démocratie auvergnate dont les deux premières valeurs seraient la truffade, le vin rouge, et les maths.
Je fais appel à votre esprit créatif. A vous de me proposer quelque chose et de commenter.
Geoffrey : J’aimerais partager les concept arts de mon film, mais je ne peux pas encore le faire. Donc voici un beau xénomorphe acheté sur les puces, et créé avec des pièces de récupération. Ce que je trouve très malin pour rendre hommage à Giger.
Simon :
Quelles sont vos œuvres de références ?
Geoffrey : En films, Synecdoche, New York, The Hours, Magnolia, Tenue de soirée, Mysterious Skin, Aliens le retour, UpstreamColor, Le Cuisinier, le voleur, sa femme et son amant.
En série, Six Feet Under, Buffy contre les vampires, Battlestar Galactica. En livre, Celui qui chuchotait dans les ténèbres de Lovecraft, Construire un feu de Jack London, et Hyperion de Dan Simmons.
Simon : Massacre à la Tronçonneuse, Apocalypse Now et Buffet Froid pour le cinéma. Ubik, ça, Rodogune et Le Grand Meaulnes pour les bouquins.
Et quelles sont vos attentes ?
Geoffrey : La série Fondation, le remaster de Mass Effect, et ce film que Todd Solondz est censé faire avec Edgar Ramírez, Penélope Cruz, intitulé Love Child.
Simon : Si je les connaissais, je ne les attendrais plus.
En préparant cette interview, j’ai cherché comment on pourrait qualifier votre binôme. Finalement, je me suis dit que vous êtes les Starsky et Hutch de l’actualité cinéma, mais lequel de vous deux est Starsky ? Qui est Hutch ? (Rires)
Geoffrey : J’ai été sur Wikipedia pour répondre, et je peux clairement dire que je suis Hutch.
Simon : C’est donc là que je dois confesser ne jamais avoir vu aucun épisode de Starsky et Hutch. Alors du coup dans The Nice Guys, je serais probablement Russell Crowe. Physiquement. Parce que si on est un petit peu honnête, celui qui peut raisonnablement mettre une déculottée à l’autre, c’est Geoffrey, et celui qui est le plus susceptible de se brûler avec une cigarette sur la cuvette des toilettes, ce n’est pas Geoffey.
Si votre binôme était un buddymovie, quel serait son titre ? Et sa phrase d’accroche ?
Geoffrey : Les Aventures de Tango et Crash dans les griffes du pangolin.
Simon : Vin et Diesel. Deux carburants pour un seul moteur.
Que voudriez-vous dire à votre lectorat, vos abonné(e)s et aux prochains ?
Geoffrey : Déjà, merci, parce que l’écrasante majorité est super sympa, passionnée et bienveillante. Et sinon, qu’ils et elles ont un pouvoir à ne pas négliger. Comme quand on achète un ticket de cinéma pour un film plutôt qu’un autre, le choix des articles qu’on va lire ou ignorer n’est pas anodin. En tout cas, on le voit chaque jour.
Simon : ‘ça va bien se passer’.
Pour terminer, quelle question auriez-vous souhaité que je vous pose et qu’auriez-vous répondu ?
Geoffrey : « A quel point Simon se sent intellectuellement et physiquement menacé par toi ? ». Et je n’aurais pas répondu, par respect pour lui.
Simon : « – Quelle est la différence entre un merle ? – Aucune, il a les deux pattes pareilles. Surtout la gauche. »
Encore une fois merci Geoffrey, Simon d’avoir participé à Adopte un Créatif.
Geoffrey : Merci à toi, j’adore raconter ma vie comme si j’étais important.
Simon : Mais de rien !
Propos recueillis par Thomas O. pour Eklecty-City.fr, qui remercie Geoffrey et Simon de s’être prêtés au jeu d’une interview.
Pour célébrer la sortie de Kaamelott : Premier Volet d’Alexandre Astier au cinéma nous avons eu le plaisir de nous entretenir avec Guillaume Briat et Bô Gaultier de Kermoal.
Lors d’une rencontre et dédicace à la librairie Alfa BD, à Nice, les interprètes du Roi Burgonde (Guillaume Briat) et du garde du corps d’Attila le Hun (Bô Gaultier de Kermoal), dans l’univers d’Alxandre Astier, ont répondu à nos questions. L’occasion de revenir sur la carrière de nos deux comédiens, l’évolution de Kaamelott ainsi que leurs actualités respectifs.
Bonjour Bô Gaultier de Kermoal et Guillaume Briat, tout d’abord merci à vous deux de m’accorder cette interview. Avant de débuter, comment vous définiriez-vous en une phrase.
Guillaume Briat : Comédien, acteur, chauffeur accompagnateur (rires), j’ai plusieurs métiers. Comment je me définirais : intermittent, pas du spectacle, mais intermittent.
Bô Gaultier de Kermoal : Peintre, acteur et plutôt heureux et chanceux. C’est pas mal.
Nous célébrons aujourd’hui la sortie de Kaamelott : Premier Volet au cinéma. Lorsque vous avez commencé la série, imaginiez-vous cela possible ?
Bô Gaultier de Kermoal : Nous, quand on a commencé, Alexandre Astier était un illustre inconnu. Pour ma part, c’est Bruno Solo qui m’a amené sur la série qui me dit « Viens, lundi tu tournes un truc » et il s’est trouvé que c’était Kaamelott.
Je suis arrivé, il y avait Georges Beller, Emma De Caunes, et tout d’un coup, on était plongé dans univers médiéval. C’était assez rigolo. On ne pouvait pas imaginer, qu’il y allait avoir un film derrière. Déjà, on ne savait pas du tout si la série allait marcher.
Guillaume Briat : Les prémices, on ne sait jamais la suite. On était très heureux, on est toujours content. J’ai passé un casting un peu étrange parce que le Roi Burgonde est un peu étrange. Mais c’était en plus une sorte de figuration, intelligente comme on dit dans le métier. Finalement, pour moi ça s’est conclu avec un épisode à chaque livre de kaamelott.
C’était une aventure totalement étonnante. Comme souvent, on ne sait pas du tout ce que cela va donner. Là, il y a un premier film qui sort, peut être même qu’il y aura un deuxième, un troisième… c’est magnifique. C’est surtout un univers que je ne connaissais pas, dans lequel je n’avais jamais travaillé, le médiéval, les choses comme ça. C’est une aventure magnifique, vraiment.
Qu’entendez-vous par un casting étrange ? Quand vous dites ‘une figuration intelligente’ ce n’est pas une silhouette ?
Guillaume Briat : Si, ça peut être ça. Normalement, figurant c’est vraiment quelqu’un qui passe ou plutôt quelqu’un que l’on voit au loin, en arrière-arrière plan. Figuration intelligente, je ne connais pas exactement la définition, mais ce n’est pas quelqu’un qui parle. Dans mon cas, j’étais vraiment comédien, j’avais quelque chose à dire. Dans le sens où c’était vraiment étrange parce que le personnage du Roi Burgonde a des onomatopées… il fait des ‘pets’… il n’y a pas vraiment de texte.
Quand vous passez un casting avec un truc comme ça ; vous pouvez même être déçu que l’on vous propose ce genre de personnage d’un gros bonhomme qui pète, rote etc. Je n’avais pas les références qu’avait Astier. Je ne savais pas du tout que ce mec était formidable et que c’était un petit génie. Je n’étais pas forcément ‘joyeux’ de dire que j’allais travailler avec ce garçon.
Et c’est assez rapidement que j’ai compris que j’étais rentré dans une équipe géniale.
Nous retrouverons le roi burgonde dans le film d’Alexandre Astier. Ça vous fait quoi de retrouver ce personnage culte après toutes ces années ?
Guillaume Briat : C’est un vrai bonheur. En plus, là on se trouve avec des affiches du film dans lequel le Roi Burgonde apparait. Il a sa propre affiche ! Peut être qu’il a une certaine importance (rires). Je ne suis même pas au courant, car je n’ai pas encore vu le film. Je sais ce que j’ai tourné, Alexandre Astier est très discret par rapport au film et au scénario. Je sais de quoi ça cause, sans avoir lu un scénario en entier.
A mon avis, tout le monde va être très surpris. Je suis très heureux de retrouver le Roi Burgonde qui est un personnage hors norme que j’adore.
L’affiche du Roi Burgonde (Guillaume Briat) dans Kaamelott : Premier Volet.
A-t-il évolué depuis la dernière fois que nous l’avons vu ?
Guillaume Briat : Sans dévoiler grand-chose, je crois qu’il n’a pas appris grand-chose depuis tout ce temps (rires). Il n’a pas appris l’anglais, le français… il est toujours aussi catastrophique (rires).
Votre nom n’apparait pas dans les crédits du film, peut-on tout de même espérer un cameo de votre personnage ?
Bô Gaultier de Kermoal : Je ne sais absolument pas.
Aujourd’hui, où en serez-votre personnage dans l’univers de Kaamelott ?
Bô Gaultier de Kermoal : Je ne peux pas vous dires (rires) il y a trois volets…
Guillaume Briat : Sait-on jamais…
Bô Gaultier de Kermoal : Il y a plein de trucs… Alex a un cerveau en ébullition permanent. On ne sait jamais, d’un coup il vous appelle et vous vous trouvez à tourner, peut être autre chose que Kaamelott. Il y a plusieurs projets sous le coude.
Si vous deviez retenir un rôle de votre filmographie lequel serait-ce ? Et pourquoi ?
Guillaume Briat : J’ai eu quelques rôles intéressants, mais le Roi Burgonde, pas pour la qualité du personnage (rires), mais pour la capacité à improviser avec ce personnage. Je ne parle pas du texte, car tout est écrit, mais par rapport au fait qu’au départ c’était un tout petit rôle qu’on a pu développer grâce à l’imagination d’Alexandre. Dire que l’on va réécrire et revoir et là ça donne un personnage que l’on va retrouver dans un film, alors qu’au départ c’était une apparition.
Ça me plait en termes de comédie, dire qu’un illustre personnage devient quelqu’un d’important notamment aux yeux du public. C’est grâce au talent d’Alexandre et au succès de la série. En ça, c’est un personnage que j’adore et qui me tient énormément à cœur.
J’adore Obélix. Évidemment c’est quelque chose de particulier aussi à interpréter, c’est uniquement de la voix. J’ai eu beaucoup de rôle qui m’ont beaucoup plus, mais c’est vrai que Kaamelott, l’univers, les tournages, l’ambiance, l’intelligence du texte – même si le Roi Burgonde n’est pas forcément shakespearien – c’est génial à interpréter. En plus du plaisir d’appartenir à cette équipe.
Bô Gaultier de Kermoal : ‘La Tour Montparnasse Infernale’ a changé ma vie. Les deux rôles Ming et Chang ça été assez incroyable. Et l’autre film pour moi qui est mémorable, c’est le film ‘Sur mes Lèvres‘ de Jacques Audiard parce que c’est vraiment la référence absolue. Je sortais de ‘La Tour Montparnasse Infernale’ avec Eric et Ramzy, pour tomber dans l’univers de Jacques Audiard. C’est un grand écart improbable.
Évidement Kaamelott, c’est tellement inestimable en termes de valeur, c’est une grosse surprise.
Que pouvez-nous dire sur votre prochain film, « Super-héros malgré lui » de Philippe Lacheau ?
Guillaume Briat : Je ne peux pas vous dire grand-chose. C’est un tout petit rôle, je n’ai pas lu le scénario et j’apparais subrepticement. Je ne peux vous dire que ça. Je ne sais pas quand est-ce que le film va sortir, plutôt pour la rentrée ou pour les fêtes. Mais, bravo, vous êtes au courant. J’ai fait ça cet été, et un tournage avec Bô d’une série en devenir et ce tournage là. Je n’en sais pas beaucoup plus.
Vous tournez souvent ensemble ?
Guillaume Briat : On essaie…
Bô Gaultier de Kermoal : On est amis dans la vie…
Guillaume Briat : On nous a proposé quelque chose ensemble, donc on verra. On l’a fait.
Vous êtes également la voix actuelle d’Obélix. Comment avez-vous travaillé le personnage ?
Guillaume Briat : Assez simplement. Faut quand même être assez humble, il y a cinq comédien derrière moi qui ont fait ce personnage. Il faut se baser sur ce qui existe déjà. Celui qui travaille le plus, c’est celui qui écoute, et c’est Alexandre Astier. Il écoute extrêmement bien. Il a une oreille extrêmement fine, c’est lui qui m’a dirigé, conseillé, amené sur ce qu’il voulait.
Effectivement, ma référence d’Obelix pour moi c’était Pierre Tornade, car c’est de mon époque. Il y en a eu d’autre que j’aime beaucoup ; Jacques Frantz avant moi, qui a disparu dernièrement. Ça se travaille comme toujours, on est un peu timide, on essaie de se mettre dans ce qui existe déjà et on s’aperçoit que ça propre voix convient.
Alexandre m’a engagé parce qu’il savait que je pouvais transformer ma voix avec le Roi Burgonde. C’est là-dessus que l’on est parti, la possibilité d’essayer quelque chose.
Outre votre carrière d’acteur-réalisateur, vous êtes également peintre. Quelles sont vos sources d’inspirations pour vos peintures ?
Bô Gaultier de Kermoal : Je suis un dingue de De Staël et Rothko. Je travaille essentiellement la couleur avec des pigments naturels. Ça donne des tableaux qui changent de couleurs en fonction de l’heure de la journée. Le tableau est évolutif.
J’ai une maison en Bretagne. On dit souvent qu’il y a quatre saisons dans une journée, il y a une lumière incroyable. Ce qui m’inspire c’est la lumière. J’ai eu envie de peindre grâce à des choses beaucoup plus classiques, Rembrandt, Bruegel. J’ai grandi dans le Nord et j’allais au Musée d’Art Contemporain de Lille. C’est ça qui m’a donné envie de peindre. Donc la lumière essentiellement.
Bô Gaultier de Kermoal : Je suis un dingue de Rothko en règle générale. J’aime bien aussi Pollock, sa façon de travailler, la folie qu’il peut avoir. Il y a toujours une part de folie dans la créativité – que ce soit en tant qu’acteur ou en tant que peintre, sculpteur – il y a toujours un ressenti, un vibrato qui se met en route.
Quel personnage, historique ou de fiction, rêveriez-vous d’incarner à l’écran ? Et pourquoi ?
Guillaume Briat : Aucune idée, vous me prenez de court. Vercingétorix (rires) je fais exprès de prendre un mec à corne. Je ne sais pas. Napoléon parce qu’il était petit (rires) ? Je ne sais pas, comme ça je me servirais que d’une main. Aucune idée, Goldorak ? (rires).
Bô Gaultier de Kermoal : Je suis ravi de tourner en règle général, peu importe. J’aime bien jouer le rôle de barbare. Le rôle du méchant ça m’éclate.
Quelle œuvre de la Pop Culture vous a marqué à jamais ?
Bô Gaultier de Kermoal : C’est très vaste, mais évidemment Goldorak. On est de l’ancienne génération, j’ai 52 ans, du coup fatalement c’est des trucs un peu old-school. La musique qui allait avec, David Bowie.
Guillaume Briat : C’est vrai que c’était super la musique de Bowie sur Goldorak ‘This is Not America’ (rires).
Parlez-nous de votre actualité. Quels sont vos prochains projets ?
Bô Gaultier de Kermoal : Je n’ai pas le droit d’en parler, mais je suis sur un très gros film qui va sortir l’année prochaine.
Pour conclure, comment vos personnages de Kaamelott prononceraient le nom imprononçable de notre site ?
Eklecty-City c’est compliqué à prononcer, mais le nom est pleinement assumé. Pour la sortie de #KaamelottPremierVolet, nous avons proposé un exercice de diction à @GuillaumeBriat (roi burgonde) et Bo Gaultier de Kermoal (Garde du corps d’Attila le Hun). Voici le résultat : pic.twitter.com/V2GMJhwhEI
— Eklecty-City – Pop Culture (@EklectyCity) June 13, 2021
Une nouvelle fois, merci Bô et Guillaume de nous avoir accordé cette interview.
Bô Gaultier de Kermoal : De rien, merci.
Guillaume Briat : Merci à vous.
Interview préparée par Thomas O. et propos recueillis par Anastasia V. pour Eklecty-City.fr, qui remercient Bô Gaultier de Kermoal et Guillaume Briat de s’être prêtés au jeu d’une interview. Merci également à Franck Laperche pour l’invitation.
Let’s leave trends aside and focus on originality. With Adopte un Créatif, you will discover passionate, creative, youtubers / youtubers unknown who make the news of the web. For this new issue, I went to meet Jeremy I Ralte.
Today, it’s a special issue of « Adopte un Créatif » that I propose to you. Following the buzz generated by a video on our social networks, I wanted to know more about its author. Here are the explanations.
Let’s go back in time. In April 2020, the whole world has to face one of the biggest health crisis of its history. Many countries are implementing a population lockdown to try to contain Covid-19. In order to keep themselves busy during the first lockdown, people around the world are going to get creative to fight boredom. That’s where Jeremy L Ralte comes in.
Jeremy is from Mizoram, a state in Northeast India. During a cyclonic storm, he decides to brave the wind with an imitation of Michael Jackson. In the video, we see the young man doing a live performance on the song « Earth Song » by Jackson. Taken from the album HIStory (1995), the song deals with environmental themes and evokes war, pollution, deforestation and cruelty to animals. Michael Jackson‘s goal was to get an environmental message across.
Very quickly, the video of Jeremy L Ralte became viral. His imitation of the King of Pop and his exit on tiptoe amused the Internet users.
At the beginning of 2022, several islands in the Western Indian Ocean are on alert following the cyclone Batsirai. This is particularly the case for Mauritius, Reunion and Madagascar. In the wake, our Facebook page is the subject of several notifications.
Indeed, the video of Jeremy L Ralte is the subject of a second buzz among the population of the islands in cyclone alert. To give you an idea, the video went from a hundred views to more than a million views and thousands of shares and reactions. In the comments, many Internet users wanted to reproduce the video of Jeremy L Ralte during the passage of Batsirai.
(Click on the image to see Jeremy’s video on the Facebook page)
This is notably the case of the Mauritian artist Warren Chris Etowar. Following the buzz of the video of Jeremy L Ralte on our Facebook page, several of his friends asked him to reproduce the video. Interviewed by the site lexpress.mu, Warren Chris Etowar explains: ‘By the way, several friends have tagged me since the announcement of the cyclone Batsirai in a video dating from 2020. Knowing that I’m a Michael Jackson fan since I was a kid, they saw me in that video… It was around 3:00-3:30 pm, I was at my cousin’s house, we were playing board games, and according to the weather forecast, the cyclone was going to pass its closest point to Mauritius around 4:00 pm. It was windy, and I remembered this video… I didn’t expect this video to go viral and even be shared thousands of times on the networks and make the buzz in Reunion and Madagascar.‘
Meet Jeremy L Ralte
Following the new buzz of Jeremy L Ralte‘s video, I proposed to Jeremy an interview. The idea is to shed light on the author of the original video, but also to know the backstage of one of the funniest videos of the Internet.
Discover the backstage of this video and the universe of Jeremy L Ralte, who is also the singer of the metal band Stacy’s Penitence.
Hi Jeremy, thank you for accepting my invitation and for agreeing to answer my questions.
Jeremy: Thank you Thomas for offering. I’m really nervous and I’ll do my best… To be honest, I’m not good at interviews.
Tell us more about yourself:
Jeremy: I live in McDonald Hill, Zarkawt, Aizawl, Mizoram… a state in northeast India. I am still finding my way in life… I love music, sports and yes, making videos… documenting things…
You are the author of one of the funniest videos on the internet. How did you come up with the idea of doing a Michael Jackson impression in the middle of a storm?
Jeremy: (Laughs) It’s not the funniest video. Well, storms, where we live is not new to us. I actually got the idea from my late brother who influenced me in every way. He used to do this when we were kids. So the night before I shot the video… there was another huge storm and my brother and I went out on the porch and started singing the Earth Song at the top of our lungs. Then it hit me, I told myself when the next storm came I would make this video. The next morning, after my run, there was a big storm… so I went downstairs, put my phone on the porch… and that’s how it happened.
What made the internet users laugh a lot is also the end of the video where you leave on tiptoe. Why did you end the video like that (laughs)?
Jeremy: (Laughs) Yes, I laughed a lot at the end. I mean, it was mostly because I was wearing socks with flip-flops and I was afraid of slipping. I try to keep my balance! The storm was pretty sudden and I didn’t have much time to change.
Very quickly, the video went viral. What was your reaction?
Jeremy: I was surprised actually. I make videos because I like making videos… I’m not trying to get attention or anything like that… it’s more of a hobby. So when it went viral, I was shocked and obviously happy, but I didn’t really know what to do. To be honest, I was nervous about my next video. What if it’s not a hit? So, I guess it changed my mindset in a way… it changed so much that I even forgot why I started making videos… for fun, not for attention or to go viral… So, I tried to get better and have fun instead of going overboard.
I uploaded this video because I thought I hadn’t uploaded any videos in a while. And then the Indian media texted me and asked me all these questions… I was trying to keep my cool, it was huge for me. I even started a YouTube channel. I was trying to grow as much as I could at the time… but things change.
I saw another video on your Instagram profile where you’re imitating samurai in a storm. It’s really funny too.
Jeremy: Yeah, that happened in April, storms are common in April… and that was me trying to get attention. (Laughs). But the costume… it’s my brother’s samurai costume and a bokken stick.
Jeremy: Yes, I have, like I said, storms are common and they’re not new. I’ve done a lot of them actually, in the storm. I did one in a Bruce Lee costume, with the famous yellow suit, and it was even shared on 9gag. I’ve done other videos where I’m dancing half-naked in the rain and a bit of a storm.
Before I contacted you, did you know that your Michael Jackson impersonation was still making the buzz in 2022?
Jeremy: No, I didn’t know that. I thought it was a thing of the past, although I was getting likes here and there on the video from abroad. I was surprised when you told me and offered me this interview. And people are sending me links where my video has been uploaded on certain platforms, like people reacting on YouTube with the title « what Filipinos do during a typhoon » I’m not sure.
And last year, UFC fighter Derrick Lewis even featured my video. And people sent that to me too. So, that’s it.
Today, your video has gone beyond viral. It is itself the subject of parody. What do you think of the people who are reposting your video?
Jeremy: I’m just happy that people have been able to make the best of it, that they’re enjoying it and having fun with it. At first I was disappointed because I didn’t think I got much credit as the owner of the video, to be honest. People sent me all these links where they were using my video. They asked me why I didn’t do anything, that I should be credited for the video and all that. And I think that made me bitter. And since it went viral, I want to be credited so badly that I even added my name to some of my videos that followed. But like I said, I got lost for a while back then.
It changed my mindset… but somehow, not that I found myself or anything… credit or no credit, it didn’t really matter. People like it, I like making videos… a win-win situation I guess. Making the world a happy place.
(Click on the image to see the video of Warren Chris Etowar)
(Click on the image to see another version of Jeremy’s video)
What content do you consume on the Internet? What do you like to watch?
Jeremy: I watch different types of content. It changes depending on my interests in life. When I’m into music… I watch videos about music, and so on… sometimes I follow tendencies and suggestions from the internet, so I can’t specify. Sometimes self-help videos.
What is your first memory with internet?
Jeremy: It was in 2003, we had dial-up internet access. My brother and I were playing « Kaun Banega Crorepati« , an Indian version of « Who Wants to be a Millionaire?« . We used one of the wildcards where you can call for help. We dialed our grandmother’s landline and she picked up the phone. But she didn’t know the answers at all. And Dad came in and scolded us (laughs).
Let’s talk about Pop Culture. Can you tell us what are your favorite works ? Your influences?
Jeremy: I’m a man of leisure, and I do a lot of things… I play music and I listen to rock music mostly, and I change who I listen to depending on my mood… so I change who I listen to depending on my mood… I’m influenced by bands like Emery, Biffy Clyro, Linkin Park (Chester Bennington is one of my favorite singers)… and they also influence me in my songwriting (laughs).
I also play sports, I play soccer, futsal, basketball (sometimes). And I’m training to be a triathlete. It’s a dream for me to be an Ironman. For a long time. I’m not even sure what I want in life. So I guess I end up doing a lot of things. Then I discovered triathlon and Ironman…it changed my outlook on life. I don’t know how, but in a good way.
I like to document things, like I would document a spider eating a fly and tell what’s going on or document our trail when we’re hiking… I did that a while ago. I learned about it while watching the Discovery Channel. So I guess I was doing vlogs before it was called vlogs (laughs). But I keep them to myself.
And in 2013, I started doing these Vine-influenced videos where I would do a ‘challenge’ video where I would yell in public places, train stations, planes, classrooms… (laughs)
This video may be the first one that has gone viral locally. At least in the northeastern states of India… if I’m not mistaken.
And I’ve also started reading books recently, I haven’t read many, but I love Tuesdays with Morrie by Mitch Albom… I don’t have a favorite…
One of my favorite movies has to be What we Do in the Shadows (2014), my friend Matthew introduced me to Taika Waititi, I love his humor. And I think Friends is my favorite show… or The Office… I can’t decide. And as for anime, I don’t watch much, but I like Dororo (2019). I love the Dororo OST and anime OSTs are always amazing. I recently watched The Demon Slayer! I love it. And I love the works of Studio Ghibli. I feel like I’m in Japan.
Regarding, superheroes, I prefer DC to Marvel… because it’s darker. And the DC villains are so authentic. My favorite hero, I guess, is The Flash, because super speed is a power that makes me dream… or teleportation. I enjoy the Star Wars franchise immensely.
The list can go on and on, but I guess that’s what I like. In short, music and sports are my passions.
You talked to me about music as a passion, I saw that you are a member of the band Stacy’s Penitence. Can you introduce us the band and the members of the band?
Jeremy: Currently, the band has 4 members… Bobo Renthlei plays guitar, synths, and backing vocals and produces our music. He has an incredible home studio. Puia Hmar plays guitar and backing vocals and Zama Ralte plays bass and synths and I sing in the band. Sometimes I play keyboard or guitar, if they let me (laughs).
We tried our best to be consistent in the music, to have more material, but it seems impossible sometimes, we still try and we plan to do an album or at least an EP. We have to manage with our personal business, sometimes it’s hard to find time.
Our latest track, Reason To Stay, currently available on Youtube, was written by Zama, our bass player. We share and exchange ideas in the studio. That’s how we come up with a song… we share our ideas.
We played in festivals like Orange Festival, Chapchâr Kût (Festival in Mizoram). My performance at the Orange Festival was massacred because of my allergy to winter… I was so ashamed. I had cracks in my voice again and again.
We play different kinds of rock… mostly rock… metal, metalcore… The band doesn’t belong to a specific genre.
Hopefully we will find new material soon!
Do you plan to make any new videos in the future?
Jeremy: Yeah, I’m going to try to make some new videos. It’s really hard sometimes. There is no idea, no motivation. Especially since my brother passed away. I don’t feel like doing anything. But I really can’t sit around sulking and being sad… so yes, I will try to make more videos!
In closing. Do you have a message for the internet users around the world, but also the content creators, who enjoyed your Michael Jackson impersonation?
Jeremy: (Laughs), I’m not in a position to say anything to anyone. I think we should be honest with ourselves… do what we love, I know it’s a cliché… and remember why we do it, and have fun. Also, do whatever you can to save the environment. #saveearth
And, for the video… all credits to Michael Jackson‘s wonderful « Earth Song« … my video would be nothing without it… and all the people involved in it… the studios, the labels…
And I also think of my brother, who gave me the idea and introduced me to wonderful music.
We are at the end of the interview. Once again, thank you for answering my questions.
Jeremy: Thank you very much for this interview and discussion.
Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Jeremy L Ralte.
Aujourd’hui, c’est un numéro spécial d’Adopte un Créatif que je vous propose. Suite au buzz suscité par une vidéo sur nos réseaux sociaux, j’ai souhaité en savoir davantage sur son auteur. Explications.
Remontons dans le temps. En avril 2020, le monde entier doit faire face à l’une des plus grandes crises sanitaires de son histoire. De nombreux pays mettent en place un confinement de la population pour essayer d’endiguer le Covid-19. Afin de s’occuper durant le premier confinement, les gens du monde entier vont faire preuve de créativité pour combattre l’ennui. C’est là que rentre en scène Jeremy L Ralte.
Jeremy est originaire du Mizoram, un État de l’Inde du Nord-Est. Lors d’une tempête cyclonique, il décide de braver le vent avec une imitation de Michael Jackson. Dans la vidéo, nous apercevons le jeune homme faire une performance en direct sur la chanson « Earth Song » de Jackson. Extrait de l’album HIStory (1995), la chanson aborde les thèmes de l’environnement et évoque la guerre, la pollution, la déforestation et la cruauté envers les animaux. L’objectif de Michael Jackson était de faire passer un message écologiste.
Très rapidement, la vidéo de Jeremy L Ralte devient virale. Son imitation du Roi de la Pop ainsi que sa sortie sur la pointe des pieds ont amusé les internautes.
Début 2022, plusieurs îles de l’Ouest de l’Océan Indien sont en alerte suite au cyclone Batsirai. C’est notamment le cas pour l’île Maurice, La Réunion et Madagascar. Dans la foulée, notre page Facebook fait l’objet de plusieurs notifications.
En effet, la vidéo de Jeremy L Ralte connait un second buzz auprès de la population des îles en alerte cyclonique. Pour vous donner une idée, la vidéo est passée d’une centaine de vues à plus d’un millions de vue et des milliers de partages et réactions. Dans les commentaires, beaucoup d’internautes ont souhaité reproduire la vidéo de Jeremy L Ralte lors du passage de Batsirai.
(Cliquez sur l’image pour voir la vidéo de Jeremy sur la page Facebook)
C’est notamment le cas de l’artiste mauricien Warren Chris Etowar. Suite au buzz de la vidéo de Jeremy L Ralte sur notre page Facebook, plusieurs de ses amis lui ont demandé de reproduire la vidéo. Interrogé par le site lexpress.mu, Warren Chris Etowar explique : ‘Au fait, plusieurs amis m’ont taggué depuis l’annonce du cyclone Batsirai dans une vidéo datant de 2020. Tout en sachant que je suis fan de Michael Jackson depuis ma tendre enfance, ils me voyaient reprendre cette vidéo… Il était vers 15 h-15 h 30, j’étais chez mon cousin, on jouait aux jeux de société, et d’après les infos de la météo, le cyclone allait passer à son point le plus rapproché de Maurice vers 16 heures. Le vent était au rendez-vous, et je me suis souvenu de cette vidéo… Je ne m’attendais pas à ce que cette vidéo devienne virale jusqu’à même être partagée des milliers de fois sur les réseaux et faire le buzz à la Réunion et Madagascar.’
A la rencontre de Jeremy L Ralte
Suite au second buzz de la vidéo de Jeremy L Ralte, j’ai proposé à Jeremy une interview. L’idée est de faire la lumière sur l’auteur de la vidéo originale, mais aussi de connaitre les coulisses d’une des vidéos les plus drôles d’Internet.
Découvrez les coulisses de cette vidéo et l’univers de Jeremy L Ralte, qui est aussi le chanteur du groupe de metal Stacy’s Penitence.
Bonjour Jeremy, merci d’avoir accepté mon invitation et d’avoir accepté de répondre à mes questions.
Jeremy : Merci Thomas de l’avoir proposé. Je suis vraiment nerveux et je ferai de mon mieux… Pour être honnête, je ne suis pas doué pour les interviews.
Dis-nous en plus sur toi :
Jeremy : Je vis à McDonald Hill, Zarkawt, Aizawl, Mizoram… un état du nord-est de l’Inde. Je suis toujours en train de trouver mon chemin dans la vie… J’aime la musique, les sports et oui, faire des vidéos… documenter les choses…
Tu es l’auteur d’une des vidéos les plus drôles d’Internet. Comment t’es venu l’idée d’imiter Michael Jackson en pleine tempête ?
Jeremy : (Rires) Ce n’est pas la vidéo la plus drôle. Eh bien, les tempêtes, où nous vivons n’est pas nouveau pour nous. En fait, j’ai eu l’idée de mon défunt frère qui m’a influencé dans tous les domaines. Il faisait ça quand on était enfants. Donc, la nuit avant que je tourne la vidéo… il y avait une autre énorme tempête et mon frère et moi, nous sommes sortis sous le porche et avons commencé à chanter à pleins poumons « Earth Song ». Puis ça m’a frappé, je me suis dit que lorsque la prochaine tempête arriverait, je ferais cette vidéo. Le lendemain matin, après ma course, il y avait un gros orage… alors je suis descendu, j’ai posé mon téléphone sur le porche… et c’est comme ça que c’est arrivé.
Ce qui a fait beaucoup rire les internautes, c’est aussi la fin de la vidéo où tu pars sur la pointe des pieds. Pourquoi avoir terminé la vidéo comme ça (rires) ?
Jeremy : (Rires) Oui ! J’ai beaucoup ri à la fin. Enfin, c’était surtout parce que je portais des chaussettes avec des tongs et que j’avais peur de glisser. J’essaie de maintenir l’équilibre ! La tempête a été assez soudaine et je n’ai pas eu beaucoup de temps pour me changer.
Très rapidement, la vidéo est devenue virale. Quelle a été ta réaction ?
Jeremy : J’ai été surpris en fait. Je fais des vidéos parce que j’aime faire des vidéos… Je n’essaie pas d’attirer l’attention ou quelque chose comme ça… c’est plus un hobby. Donc, quand elle est devenue virale, j’étais choqué et évidemment heureux, mais je ne savais pas vraiment quoi faire. Pour être honnête, j’étais nerveux pour ma prochaine vidéo. Que faire si ce n’est pas un succès ? Donc, je suppose que ça a changé ma mentalité en quelque sorte… ça a tellement changé que j’ai même oublié pourquoi j’ai commencé à faire des vidéos… pour le plaisir, pas pour l’attention ou pour devenir viral… Donc, j’ai essayé de m’améliorer et de m’amuser au lieu de faire des excès.
J’ai téléchargé cette vidéo parce que je pensais que je n’avais pas téléchargé de vidéos depuis un moment. Et puis les médias indiens m’ont envoyé un SMS et m’ont posé toutes ces questions… J’essayais de garder mon calme, c’était énorme pour moi. J’ai même commencé une chaîne YouTube. J’essayais de me développer autant que je le pouvais à l’époque… mais les choses changent.
J’ai vu sur ton profil Instagram une autre vidéo où tu imites les samouraïs en pleine tempête. Elle est très drôle également.
Jeremy : Oui, c’est arrivé en avril, les tempêtes sont fréquentes en avril… et c’était moi qui cherchait à attirer l’attention. (Rires). Mais le costume… c’est le costume de samouraï de mon frère et un bâton de bokken.
Jeremy : Oui, je l’ai fait, comme je l’ai dit, les tempêtes sont fréquentes et elles ne sont pas nouvelles. J’en ai fait beaucoup en fait, dans la tempête. J’en ai fait un dans un costume de Bruce Lee, avec la fameuse combinaison jaune, et elle a même été partagée sur 9gag. J’ai fait d’autres vidéos où je danse à moitié nu sous la pluie et un peu d’orage.
Avant que je te contacte, savais-tu que ton imitation de Michael Jackson faisait encore le buzz en 2022 ?
Jeremy : Non, je ne le savais pas. Je pensais que c’était une chose du passé, bien que je reçoive des likes ici et là sur la vidéo de l’étranger. J’ai été surpris quand tu me l’as annoncé et quand tu m’as proposé cette interview. Et les gens m’envoient des liens où ma vidéo a été mise en ligne sur certaines plateformes, comme les gens qui réagissent sur YouTube avec le titre « ce que font les Philippins pendant un typhon », je ne suis pas sûr.
Et l’année dernière, le combattant de l’UFC Derrick Lewis a même mis en scène ma vidéo. Et les gens m’ont envoyé ça aussi. Donc, c’est tout.
Aujourd’hui, ta vidéo est devenue plus que virale. Elle fait elle-même l’objet de parodie. Que penses-tu des internautes qui reprennent ta vidéo ?
Jeremy : Je suis simplement heureux que les gens aient pu en tirer le meilleur parti, qu’ils l’apprécient et s’amusent avec. Au début, j’étais déçu parce que je pensais que je n’avais pas beaucoup de crédit en tant que propriétaire de la vidéo, pour être honnête. Les gens m’ont envoyé tous ces liens où ils utilisaient ma vidéo. Ils m’ont demandé pourquoi je n’avais rien fait, que je devais être crédité pour la vidéo et tout ça. Et je pense que ça m’a rendu amer. Et depuis qu’elle est devenue virale, je veux tellement être crédité que j’ai même ajouté mon nom sur certaines de mes vidéos qui ont suivi. Mais comme je l’ai dit, je me suis perdu pendant un moment à l’époque.
Cela a changé ma mentalité… mais d’une certaine manière, non pas que je me sois trouvé ou quoi que ce soit… crédit ou pas crédit, cela n’avait pas vraiment d’importance. Les gens l’apprécient, j’aime faire des vidéos… une situation gagnant-gagnant je suppose. Faire du monde un endroit heureux.
(Cliquez sur l’image pour voir la vidéo de Warren Chris Etowar)
(Cliquez sur l’image pour voir une autre reprise de la vidéo de Jeremy)
Quels contenus consommes-tu sur Internet ? Qu’aimes-tu regarder ?
Jeremy : Je regarde différents types de contenus. Ça change en fonction de mes intérêts dans la vie. Quand je suis dans la musique… Je regarde des vidéos sur la musique, et ainsi de suite… parfois je suis les tendances et les propositions d’Internet, donc je ne peux pas préciser. Parfois, des vidéos d’auto-assistance.
Quel est ton premier souvenir avec internet ?
Jeremy : C’était en 2003, nous avions un accès Internet par ligne commutée. Mon frère et moi jouions à « Kaun Banega Crorepati« , une version indienne de « Qui veut gagner des millions ?« . Nous avons utilisé l’un des jokers où l’on peut appeler à l’aide. Nous avons donc composé le numéro de la ligne fixe de notre grand-mère, et celle-ci a décroché le téléphone. Mais elle ne connaissait pas du tout les réponses. Et papa est arrivé et nous a grondé (rires).
Parlons Pop Culture. Peux-tu nous dire quels sont tes œuvres favorites ? Tes influences ?
Jeremy : Je suis un homme de loisirs, et je fais beaucoup de choses… Je joue de la musique et j’écoute surtout du rock, et je change selon l’humeur… donc je change de qui j’écoute selon mon humeur… Je suis influencé par des groupes comme Emery, Biffy Clyro, Linkin Park (Chester Bennington est un de mes chanteurs préférés)… et ils m’influencent aussi dans l’écriture de mes chansons (rires).
Je fais aussi du sport, je joue au football, au futsal, au basket (parfois). Et je m’entraîne pour devenir un triathlète. C’est un rêve pour moi d’être un Ironman. Depuis longtemps.. Je ne suis même pas sûr de ce que je veux dans la vie. Donc je suppose que je finis par faire beaucoup de choses. Puis j’ai découvert le triathlon et l’Ironman… ça a changé ma façon de voir la vie. Je ne sais pas comment, mais dans le bon sens.
J’aime documenter les choses, comme je documenterais une araignée mangeant une mouche et raconterais ce qui se passe ou documenter notre sentier quand nous faisons de la randonnée… J’ai fait ça il y a un moment. J’ai appris ça en regardant Discovery Channel. Donc je suppose que j’ai fait des vlogs avant que ça s’appelle vlogs (rires). Mais je les garde pour moi.
Et en 2013, j’ai commencé à faire ces vidéos influencées par Vine où je faisais une vidéo ‘défi’ où je criais dans des lieux publics, des gares, des avions, des salles de classe… (rires).
Cette vidéo est peut-être la première qui est devenue virale localement. Au moins dans les États du nord-est de l’Inde… si je ne me trompe pas.
Et j’ai aussi commencé à lire des livres récemment, je n’en ai pas lu beaucoup, mais j’aime La Dernière Leçon de Mitch Albom… Je n’ai pas de favori…
Un de mes films préférés doit être Vampires en toute intimité (2014), mon ami Matthew m’a fait découvrir Taika Waititi, j’aime son humour. Et je pense que Friends est ma série préférée… ou The Office… Je n’arrive pas à me décider. Et pour ce qui est des anime, je n’en regarde pas beaucoup, mais j’aime bien Dororo (2019). J’adore l’OST de Dororo et les OST des anime sont toujours incroyables. J’ai récemment regardé The Demon Slayer ! Je l’adore. Et j’adore les œuvres des studios Ghibli. J’ai l’impression d’être au Japon.
Concernant, les super-héros, je préfère DC à Marvel… parce que c’est plus sombre. Et les méchants de DC sont si authentiques. Mon héros préféré, je suppose que c’est The Flash, car la super vitesse est un pouvoir qui me fait rêver… ou la téléportation. J’apprécie énormément la franchise Star Wars.
La liste peut être longue, mais globalement c’est ce que j’affectionne. En résumé, la musique et le sport sont mes passions.
Tu m’as parlé de la musique comme d’une passion, j’ai vu que tu faisais partie du groupe Stacy’s Penitence. Peux-tu nous présenter le groupe et les membres du groupe ?
Jeremy : Actuellement, le groupe compte 4 membres… Bobo Renthlei joue de la guitare, des synthés, et des chœurs et il produit notre musique. Il a un incroyable home studio. Puia Hmar joue de la guitare et des chœurs et Zama Ralte joue de la basse et des synthés et je chante dans le groupe. Parfois je joue du clavier ou de la guitare, s’ils me laissent faire (rires).
Nous avons fait de notre mieux pour être cohérents dans la musique, avoir plus de matériel, mais cela semble impossible parfois, nous essayons toujours et nous prévoyons de faire un album ou au moins un EP. Nous devons gérer avec nos affaires personnelles, il parfois difficile de trouver du temps.
Notre dernier titre, Reason To Stay, actuellement disponible sur Youtube, a été écrit par Zama, notre bassiste. Nous partageons et échangeons nos idées en studio. C’est comme ça que nous arrivons à une chanson… nous partageons nos idées.
Nous avons joué dans des festivals comme l’Orange Festival, Chapchâr Kût (Festival à Mizoram). Ma performance à l’Orange Festival a été massacrée à cause de mon allergie à l’hiver… J’avais tellement honte. J’avais des fissures dans la voix encore et encore.
Nous jouons différents genres de rock… surtout du rock… du métal, du metalcore… Le groupe n’appartient pas à un genre spécifique.
Avec un peu de chance, nous trouverons bientôt du nouveau matériel!
Penses-tu faire de nouvelles vidéos à l’avenir ?
Jeremy : Oui, je vais essayer de faire de nouvelles vidéos. C’est vraiment dur parfois. Il n’y a aucune idée, aucune motivation. Surtout depuis la disparition de mon frère. Je n’ai pas envie de faire quoi que ce soit. Mais je ne peux vraiment pas rester à bouder et à être triste… donc oui, je vais essayer de faire plus de vidéos !
Pour terminer. As-tu un message pour les internautes du monde entier, mais aussi les créateurs de contenus, qui ont apprécié ton imitation de Michael Jackson ?
Jeremy : (rires), je ne suis pas en état de dire quoi que ce soit à qui que ce soit. Je pense que nous devrions être honnêtes envers nous-mêmes… faire ce que nous aimons, je sais que c’est un cliché… et se rappeler pourquoi nous le faisons, et nous amuser. Aussi, faites tout ce que vous pouvez pour sauver l’environnement. #saveearth
Et, pour la vidéo… tous les crédits à la merveilleuse « Earth Song » de Michael Jackson… ma vidéo ne serait rien sans elle… et toutes les personnes impliquées dans celle-ci… les studios, les labels…
Et je pense aussi à mon frère, qui m’a donné l’idée et m’a fait découvrir une musique merveilleuse.
Nous sommes arrivés à la fin de l’interview. Une nouvelle fois, merci d’avoir répondu à mes questions.
Jeremy : Je te remercie beaucoup pour cette interview et cette discussion.
For the great return of the trilogy Infernal Affairs to the cinema in restored version, Eklecty-City offers you an interview with the director Andrew Lau.
Andrew Lau is a director and producer from Hong Kong. After starting his career as a cinematographer for such filmmakers as Ringo Lam, Wong Jing and Wong Kar-wai, Lau began his career as a director in the 90’s. The filmmaker has directed several feature films in China, Korea and the United States.
A very prolific director, Andrew Lau is mainly known in the West for his action and crime films, notably the Young and Dangerous franchise and the Infernal Affairs trilogy co-directed with Alan Mak. Martin Scorsese directed a remake of the film in 2006 as The Departed, which won the Academy Award for Best Picture and Best Adapted Screenplay. In 2014, Lau directed an American film Revenge of the Green Dragons, produced by Martin Scorsese, starring Ray Liotta.
On the occasion of the release on March 16, 2022 in french theaters of restored trilogy Infernal Affairs, I had the great privilege to ask a few questions Andrew Lau. Find below my interview with one of the greatest Hong Kong directors.
Hello Andrew, first of all thank you for this interview. It’s a real honor for me to be able to talk with you. What is your state of mind for the return of the Infernal Affairs trilogy to the cinema?
Andrew Lau : I’m always happy when more people can watch my movies, so with the restoration I think it’s also a real honour for me. And now that the movie is coming out in 4K resolution, audience can look at the film with more a more crisp image and perhaps better colouring. I’ve always felt that the colouring technology then wasn’t advanced back then, so I hope now they are able to tune the colour to what I had in mind.
When the first film was made, did you imagine that it would become a worldwide phenomenon?
Andrew Lau : I was nervous when the film came out, back then, the movie industry in Hong Kong was going through a slump and it felt like a very big risk. I always told myself that if this film bombs in the box office, then this is it but luckily it was a huge success. I didn’t expect it to be a worldwide phenomenon, I never expected Martin Scorsese to remake Infernal Affairs. It’s amazing and I’m so thankful for everyone that was a part of it.
A whole new generation of moviegoers will discover your trilogy. Would you advise them to watch it in chronological order or in order of release?
Andrew Lau : I would definitely advise people to watch it in order of release, while the second movie is a prequel, one has to watch the first one in order to understand what I wanted to say.
These new viewers grew up watching superhero movies and series. What do you think of this genre? Is it a theme that interests you?
Andrew Lau : I feel that each generations have their own set of heroes. Different cultures have different ideas on what it is like to be a hero. For example, in Hong Kong we have our own set of superhero movies, the old wuxia movies, cops and robber movies, etc. So in the end I think that each culture projects their ideas of a superhero up to the big screen but I personally don’t mind it, as Long as it’s a good movie, I think that’s enough.
If I had the chance to do such a movie, I would probably refuse though, I feel there would be too many rest.
If you had to name one superhero movie, which one would it be? And why?
Andrew Lau : I think I would name one of my own movies, the Young and Dangerous series (ed.: Adaptation of the comic-book Teddy Boy.). It holds a special place in my heart because it was extremely low budget, very raw to show the lives of low level gangsters from the point of view of a hero.
Compared to other superhero movies, Young and Dangerous doesn’t have the big budgets or heavy CGI, but my idea of a superhero movie is the themes that shows in the end and I could Young and Dangerous superhero movies. It’s about the themes of perseverance through adversity, it’s about the teamwork, the companionship and I think those are also parts of superhero movies.
It’s been almost 20 years since the first film was released. If you were to make « Infernal Affairs » today, would you make any changes?
Andrew Lau : Now that I think about it, I don’t think I would make any big changes, but I’m sure I would make some small edits, one as I mentioned before is definitely the color of the movie.
Have you ever thought of making an « Infernal Affairs 4 »? Could a fourth film be made?
Andrew Lau : I’ve definitely thought about it, but it was never serious. I think after the third one, the films were at a good place. I could do it but for me it might be too boring. I wanted to looks for a new fresh ideas to do.
Maybe as a producer.
What can you tell me about your next project?
Andrew Lau : I’m working on post production on this action film called Peacekeepers and I have some scripts that I’m looking into now.
I would like to talk about video games. Video games are the number one cultural industry in the world. We find all kinds of works in it. There are also great authors like Hideo Kojima. Is it a sector that interests you? Do you have a reference game?
Andrew Lau : Watching the video game industry grow throughout the decades is definitely an amazing thing that happened. I still remember when I was back in high school, my family and I saved enough money to buy the new Apple 1. It was the late 70s and while video games was just starting out, I still had a lot of fun playing it. Like movies, it felt like an escape.
So yeah video games is definitely a sector that interests me. Now with the technology now, I even use some video game scenes as references in my own movie. Watching my sons with their video games, they are definitely influenced by it and I’m sure his generation is too. It’s a really big part of pop culture.
As you have noticed through my questions, our site is themed on Pop Culture. How would you define popular culture? What does it mean to you?
Andrew Lau : I think pop culture like the name says is just any cultural forms like film, video games, television that is popular at this time. I think that what is included in everyone’s pop culture is up to themselves. Since pop culture now it’s so accessible, there’s so many different forms of pop culture and everyone can decide on what is popular.
But you know at the end of the day, I think there is too many things going on, it’s hard to keep up so I personally don’t particularly care for it.
Finally, what message would you like to give to our readers?
Andrew Lau : I hope those who haven’t seen Infernal Affairs like the movie, I really hope through the restoration people can see a lot more. I want to watch it myself!
We have reached the end of the interview. Thank you very much Andrew for giving me time for this interview.
Andrew Lau : Thank you.
Interview by Thomas O. for Eklecty-City.fr, who thanks Andrew Lau.